La Partie III démontre les impacts sur la sécurité et la valeur créée par l’adoption de stratégies globales.
Les responsabilités de l’autorité routière portent sur une conception sûre des nouvelles routes, les aménagements de sécurité des routes existantes, un entretien et une exploitation des routes améliorant la sécurité routière. Les actions doivent s’inscrire dans un programme d’ensemble du gouvernement en matière de sécurité routière, et correspondre à l’approche Système sûr. Il s’agit là d’un programme pour transformer la sécurité qui influencera toutes les activités de l’autorité routière et pas seulement celles traditionnellement considérées sous la responsabilité de la division de sécurité routière de l’autorité routière. Ceci obligera les autorités routières à repenser leurs activités. Comment intégrer les principes et éléments du Système sûr dans toutes ses activités représente un défi majeur pour toute autorité routière.
Dans certains pays, l’autorité routière sera l’agence leader en sécurité routière, en particulier si l’autorité est aussi responsable de la gestion de la circulation, des permis de conduire et de l’immatriculation des véhicules. Cependant, dans de nombreux cas, l’autorité routière n’aura que des responsabilités partielles et ne sera pas l’agence principale. Dans une telle situation, il sera nécessaire de compter plus lourdement sur la coopération avec les autres agences pour obtenir les résultats désirés en matière de sécurité routière. Dans tous les cas, les autorités routières doivent s’ouvrir largement sur l’extérieur pour obtenir des gains du Système sûr en dehors de leurs domaines normaux de compétence. Les parties prenantes principales comprennent la police, les experts en sécurité des véhicules de l’administration et de l’industrie, et le public. Ce rôle coopératif requiert des connaissances renforcées et de nouvelles compétences en communication.
Le présent chapitre est consacré à l’intégration de l’approche du Système sûr dans les responsabilités (activités de planification, de politiques, de programmes et d’exploitation) de l’autorité routière d’un pays, et plus particulièrement à l’identification des changements nécessaires, à leur introduction et à leur application continue.
Le point de départ devrait être de cartographier l’adéquation des fonctions et responsabilités existantes de l’autorité routière par rapport aux principes du Système sûr. Ceci amènera une compréhension de l’étendue du changement nécessaire pour aligner les activités de l’autorité routière. Il faut reconnaître que cet ajustement sera substantiel et devra donc se faire progressivement, à mesure que la compréhension et l’expérience dans l’application des principes augmentent.
Les stratégies efficaces de changement sont soutenues par des processus d’apport, de consultation et de discussion au sein de l’ensemble de l’organisation. Un cadre stratégique avec des objectifs clairs doit être établi et progressivement consolidé par une politique et des directives, à mesure que les connaissances augmentent. Tous les changements devront inclure un processus continu d’amélioration et de rétroaction, afin d’identifier et d’affiner les ajustements nécessaires aux approches et priorités actuelles dans tous les domaines d’activité de l’autorité routière.
La nouvelle approche devra être pleinement intégrée dans l’approche de gestion du réseau de l’autorité routière, et il est recommandé de formaliser cette position au fil du temps. Une évaluation régulière de l’étendue et de l’efficacité de l’activité intégrée sera nécessaire.
La clarté et la pertinence des nouvelles politiques et le succès dans la mise en place du programme initial aideront à relever le défi du financement. Le soutien de l’autorité routière nationale aux gouvernements provinciaux et locaux sera nécessaire afin que ces derniers puissent développer une pratique améliorée et cohérente à l’égard de la sécurité routière.
Une législation et une réglementation pertinentes prescriront les fonctions et les responsabilités de l’autorité routière du pays. Bien que la nature et l’étendue de ces responsabilités varient d’un pays à l’autre, elles englobent habituellement à des degrés divers la conception et la construction des projets routiers neufs principaux, la sécurité, la gestion du patrimoine, la gestion de la circulation, l’entretien des routes, et la réglementation des emprises et des développements riverains. Il est également probable que les autorités routières nationales détiennent la responsabilité d’établir les limites de vitesse sur toutes les routes, ou peut-être seulement sur les routes nationales, et de publier les directives pour les limites de vitesse et les normes de conception des nouvelles routes. Une telle situation est cependant moins probable dans de nombreux PRFIs.
L’obligation juridique de l’autorité routière d’assurer une exploitation sûre de son réseau exige la mise en place de systèmes et de procédures de gestion du risque, qui constituent un point de départ minimum et doivent :
Par exemple, les autorités routières peuvent avoir l’obligation d’identifier, évaluer et prioriser les risques, et de prendre des mesures adaptées pour les traiter. Typiquement, cette obligation concerne tous les usagers de la route (y compris les piétons) et toute l’emprise routière (c’est-à-dire incluant les chaussées et les accotements).
Cependant, les dispositions législatives et réglementaires établissant les exigences de sécurité qui s’imposent aux autorités routières varieront selon les pays.
Pour les autorités routières, les points d’attention prioritaires sont la sécurité de l’infrastructure, l’utilisation des terres et le contrôle de l’accès à partir des zones riveraines et l’établissement des limites de vitesse. Par contre, pour le Système sûr il est essentiel que l’autorité routière prenne en compte dans l’exercice de ses responsabilités tous les éléments affectant la sécurité sur le réseau.
Dans les situations où les responsabilités sont divisées ou réparties entre divers ministères, ceci peut être compliqué. Des exemples sont l’établissement des limites de vitesse, la planification de la gestion de la circulation et la gestion de la circulation des véhicules lourds, fonctions qui peuvent être remplies par des ministères différents de celui de l’autorité routière (par exemple, Ministère des Transports ou de la Police). Dans de tels cas, parvenir à un accord avec d’autres ministères sur une pratique cohérente est un enjeu.
Il est recommandé, autant que possible, que ces responsabilités relèvent de l’autorité routière. Si ceci n’est pas faisable, l’autorité routière doit alors avoir le pouvoir de participer (avec leur accord) à l’établissement des directives et des normes qui seront appliquées dans le cadre de ces responsabilités.
Tous ces sujets ont un lien avec une exploitation et un usage sûrs du réseau routier. Ces aspects opérationnels sont un facteur déterminant du niveau de risque d’accident sur le réseau. Pour parvenir à des résultats efficaces en matière de sécurité routière malgré une séparation des responsabilités, les agences devront fournir un effort actif de coordination considérablement plus important qu’usuellement.
L’autorité routière a l’obligation d’aider à l’atteinte :
Les autorités routières doivent collaborer avec la police locale et provinciale et les gouvernements locaux pour leur faire comprendre l’importance de leurs rôles pour parvenir à une exploitation sûre du réseau routier. Elles doivent encourager et soutenir l’action de la police afin d’obtenir le respect des limites de vitesse, du port de la ceinture de sécurité et du casque, de la priorité des piétons aux carrefours, des dépassements sûrs, des dispositifs de contrôle de la circulation aux intersections, d’une circulation sûre des véhicules lourds et une minimisation des cas de conduite avec des facultés affaiblies.
La responsabilité du groupe chargé, au sein de l’autorité routière, d’initier le développement de politiques et de directives de sécurité routière (habituellement une équipe d’ingénieurs en sécurité routière) et de formuler des recommandations pertinentes au comité de direction est considérable. Ce groupe doit être en capacité de proposer des positions politiques destinées à réduire les risques d’accident grave sur le réseau, tout en sachant que celles-ci auront un fort impact sur les approches traditionnelles. Il peut être nécessaire de consulter et de faire participer d’autres parties de l’organisation (entretien, conception, gestion du patrimoine, gestion de la circulation) pour un changement de mode de pensée nécessaire pour obtenir leur soutien pour le changement de leurs activités. Il s’agit là d’une tâche substantielle : changer l’approche traditionnelle de la construction et de l’entretien des routes, et parvenir à la compréhension et à l’acceptation du besoin d’améliorer les réseaux afin de changer progressivement les niveaux de risque d’accident. Une équipe d’ingénieurs en sécurité routière au sein de l’autorité routière devrait être capable de fonctionner comme un centre d’expertise pour soutenir le déploiement des connaissances et de programmes de sécurité routière dans toutes les régions et, selon les besoins, au sein même du siège. Ceci impliquera la formation du personnel en régions et potentiellement de consultants locaux.
Une expertise sera nécessaire pour remplir certaines foncions critiques telles que :
Pour introduire les principes du Système sûr, les gouvernements locaux auront besoin d’aide, et ils apporteront aussi leur contribution sur la manière dont des traitements du Système sûr peuvent être plus efficacement mis en place. L’importance de leur rôle est illustrée par l’exemple de l’Indonésie, où des données récentes suggèrent que plus de 70% des décès par accidents de la route se produisent sur des routes et rues locales et provinciales, et non sur les routes nationales.
Les gouvernements locaux ont de plus des responsabilités en matière de planification de l’utilisation des terres pour contrôler la nature des nouveaux développements, l’accès aux emprises routières, et pour prévenir les aménagements illégaux. Ils ont aussi des responsabilités de gestion des abords de route pour contrôler les effets dangereux des activités qui pourraient se dérouler sur ces derniers. Dans les PRFIs, ces pouvoirs s’appliquent souvent aux routes nationales.
C’est souvent le rôle des autorités locales, par exemple, de construire des voies piétonnes adjacentes aux nouvelles routes ou aux routes existantes. Il est nécessaire de prendre en considération la sécurité des piétons comme celle des usagers motorisés et des cyclistes. Des politiques doivent être conçues et adoptées pour assurer le déplacement sûr des piétons le long et à la traversée des routes, et pour le traitement potentiel des sites à plus haut risque. Des moyens de financement doivent être trouvés pour assurer que les aménagements pour les piétons sont ou seront en place.
Des outils simples d’aide à l’amélioration des connaissances et de la compétence au niveau provincial et local seront nécessaires, ainsi qu’un financement adéquat, bien que les modes de financement soient habituellement complexes et spécifiques à chaque pays.
L’introduction du Système sûr aura probablement pour effet, au fil du temps, d’amener un changement fondamental dans l’approche et les programmes. Des interventions et investissements économiques en sécurité routière deviendront une part plus substantielle des nouveaux projets et des travaux d’entretien et de reconstruction. Ils aideront aussi à améliorer la gestion de la sécurité des sites de travaux. Dans tous les PRFIs, comprendre et identifier les enjeux des plus hauts risques d’accident (par exemple par une application de programmes d’évaluation proactive du risque à l’échelle d’un réseau et l’analyse des points noirs) augmentera la demande de mise en œuvre de traitements. La dotation de fonds pour la sécurité routière dans les budgets annuels augmentera progressivement pour répondre à cette demande. Sans un engagement financier du gouvernement (soutenu par des propositions de programmes de sécurité innovants de la part de l’autorité routière), il n’y aura aucun changement.
Augmenter le financement des projets de sécurité supposera un lien avec de nouveaux indicateurs clés de performance (ICP) relatifs à la sécurité, dont l’évaluation permettra une gestion de l’efficacité des mesures. L’Encadré 7.1 décrit une approche pour obtenir le financement de traitements du Système sûr.
En Suède, la sécurité routière est financée principalement par le gouvernement à partir du budget général à destination de l’agence principale (actuellement l’Administration suédoise des Transports,) et d’autres secteurs. En 1999, le financement vers l’agence principale a été doublé, atteignant 8,5 milliards de SEK (1,25 milliard de USD) disponibles pour la sécurité routière dans les dix prochaines années. Une allocation augmentée et réservée de fonds a été faite pour permettre des traitements physiques de sécurité routière tels que l’installation de barrières médianes sur les routes, et une amélioration de la sécurité des carrefours et des accotements. L’ingénierie de sécurité routière est de plus en plus intégrée dans les activités de conception de nouvelles infrastructures et de gestion du patrimoine existant.
Étant donné le coût relativement élevé des infrastructures et des implications des conséquences des accidents sur le système de santé, les opportunités d’obtenir un financement ciblé pour les investissements en sécurité routière (par exemple, travaux d’amélioration de la sécurité des infrastructure, contrôles policiers additionnels, campagnes d’information publique, de même que conférences et séminaires) doivent être recherchées par toutes les agences, en particulier par les autorités routières et de la santé.
Obtenir un financement adéquat est l’une des responsabilités principales de l’autorité routière. L’obtention de ressources par l’introduction de mécanismes plus efficaces (contrôle automatisé) pour la collecte des amendes pour infractions, par une contribution des compagnies d’assurance grâce à un taux approprié de retour sur investissement résultant de moindres demandes d’indemnisations, mérite une attention particulière. Dans de nombreux pays tels que l’Australie, le Canada et la Suède, les assureurs financent les principaux programmes de sensibilisation, de recherche et d’application, et les revenus des amendes pour infractions (en Australie et en France) financent les principaux programmes sur l’infrastructure.
Les principes de conception selon le Système sûr présentés au chapitre 4 anticipent, qu’avec le temps, les autorités routières qui adoptent le Système sûr assureront que l’infrastructure et l’environnement routier contribuent à de bons résultats pour la sécurité des usagers en dépit de leurs erreurs et prendront mieux en compte les seuils de tolérance humaine aux accidents.
Des politiques, des directives et des programmes doivent être développés pour assurer la transition vers un réseau incorporant les principes et les résultats du Système sûr. Le tableau 7.1 illustre le changement d’approche que le public attendra de l’autorité routière, au moyen d’une comparaison actuelle faite en Suède, entre l’approche de Système sûr/Vision Zéro et l’approche traditionnelle.
L’adoption progressive des objectifs et stratégies de Système sûr dans la pratique des autorités routières exige un investissement important en connaissances, compétences, et développement de politiques et directives, autant de la part de l’autorité routière en tant qu’entité que de la part du personnel.
Des autorités routières de plus en plus nombreuses reconnaissent les implications majeures du système Sûr.
Le rôle de l’autorité routière est de fournir un réseau routier sûr, ce qui exigera la réduction progressive des compromis traditionnels historiquement acceptés entre la sécurité d’un côté et la mobilité et l’accès de l’autre. Plutôt que des compromis, des situations gagnantes sont nécessaires et doivent être planifiées au fil du temps.
Obtenir le soutien à l’investissement pour la sécurité des infrastructures, afin de parvenir à établir dans tout le réseau des conditions où les risques d’accident mortels sont évités, deviendra une priorité. Ceci augmentera probablement de manière substantielle les interventions relatives à la sécurité de l’infrastructure par rapport aux autres programmes de sécurité routière.
Les autorités routières (et toutes les agences de sécurité routière) doivent reconnaître que le cadre permettant la compréhension et la gestion du risque doit être profondément repensé. Dans de nombreux PRFIs, la connaissance du nouveau cadre et des nouvelles responsabilités pour déterminer les risques d’accident et les traiter est inadéquate.
La nouvelle approche retenue par les autorités routières de la Slovénie (Zajc, 2014), présentée dans l’Encadré 7.2, illustre ainsi la reconnaissance par les autorités du besoin de réaliser cet ajustement majeur.
Antérieurement : le conducteur doit s’ajuster à l’infrastructure routière. Le conducteur était traité comme un potentiel délinquant.
Actuellement : l’infrastructure routière doit s’accommoder au conducteur
Le conducteur est à considérer comme une victime parce qu’il ne possède qu’une capacité limitée à traiter toute l’information provenant de la circulation. Le système doit donc être simple afin que le conducteur commette moins d’erreurs. Si le conducteur commet des erreurs, le système doit les « pardonner » et en réduire les conséquences.
Source : Zajc (2014)
D’un autre côté, l’Encadré 7.3 présente un exemple illustrant le manque de compréhension adéquate du risque d’accident et de réponse appropriée d’une autorité routière.
Dans le cadre d’un examen de la capacité en sécurité routière, des débats ont été tenus en 2008, au sein de l’autorité routière nationale d’un pays du Sud-Est de l’Europe, pour déterminer, entre autres questions, pourquoi, sur une route nationale particulièrement montagneuse avec une forte circulation de camions, le marquage diviseur au sol n’était en place que sur 50% de la longueur requise par les standards internationaux sur la longueur de dépassement à vue. L’autorité a répondu que « si le marquage diviseur au sol existait sur toute la longueur de la route, afin de satisfaire aux normes de sécurité, les opportunités de dépassement deviendraient des plus limitées ». Ce compromis entre la sécurité et la commodité (ou « efficacité » selon certains) n’était pas transparent : il n’y a eu aucun débat avec le public sur le risque d’accident grave avec des temps plus courts de déplacement. Ceci est un exemple trop commun du passé, où la sécurité n’a pas été pleinement prise en considération ou a été secrètement compromise en faveur d’autres objectifs.
L’approche adoptée en Argentine pour prendre en compte le Système sûr est expliquée dans l’étude de cas présentée dans l’Encadré 7.4.
Le problème : En 2008, le gouvernement de l'Argentine a créé l'Agence nationale de sécurité routière (ANSV) envisagée comme étant l'agence responsable de la circulation et de la politique de sécurité routière. Le défi pour l'ANSV nouvellement formée était d'exercer ses pouvoirs et d'accomplir sa mission à l’intérieur d’un cadre fédéral qui prévoyait une autonomie significative des gouvernements provinciaux et locaux. Le défi de l'ANSV incluait un système de registre décentralisé pour les permis de conduire, sans enregistrements unifiés des infractions au code de la route et aucune donnée fiable sur les accidents de la route.
La solution : Le rôle de l'ANSV a été institutionnalisé par sa mise en place en tant qu'organisme décentralisé avec une autonomie financière au sein du ministère de l'Intérieur et la «responsabilité» de l'ANSV à l’égard de la sécurité routière a été légitimée par des partenariats avec les gouvernements provinciaux et locaux, les organismes non gouvernementaux et le secteur privé. Pour l'application des lois relative à la circulation, l'ANSV a été chargée de promouvoir et de coordonner le contrôle de la circulation et la supervision des forces de police dans toutes les juridictions. L'ANSV a également conçu et mis en œuvre, province par province, un système de registre national pour les permis de conduire, les données de circulation et les infractions.
Pour construire la plate-forme de gestion des résultats, l'ANSV a investi dans des systèmes de suivi de la sécurité routière et des outils d'analyse à l’occasion du lancement d'un Observatoire National de la Sécurité Routière. L'Observatoire a mis au point un système complet de gestion des données d’accidents incorporant les lignes directrices des meilleures pratiques définies par le Groupe international sur les données de sécurité routière et leur analyse (IRTAD) de l'OCDE en utilisant un programme de mentorat par les pairs avec les pays de l’OCDE.
Le résultat : Entre 2008 et 2014, les décès par accidents de la route pour 100 000 habitants ont diminué de 14,5 à 12 (- 17%); et les décès pour 10 000 véhicules sont passés de 3,7 à 2,1 (- 43%), pendant la même période. De plus, en ce qui concerne les aspects comportementaux, le nombre de conducteurs mettant leur ceinture de sécurité a augmenté de 36% entre 2011 et 2014 et l'utilisation du casque de moto est passée de 39% à 62% au cours de la même période.
En 2013, l'IRTAD a commencé à établir des rapports et à fournir un accès mondial aux données provisoires de l'Argentine, devenant ainsi le premier pays latino-américain à intégrer l’IRTAD en tant que membre à part entière.
Source: Veronica Raffo et Tony Bliss, «La décennie d'action pour la sécurité routière 2011 - 2020: leçons de l'Argentine», En brève N ° 180, Banque mondiale, décembre 2012.
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Mettre en œuvre les principes du Système sûr dans les nouveaux projets routiers majeurs et, plus particulièrement, améliorer avec le temps le niveau de sécurité des routes existantes impliquera, entre autres mesures, la mise en place de contrôles adéquats des accès le long des routes et des activités riveraines. Les pouvoirs et les actions gouvernementales nécessaires pour réglementer l’utilisation des terrains adjacents et les activités permises sur les abords des routes existantes seront indispensables.
Il sera nécessaire d’établir des processus entre l’autorité routière et les autorités locales pour évaluer l’impact sur la sécurité de tout développement proposé sur des terrains adjacents. Les problèmes potentiels de sécurité doivent être identifiés et une gamme de réponses développée en tant que possibles conditions auxdits développements afin de minimiser tout dommage futur. L’autorité ou le pouvoir d’exécuter ces processus doivent être inclus dans la législation des autorités locales concernant la planification de l’utilisation des sols.
Des lois amenant un plus grand respect par le public des décisions prises par l’autorité routière ou l’autorité locale sur ces questions seront nécessaires, et devront être appliquées. Il faudra aussi considérer l’introduction d’incitations pour encourager les autorités locales à adhérer aux politiques de planification de l’utilisation des sols. Il est d’extrême importance que les parties prenantes comprennent et acceptent le besoin de législation pour contrôler ces développements, et que les autorités :
L’Encadré 7.5 présente une étude de cas qui couvre certaines questions très pertinentes de sécurité dans de nombreux PRFI pour les villages-rue. Ces situations communes reflètent les pouvoirs inadéquats de l’administration publique (ou leur manque d’application), ce qui conduit à des environnements routiers dangereux, en particulier pour les usagers vulnérables.
Le problème : l’un des facteurs principaux de décès sur la route dans les PRFI est la présence d’usagers vulnérables sur les routes bordées d’une urbanisation linéaire. Dans ces cas, le manque de contrôle des accès et des stratégies pauvrement conçues pour le développement de l’infrastructure routière (et pour le développement de l’urbanisation) a pour résultat un mélange de fonctions avec des usages résidentiels et commerciaux le long des routes artérielles du pays supportant une forte circulation de véhicules lourds et rapides. Ces «routes cercueils» sont des exemples bien connus des problèmes posés par l’urbanisation linéaire le long de routes fréquentées, et se rencontrent dans de nombreux PRFI.
Les usagers vulnérables de la route ne sont pas les seuls à courir un grand risque. La présence de demi-tours mal conçus ou de restrictions physiques inadéquates aux demi-tours le long des routes des PRFI sont une cause majeure d’accidents graves, en particulier parmi les passagers des minibus de transport public (par exemple en Egypte). Ces ouvertures pour les demi-tours et les manœuvres permises constituent un désastre pour la sécurité routière. Elles sont une caractéristique profondément ancrées dans les PRFI. Elles requièrent action de la part des autorités routières pour parvenir à une conception adéquate des projets par les autorités locales local pour une gestion sécuritaire de l’emprise routière.
La solution : des mesures fondées sur les bonnes pratiques dans les PREs et qui comprennent :
Source : Vollpracht (2013).
L’urbanisation linéaire le long des routes crée des situations dangereuses, où les piétons et les véhicules entrent et sortent de la route depuis chaque entrée des propriétés riveraines (en continu). Les principes du Système sûr indiquent que chaque accès à une propriété donnant sur la route représente un carrefour mineur, avec la possibilité de collisions à angle droit entre des véhicules entrant ou sortant de la chaussée et des véhicules se déplaçant le long de la route. Dans de nombreux pays, ces situations compromettent les efforts pour élaborer un système cohérent de classification routière s’appliquant à des tronçons de route. L’Encadré 7.6 met en lumière des solutions pour traiter de l’urbanisation linéaire.
L’urbanisation linéaire est fréquente en Republika Srpska (et dans la plupart des pays des Balkans) et pose un sérieux problème, en particulier pour les usagers vulnérables de la route.
Une stratégie à deux composants a été proposée pour traiter de ces risques :
Source: Kostic et al (2013).
Comme décrit plus haut, les activités non autorisées dans l’emprise routière, et en particulier sur les routes à fort trafic, doivent être réglementées et gérées pour minimiser les impacts négatifs sur la sécurité des usagers. Dans de nombreux PRFI, ceci est une faiblesse considérable, ce qui permet aux commerçants et vendeurs d’occuper l’emprise routière et d’y installer des stands et des marchandises. Dans les zones urbaines, les vendeurs ambulants installent leurs marchandises sur les accès piétonniers, forçant les piétons à marcher sur la route. Souvent, cet usage non autorisé n’est que peu géré par le gouvernement, les autorités et la police locaux. Attirer l’attention et obtenir le soutien du gouvernement pour changer cette situation représente un défi majeur pour les autorités routières. Il existe cependant des exemples de succès dans les PRFI, où les autorités locales ont négocié la réinstallation des vendeurs ambulants dans des espaces de marché public, loin des routes principales, pour en améliorer la sécurité.
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L’adoption d’une classification des routes du réseau prenant de plus en plus en considération la sécurité et qui reflète mieux la fonction, la limite de vitesse, la configuration et la conception de la route est une aspiration importante. Comme signalé plus haut, l’urbanisation linéaire (aussi appelée « en ruban ») est une caractéristique de la plupart des PRFIs et tend à contrecarrer cette approche de classification. Pour le Système sûr, il est important de tendre vers l’objectif à long terme de séparer les fonctions d’usage des routes et d’améliorer la sécurité dans l’exploitation routière. Une planification adéquate peut guider les futurs investissements routiers (par exemple la construction de routes de contournement) et l’amélioration des routes existantes pour « sécuriser » leur accès ou leur fonction de route principale.
Comme indiqué au chapitre 4.6, l’approche sécurité durable des Pays-Bas insiste beaucoup sur un système robuste de classification des routes. La fonctionnalité de la route est intégrée dans l’approche, et suggère que chaque route ne devrait avoir qu’une seule fonction, que ce soit de route de transit, de route distributrice ou de route secondaire. Ce concept a été bien compris durant de nombreuses années, mais plus récemment il a été de plus en plus reconnu que davantage devait être fait pour assurer que cette distinction est faite. Ceci inclut l’établissement d’un système approprié de classification s’appliquant à toutes les routes et de s’assurer que la conception de la route et sa compréhension par les usagers soit cohérentes avec la fonction de la route. Le chapitre 8.2.1 fournit plus d’information sur cette question, y compris un examen du concept de routes « lisibles » pour aider l’usager à comprendre cette classification fonctionnelle.
Pour l’autorité routière, le processus vers l’adoption des principes du Système sûr et leur mise en œuvre dans ses pratiques d’exploitation est difficile et potentiellement long. Les progrès seront mesurés en années plutôt qu’en mois. Les mesures pour intégrer l’approche du Système sûr comprendront probablement :
Le tableau 7.2 présente un résumé de certaines questions critiques et des actions ou processus potentiels associés à l’intégration du Système sûr dans les systèmes de gestion de l’autorité routière.
Question critique | Action ou processus potentiels |
---|---|
Comment l’autorité routière peut-elle commencer le processus d’intégration de l’approche du Système sûr dans ses pratiques d’exploitation ? | Les déclarations de rôles et responsabilisation à tous les niveaux de l’autorité routière devraient refléter les actions et résultats attendus afin d’assurer les progrès du Système sûr |
Comment démarrer ou continuer la transition depuis les approches traditionnelles vers la philosophie du Système sûr ? | Assurer qu’il existe un haut degré de compréhension des avantages associés à l’approche proactive de minimisation des risques. Les principes du Système sûr et une conception fondée sur des principes scientifiques devraient être communiqués au personnel de l’agence et aux parties prenantes de manière claire et cohérente. Les avantages économiques et de sécurité de l’adoption de cette approche devraient être démontrés au moyen d’étude de cas et communiqués dans toute l’organisation. |
Comment mettre en œuvre les principes du Système sûr dans la communication institutionnelle verticale et horizontale et les processus de prise de décisions ? | Les processus institutionnels doivent intégrer les résultats de Système sûr pour renforcer le développement d’une organisation en apprentissage constant. Le développement de l’exploitation et l’expérience de mise en œuvre devraient alimenter le développement continu de politiques. La rétroaction à partir de ces activités est un moyen essentiel d’améliorer les politiques et les directives afin d’obtenir des résultats de Système Sûr. |
Arrangements formalisés pour les nouvelles manières de gérer la sécurité sur le réseau | Appliquer ces politiques et développer des systèmes de soutien pour incorporer une gestion proactive de la sécurité du réseau dans les activités de planification, de développement de projets, de conception, d’exploitation et d’entretien de l’autorité routière. Faire des mesures continues des résultats de la sécurité pour assurer au public que le niveau de performance de l’autorité routière va en s’améliorant. |
Prendre en compte la conscience de la communauté et des parties prenantes et leur acceptation des implications de l’adoption des principes du Système sûr | Développer une stratégie de communication fondée sur des messages clé acceptés et des moyens de dialogue avec les parties prenantes identifiées. |
Au début, toute stratégie nationale existante de sécurité routière devra être examinée et ajustée si nécessaire pour inclure les bases du Système sûr de la Décennie d’Action pour la Sécurité Routière des Nations Unies. Il faut s’attendre à ce que de nombreux PRFIs doivent examiner la pertinence de leurs processus (voir le chapitre 7.4.3 pour des directives).
Le niveau de direction devra aussi reconnaître les changements de responsabilités organisationnelles qui découleront de ces décisions, et penser à la manière de les accompagner. Le détail de ceci sera influencé par les besoins et l’environnement dans lesquels l’autorité routière fonctionne.
Les progrès dépendront beaucoup de l’orientation donnée par le directeur général. Ce sont là des tâches de gestion du changement très exigeantes. Obtenir le soutien et l’engagement de l’encadrement au sein de l’organisation est une première étape critique et une priorité.
Des programmes de formation continue, tels que ceux décrits au chapitre 7.4.2, seront importants, à mesure que les politiques institutionnelles et les systèmes améliorés de gestion du réseau seront adoptés par l’organisation. Dans le cas d’une autorité routière en voie d’intégration de la pratique du Système sûr, les niveaux d’encadrement supérieur et intermédiaire auront besoin d’un temps suffisant pour apprendre et comprendre les concepts sous-jacents.
Les processus de communication interne mis en place pour accompagner la gestion du changement devront aussi être considérés, si des changements significatifs doivent être introduits au fil du temps. Ceci doit comprendre l’établissement d’une communication efficace à tous les niveaux de l’administration et entre le siège et les agences régionales.
L’expérience de l’Administration suédoise des routes dans l’introduction du Système sûr (Vision Zéro) et dans les efforts, au sein de l’organisation, pour mettre en œuvre des programmes de sécurité de l’infrastructure routière substantiellement différents est instructive (Encadré 7.7).
De 2000 à 2009, la Suède a procédé à l’augmentation du nombre de routes de type 2 + 1, divisées par une barrière médiane, sur les tronçons à fort trafic de son réseau routier national. Ce traitement a été appliqué sur 180 km en 2000 et a atteint les 2 120 km en 2009. Ceci était destiné à traiter le nombre élevé de collisions frontales survenant sur le réseau, dues en partie aux chaussées existantes de 13 mètres de large (comportant deux voies de circulation avec de larges accotements) qui encourageaient le conducteur à se comporter comme sur une route à quatre voies, augmentant ainsi les risques de collisions frontales. La Suède a aussi commencé l’installation de barrières latérales pour réduire les risques d’accidents graves liés aux sorties de route et a élargi son programme d’implantation de carrefours giratoires pour réduire les risques d’accidents graves aux intersections.
Il a fallu un certain temps, en particulier à partir de 2000, pour que la décision d’installer des barrières médianes, prise au siège central, soit exécutée et soutenue par les gestionnaires régionaux. En fait, des objectifs de résultats ont été exigés des gestionnaires régionaux (voies 2 + 1 avec des barrières médianes à câble métallique) afin d’entraîner la conformité avec la politique retenue par l’administration. Certains gestionnaires régionaux ont considéré les directives pour la construction de barrières médianes et des voies 2 + 1 comme n’étant pas en accord avec les approches traditionnelles.
Les décès sur la route ont baissé de 550 à 350 annuellement durant cette période de 10 ans à mesure que le déploiement avançait, et cet ensemble d’initiatives a été reconnu dans le monde entier (faisant partie de la mise en œuvre de la Vision Zéro).
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L’Encadré 7.8 présente l’exemple d’une autorité routière posant les bases de sa transformation en une autorité intégrant pleinement la philosophie du Système sûr dans ses activités et dans l’objectif stratégique associé qu’elle a adopté. Main Roads Western Australia (MRWA) est un utilisateur informé du Système sûr, possédant la compréhension et l’expérience de son application. Le processus adopté par MRWA pour guider l’utilisation des principes du Système sûr dans son exploitation est exhaustif et instructif pour d’autres autorités routières au même niveau avancé de conscience des avantages du Système Sûr.
La vision :
« Éliminer les décès et les blessures graves sur le réseau routier de l’Australie occidentale (Western Australia) et laisser à nos enfants, petits-enfants et à la société l’héritage durable d’un système routier sûr ».
L’objectif stratégique :
« La stratégie de sécurité routière de MRWA « Vers Zéro » vise à amener des changements dans nos structures institutionnelles, pratiques et notre culture en matière de sécurité routière dans le cadre de nos efforts pour éliminer les décès et les accidents graves sur la route. Elle permettra de :
L’objectif stratégique de « Vers Zéro » reflète l’attention portée au changement culturel : changer le mode de pensée, la pratique et les comportements (permettre au personnel d’imaginer toutes les possibilités) afin de construire, entretenir et exploiter un système routier intrinsèquement sûr.
Ainsi qu’il a déjà été signalé, la législation pertinente qui régit l’action de l’autorité routière influencera sa manière de procéder à la mise en œuvre de l’approche du Système Sûr.
La sensibilisation aux possibilités et à l’application du Système Sûr se fera par la direction, la formation et le développement des connaissances, comme déjà examiné au Chapitre 4. Dans les PRFIs, assurer les ressources destinées à cette sensibilisation est une étape critique.
Des activités efficaces de formation et de gestion du changement seront cruciales pour avancer vers le Système Sûr. La Nouvelle-Zélande, qui possède une approche de Système sûr bien avancée, a mis en œuvre des programmes de formation dans tout le secteur par l’Autorité des Transports de la Nouvelle-Zélande (NZTA) (Climo et al, 2014), comme l’indique l’Encadré 7.9..
« Voyages plus sûrs » (la stratégie de NZTA) a reconnu le besoin d’intégrer le Système sûr dans la culture de sécurité routière du pays et de développer les compétences correspondantes. Dans les quatre années suivant son adoption de l’approche du Système sûr, NZTA s’est efforcée d’intégrer les processus de ce système dans ses opérations.
Un programme structuré de « changement de culture » a été intégré, et détaillait ce que ce changement signifiait dans la pratique et ce qui devait être fait différemment. Les ressources suivantes ont été élaborées :
Les politiques, procédures et lignes directrices ayant potentiellement la plus forte influence ont été identifiées, et un programme a été entrepris pour leur modernisation.
Le deuxième Plan d’Action pour la Stratégie Voyages plus sûrs (2013-2015) a continué sous ce même angle avec des tâches spécifiques pour faire « Avancer le Système sûr » comprenant :
Source: Climo et al (2014).
L’expérience de NZTA a démontré que le changement de culture n’est pas une tâche rapide ou facile. Elle exige une forte direction depuis le plus haut niveau (politiciens et directeurs généraux) et de la persévérance dans la continuelle répétition de messages clés. Il a de plus été reconnu que changer au niveau des média l’attitude habituelle de « blâmer le conducteur » est importante.
Une formation efficace du personnel exigera des programmes tels que celui de NZTA et d’autres programmes plus modestes devant être identifiés puis utilisés pour une formation pertinente du personnel, en particulier celui des autorités des PRFIs. Des activités telles que des échanges de court terme de personnel (deux à quatre semaines) avec d’autres autorités routières nationales ainsi que des séminaires par des experts locaux et internationaux pour informer et obtenir des contributions sur les questions liées à la sécurité routière devraient aussi être organisés.
Une culture de changement et d’amélioration continus devrait être encouragée, et des programmes de formation extensifs pour le personnel du siège central et des régions devraient être introduits de manière opportune. Ces étapes sont vitales pour aider à consolider les connaissances en sécurité et à améliorer les résultats en sécurité routière obtenus par l’autorité routière.
Les initiatives pour aider à l’application des principes du Système sûr dans les programmes et projets de l’autorité routière comprennent :
De nombreux professionnels des autorités routières s’informent sur l’analyse des accidents, le développement d’options de traitement, la sélection de l’option la plus économique (en vue de réduire les blessures graves et mortelles, au lieu du nombre d’accidents), et sa mise en œuvre au moyen de programmes et projets sur les sites à haut risque (points noirs). S’il est certes préférable que l’autorité routière procède, le plus tôt possible, à l’évaluation de tout son réseau et au traitement du risque d’accidents, les projets de correction des sites à haut risque (qui se fondent sur des preuves solides du type d’accident, sur de robustes estimations des coûts de projet et des gains en termes de réduction des accidents, suivis par une évaluation ultérieure) sont un outil essentiel d’apprentissage pour les professionnels et ingénieurs débutant en sécurité routière. De tels projets, s’ils sont exécutés clairement en fonction du Système sûr et d’une compréhension minimale de ses bases, sont des étapes importantes pour les personnes, vers une compréhension plus large du risque d’accidents et des outils.
Le Chapitre 6 fournit des exemples de projets de démonstration exécutés par les agences de sécurité routière dans certains pays, y compris l’autorité routière, afin d’accroître les connaissances sur l’analyse du risque et les options de traitement.
Le changement est toujours difficile, et la réévaluation ou la réorientation des politiques et des lignes directrices concernées par l’intégration totale du Système sûr est de grande ampleur. Il s’agit d’une étape difficile pour n’importe quelle autorité routière, mais plus encore pour celle d’un PRFI empruntant cette voie. Ceci exigera l’engagement et la persévérance des dirigeants et autant d’assistance que possible de la part des institutions internationales de financement (IFIs), des associations d’autorités routières (en particulier de l’AIPCR), ainsi que le soutien par le biais de programmes de jumelage et de programmes d’information et de formation du personnel avec des autorités routières des PREs.
Pour toute autorité routière, le passage de la compréhension individuelle à l’adoption d’un consensus institutionnel et ensuite à un accord sur la nouvelle vision en matière de sécurité routière et sur comment l’appliquer est un défi. Des processus de ce type seront moins développés dans les autorités routières de la plupart des PRFIs ; leurs dirigeants doivent donc encourager le dialogue et les débats le plus tôt possible. Il faudra du temps et une direction forte pour mettre en œuvre un changement significatif dans les processus d’établissement de politiques institutionnelles.
Pour soutenir la tâche politique d’établissement des priorités en matière de sécurité routière, les autorités routières des PRFIs pourraient utilement établir des groupes de travail pour examiner les problèmes et développer, à l’attention des dirigeants, des recommandations de politiques détaillées qui peuvent être mises en œuvre. Chaque groupe devrait comprendre :
Ces groupes de travail rendraient compte à la direction, qui pourrait se réunir, de manière régulière, en tant que comité exécutif de planification de la sécurité routière. Les questions de priorité politique pourraient inclure :
Une autorité possédant des processus institutionnels de prise de décision plus avancés pourrait suivre une approche de CEP pour développer et étendre un programme de réduction des risques d’accident. Le CEP serait composé de cadres de l’organisation, hautement qualifiés en ingénierie, et examinerait des présentations préparées par les projeteurs concernant les plus grands projets proposés, de manière régulière (par exemple une fois par semaine). Les proposants du projet seraient questionnés sur des aspects clés (coût estimé, gestion du patrimoine, réalisation du projet, gestion de l’environnement et acquisition de terrains, mobilité et accès, gestion de la circulation et sécurité routière).
Les discussions sur la sécurité se centreraient sur les mesures proposées pour améliorer la sécurité dans le cadre de projets nouveaux ou sur les problèmes de sécurité d’une route existante qui devrait être modernisée. Les politiques institutionnelles, les directives et les normes de sécurité seraient ajustées ou introduites, comme résultat de ces discussions et des révisions futures associées.
Comme indiqué au chapitre 7.4.2, l’expérience antérieure en programmes de traitement des points noirs est pertinente, car ces activités sensibilisent l’autorité routière non seulement aux opportunités d’améliorer le niveau de sécurité sur le réseau, mais aussi aux désavantages de ne traiter que les sites à haut risque et de laisser des tronçons à moindre risque sans traitement et avec moins de probabilité d’être traités.
L’approche par CEP reconnaît que l’intégration du Système sûr requiert un dialogue dans toute l’organisation, au niveau de la direction sur les responsabilités d’exploitation du réseau, ainsi qu’au niveau des programmes ou des projets (par exemple la localisation sur le profil en travers de pistes cyclables le long de routes artérielles, à l’occasion d’une modernisation ou d’un projet neuf).
La production de politiques, de guides et normes de qualité est l’étape suivante du processus indiqué au chapitre 7.4.3. Cette production se fera progressivement et sera de nature très variée, reflétant le stade de développement de la sécurité de l’autorité routière et ses priorités immédiates en la matière. Le Chapitre 9 donne plus de conseils sur le rôle des politiques, guides et normes et sur leur développement.
Les domaines de priorité pour la définition d’une politique et pour la formation associée seraient : les lignes directrices du Système sûr ; la conception de la route (intégrant les concepts du Système sûr), la gestion de la circulation et des zones de travaux ; l’identification des sites à haut risque, leur analyse et traitement (l’analyse des risques sur le réseau suivra lorsque les outils et le financement des projets sont disponibles).
En 2013 lors d’une revue de son plan stratégique général, la Direction générale des Routes (DGH) de l’Indonésie a identifié certaines failles en matière de sécurité routière et pris les initiatives politiques suivantes :
citer le plan directeur pour la sécurité routière dans le plan stratégique général de la DGH,
Pour les autorités routières des PRFI, les priorités en sécurité routière du point de vue de la politique et de sa mise en œuvre seront souvent différentes de celles des autorités routières des PRE. Pour les PRFIs, les priorités politiques comprendront généralement :
La ville d’Abu Dhabi a développé des directives d’aménagement urbain à appliquer dans ses rues pour améliorer la sécurité de manière durable et rendre la ville plus conviviale aux piétons, aux usagers des transports publics et aux cyclistes et pour donner à ces catégories d’usagers, grâce à ces aménagements, la priorité sur les véhicules et leurs occupants. Des détails sont présentés dans l’Encadré 7.10.
Le problème : l’Émirat d’Abu Dhabi possède une population diverse avec des comportements différents des conducteurs, des degrés divers d’éducation en matière de conduite, et des différences culturelles. Le Conseil de Planification urbaine d’Abu Dhabi (URC) a reconnu le besoin de créer des rues sûres offrant plus d’espaces piétons, dans un effort pour parvenir à une société multimodale.
La solution : L’URC a fait rédiger le Manuel d’Aménagement urbain d’Abu Dhabi pour traiter de ces questions. Le Manuel fait maintenant partie des règles de l’URC pour les projets et doit obligatoirement être utilisé conjointement avec les autres directives et normes adoptées. Il se fonde sur plusieurs principes clés l’un met en avant les piétons : « une bonne conception des rues commence par les piétons », un autre déclare que : « un réseau de rues bien conçu fournit la sécurité à tous les modes de transport ».
L’objectif du Manuel est de changer les priorités de la conception des rues, de l’approche conventionnelle centrée sur les véhicules à moteur à un processus intégré qui prend en considération l’environnement urbain, la capacité de transport, et équilibre les besoins de tous les usagers y compris les piétons, les usagers des transports en commun, les cyclistes et les automobilistes.
Les résultats : le Manuel stipule que les piétons sont la première priorité dans la conception de tous les types de rues dans tout l’Émirat, suivis par les usagers des transports en commun, les cyclistes et enfin les véhicules motorisés. Une approche équilibrée favorise la marche et un environnement urbain durable. Le Manuel détaille aussi la conception des stationnements, des profils transversaux des rues, des intersections de même que l’emplacement des traversées piétonnes. Il aborde les situations telles que les centres d’affaires, le contexte urbain, les zones résidentielles, commerciales et industrielles, en plus d’une variété de types de rues allant des rues à sens unique et passages jusqu’aux principales avenues artérielles et de transit. Des éléments normalisés de conception centrés sur les piétons assurent l’abri, l’ombre, la sécurité, la protection contre les intempéries, le confort et le respect des besoins culturels.
Graphique 7.1 : Le paysage urbain d’Abu Dhabi
Source: Abu Dhabi Urban Planning Council, 2011
(http://www.upc.gov.ae/guidelines/urban-street-design-manual.aspx?lang=en-US)
Les étapes présentées aux chapitres 7.4.1 à 7.4.4 fournissent les lignes directrices nécessaires pour intégrer le Système sûr dans la gestion et l’exploitation du réseau. Cependant, les autorités routières doivent encore progressivement appliquer les politiques qu’elles définissent et établir des systèmes de gestion qui soutiennent ces dernières pour assurer que leurs activités de gestion du réseau incorporent toutes les directives qu’elles ont établies.
L’autorité routière devra agir pour incorporer les systèmes de gestion de la sécurité dans la planification et l’exploitation de son réseau, ce qui peut être fait grâce à des mesures telles que :
Il est recommandé de formaliser progressivement cette approche, la norme ISO 39001 fournit des conseils sur la manière de structurer cette action (Paragraphe 3.2.3).
L’autorité devra progressivement assurer à elle-même et au public ses progrès dans l’amélioration de la gestion, de l’exploitation et de la sécurité de son réseau, ce qui peut être réalisé par :
Dans la plupart des PRFI, l’identification et l’adoption d’indicateurs spécifiques de résultats de la sécurité routière seront une manière utile de mesurer les résultats et d’établir progressivement une responsabilisation.
Toutes les stratégies de sécurité routière devraient avoir leurs indicateurs clés de performance (ICP) spécifiques. Leur introduction permet aux autorités de spécifier le niveau de résultats recherché d’amélioration de la sécurité et/ou d’encourager le développement et l’exécution des programmes d’amélioration.
L’absence d’ICP de sécurité routière de haut niveau peut avoir pour conséquence l’absence d’une dotation budgétaire dédiée à des programmes spécifiques. Dans les PRFIs, les catégories d’affectation du financement comprennent typiquement l’entretien de routine, l’entretien périodique, la rénovation et la reconstruction. L’un des avantages d’une dotation dédiée à des programmes spécifiques de sécurité routière est la capacité de mesurer les dépenses générales de travaux ciblés en matière de sécurité et d’évaluer la rentabilité économique de l’investissement.
Pour l’autorité routière, de bons résultats en sécurité sur le réseau doivent être considérés comme un résultat majeur de l’organisation. Il est probable que les ICP de sécurité de niveau institutionnel prendront progressivement une place prédominante dans l’évaluation générale des résultats de l’autorité routière.
Il sera nécessaire de développer une gamme d’indicateurs de résultats plus détaillée pour favoriser le progrès dans l’application de traitements de sécurité à l’infrastructure routière. Après l’adoption des ICP, il faut déterminer de quelle manière ils seront mesurés et rapportés, ainsi que la fréquence de leur utilisation (Chapitres 3, 5 et 6). L’exemple des ICP du Plan mondial est présenté dans l’Encadré 7.11.
Le Plan mondial pour la Décennie d’action propose des indicateurs de résultats pour le volet Sécurité des routes et mobilité. Bien qu’ils soient ciblés pour une surveillance des activités au niveau mondial, ils peuvent servir d’exemple pour usage dans un pays donné. Les indicateurs sont catégorisés comme « essentiels » ou « optionnels ».
Indicateurs essentiels
Indicateurs optionnels
Source : UNRSC, 2011
Les directives pour les programmes sont des spécifications, à destination du personnel de l’autorité routière, sur les éléments du programme qui devront être développés et financés de manière prioritaire (habituellement en fonction du rapport coût-bénéfice ou de la valeur actuelle nette, Chapitre 4. Elles sont utilisées par de nombreuses autorités routières pour guider la préparation de projets qui doivent être soumis à un processus d’approbation institutionnelle dans différentes catégories de financement de programmes pour l’année budgétaire à venir.
Leur développement est habituellement un processus coopératif entre le siège et les régions de l’autorité routière qui devront concevoir et réaliser les projets approuvés en tant que composants de programmes particuliers. Les directives représentent la spécification du programme annuel proposé d’activités, approuvé entre les niveaux centraux et régionaux ; elles permettent aux régions de soumettre des offres détaillées pour certaines catégories de financement de projet.
Un exemple de ceci est l’introduction d’une politique d’entretien ciblant la sécurité qui intègre des critères de performance sur la sécurité dans les niveaux de service retenus pour le réseau routier. La modification des pratiques existantes peut permettre une amélioration progressive mesurable de la sécurité dans tout le réseau. L’examen des pratiques existantes et l’identification des manières de les modifier pour parvenir à une meilleure sécurité du réseau à un niveau de coût égal ou similaire pourraient être effectués dans le cadre du développement de directives pour le programme annuel.
Des directives de programme opérantes requièrent un temps suffisant pour leur élaboration et sont ensuite utilisées pour aider à bâtir le programme annuel en vue de son examen, de sa prise en considération et de la priorisation durant la période d’établissement du budget.
Il existe de nombreuses variantes à ce processus selon les différentes autorités. Les éléments importants en sont :
Il faut du temps et des efforts pour établir de nouveaux programmes avec lesquels l’autorité routière soit à l’aise. Il est donc suggéré d’établir, dans les premières années, des programmes plus simples (en conception et réalisation) pour aider dans cette transition, en particulier dans les PRFIs.
Les projets plus simples par nature (tels que l’identification et le traitement de points ou de tronçons noirs sur le réseau existant et les audits de sécurité routière des projets neufs) constituent une bonne plateforme d’apprentissage initial.
Démarrer les programmes de sécurité par le traitement de points noirs permet au personnel de comprendre la nécessité d’analyser le coût des accidents, l’impact des différents types de traitements (tels que les carrefours giratoires ou l’élargissement des accotements) et le gain économique découlant du traitement. Comme indiqué au chapitre 7.4.3, il s’agit là d’une expertise nécessaire pour que l’autorité routière puisse passer à une approche basée sur les risques d’accident ainsi qu’à une analyse et un traitement à l’échelle de tronçon de routes et d’itinéraires pour obtenir les bénéfices de la réduction des accidents.
Le succès dans les premières années, avec un programme simple, est susceptible d’augmenter le soutien de la population et du gouvernement à l’amélioration de la sécurité routière et d’obtenir davantage de financement.
Belin M-A, Tillgren P & Vedung E (2012), Vision zero – a road safety policy innovation, International Journal of Injury Control and Safety Promotion Volume 19, Issue 2, 2012, pages 171-179.
Climo, H, Dugdale, M & Rossiter, L (2014), The Safe System in Practice – A sector-wide training programme, Journal of the Australasian College of Road Safety, 25, 19-26.
Kostic N, Lipovac K, Radovic M & Vollpracht H, 2013, Improvement of Road Safety Management and Conditions in Republika Srpska, World Road Association (PIARC), Routes/Roads 360, 54-63.
Vollpracht, H (2013), Case studies of linear settlements in LMICs: safety issues and potential treatments to lessen crash risk, World Road Association (PIARC)
Zajc, L (2014), ‘Slovenian experiences on road safety management’, Presentation to Regional Road Safety Capacity Building Workshop, Belgrade, Serbia, 15-16 October 2014
Messages clés
Les routes sont construites pour permettre le déplacement des personnes et des biens entre deux destinations, c’est-à-dire pour fournir l’accès et la mobilité. Dans les PRFIs en particulier, le commerce et les échanges sociaux sur les abords de route continuent d’être une troisième fonction essentielle de certaines parties du réseau routier. Dans ces pays, les avantages de réserver des espaces publics où la sociabilité plutôt que la mobilité est la priorité, sont de plus en plus reconnus. Mobilité, accessibilité et interaction commerciale et sociale sont donc les trois utilisations humaines que la conception et la gestion des routes doivent servir.
Les Chapitres précédents ont présenté les concepts du Système Sûr, et du déplacement sûr en tant que produit, lequel exige certaines actions pour parvenir à sa réalisation. Les produits sûrs doivent répondre aux besoins, aux capacités et aux attentes des usagers et les routes ne font pas exception. Ce Chapitre explique comment créer un système routier qui prenne en compte les caractéristiques humaines et satisfasse les critères du Système Sûr.
Les facteurs humains sont un concept scientifique bien établi, qui a influencé les développements dans de nombreux domaines de la technologie. Leur application aux questions de sécurité routière de manière formelle remonte au moins aux années 30 (par exemple, Forbes, 1939). Les normes principales pour la conception actuelle des routes se fondent désormais sur la compréhension contemporaine de questions telles que le niveau d’éclairage nécessaire pour voir les détails et la vitesse à laquelle l’information est acquise. Cette compréhension de la capacité visuelle et de la prise de décision chez l’être humain permet le développement de spécifications pour l’infrastructure routière, telles que des exigences de distances de visibilité, des normes d’éclairage, la conception et les dimensions des panneaux routiers, et la distance entre les points successifs de décision, de telle manière que les usagers puissent emprunter la route en toute sécurité et sans difficulté. Étant donné que les connaissances sur les facteurs humains continuent d’’évoluer, bon nombre de leurs conclusions doivent encore être incorporées dans les directives et les normes techniques.
Ce Chapitre cherche à introduire le concept des facteurs humains, à l’associer aux principes du Système Sûr, et à expliquer comment les connaissances sur ces facteurs peuvent être appliquées pour créer un système routier plus sûr.
Le rapport du programme national coopératif de recherche routière (NCHRP) des États-Unis, Directives sur les Facteurs humains dans les Systèmes routiers (Human Factors Guidelines for Road Systems, Campbell et al, 2012), donne une définition avec laquelle tous les praticiens en facteurs humains sont d’accord :
« les facteurs humains sont une discipline scientifique appliquée qui essaie d’améliorer la relation entre les appareils et systèmes, et les personnes qui doivent les utiliser ».
S’agissant de la sécurité routière, les facteurs humains concernent l’interaction entre les usagers de la route avec les éléments du système routier, y compris les véhicules.
Certains préfèrent d’autres définitions, telles que : « facteurs physiologiques ou psychologiques qui contribuent, de manière vérifiée, aux erreurs d’utilisation dans la manipulation de machines ou de véhicules ». Puisque l’attention principale de ce Manuel se porte sur l’application des principes du Système Sûr, la première définition ci-dessus est utilisée parce qu’elle souligne le rôle des facteurs humains dans la connexion des éléments du système.
La distinction est souvent faite entre les erreurs involontaires et la désobéissance aux règles de circulation. Les premières tendent à se produire lorsque les usagers ne perçoivent pas bien certains aspects du système routier et n’ont pas assez de temps pour réagir aux situations changeantes, ou bien sont confrontés à des situations inattendues. Ces questions et les moyens d’y remédier sont examinés au paragraphe 8.2.
La désobéissance aux règles de la circulation se produit souvent lorsque le système routier ne répond pas de manière adéquate aux besoins des usagers (par exemple, longues attentes pour traverser les carrefours piétons signalisés). Cependant, elle peut aussi se produire lorsque les usagers ne comprennent pas ce qu’ils sont supposés faire ou les avantages de respecter ces règles. Ceci est particulièrement vrai dans les PRFIs, du fait de leur rapide motorisation et modernisation de leurs réseaux routiers. Elle peut aussi exister parce que certains usagers croient qu’ils peuvent en tirer profit (par exemple un trajet plus rapide, ou une place de stationnement ou de livraison plus commode) sans encourir de sanctions. Ces questions et certaines des implications qu’elles peuvent avoir pour la fourniture d’infrastructure sont examinées au paragraphe 8.3.
Comme souligné au Chapitre 1, les piétons, les cyclistes et les motocyclistes représentent plus de la moitié des décès sur les routes du monde, et dans certaines régions, beaucoup plus que la moitié. Au mieux, ces usagers vulnérables de la route peuvent s’attendre à une protection limitée vis-à-vis des forces à l’impact lors d’une collision éventuelle (par exemple le casque, une certaine protection grâce au carter du moteur ou à l’écran à l’avant des cyclomoteurs, ou à des conceptions « qui pardonnent » de l’avant des voitures et des vans pour réduire l’impact avec les piétons). Réduire les décès et les blessures graves et fournir des conditions sûres de déplacement à cette catégorie d’usager est l’un des défis majeurs pour le secteur routier.
Les facteurs humains jouent un rôle capital dans les principes du Système Sûr, qui prévoit qu‘aucun usager ne soit tué ou gravement blessé sur la route. Dans un système idéal, les collisions ne sont pas possibles. Un tel niveau de perfection est peu probable tant que les êtres humains contrôleront les véhicules, mais plus l’on s’approchera de routes sans collisions possibles, plus sûr sera le système. Cependant, les véhicules à moteur resteront contrôlés par des humains pour les temps à venir.
Des efforts devraient donc être faits pour aider les usagers à percevoir correctement la route et à prendre des décisions de conduite ou de déplacement à pied qui soient sûres pour eux-mêmes et les autres usagers. Appliquer les principes de facteurs humains décrits dans le reste de ce Chapitre devrait aider à parvenir à un réseau libre de collisions, mais il faut reconnaître que des directives améliorées ne suffiront pas à éviter les collisions. Ceci étant, la correction des erreurs devrait pouvoir se faire autant que possible, par exemple au moyen de largeurs de voies permettant un espace de manœuvre, d’accotements asphaltés, ou de lignes d’arrêt placées quelques mètres en amont des passages piétons. Un espace adéquat de récupération réduira le nombre et la gravité des impacts, mais ne suffira toujours à les prévenir. Le Système Sûr exige donc une infrastructure et des véhicules qui pardonnent, de telle manière que, si des collisions se produisent, elles n’aient pas pour conséquence le décès ou des blessures aux séquelles permanentes.
Le rapport Directives sur les Facteurs humains dans les Systèmes routiers (HFGRS, Human Factors Guidelines for Road Systems, Campbell et al, 2012) du NCHRP est une source exhaustive d’information sur les facteurs humains et sur la conception et la gestion de systèmes routiers, conçu pour compléter les références et normes primaires de conception, de telle sorte que les concepteurs sans connaissances particulières sur les facteurs humains soient mieux informés pour prendre en compte les capabilités et les limitations de l’usager de la route dans l’application de ces normes.
L’Association mondiale de la Route (AIPCR) a publié un document (Principes de Facteurs humains de Perception spatiale pour une Infrastructure routière plus sûre (Human Factors Principles of Spatial Perception for Safer Road Infrastructure, HFPSP, AIPCR, sous presse), qui est bien en phase avec les principes du Système Sûr et défend une approche proactive de la gestion de la sécurité, dans le but de concevoir des routes où les accidents sont peu probables. Le guide HFPSP fournit une méthode puissante et pratique pour appliquer les principes de facteurs humains à une vaste gamme de situations que les conducteurs rencontreront probablement, et qui se fonde sur trois exigences principales.
Damage and Prevention Oriented Accident Approaches
Il faut environ six secondes à un conducteur pour s’adapter à un changement de situation sur la route et pour reprogrammer son action de conduite. Le graphique 8.1 montre les étapes et le temps approximatif nécessaire pour chaque action, certaines pouvant se chevaucher en partie. Premièrement, le conducteur doit noter que quelque chose requiert son attention et identifier la situation. Deuxièmement, il doit décider et concevoir l’action de conduite nécessaire et tester mentalement qu’elle est appropriée. Troisièmement, c’est le temps pour l’action corrective proprement dite et pour que les systèmes du véhicule aient un effet. Dans les deux premières étapes, il est supposé que les conducteurs continueront à se déplacer avec leur vitesse initiale, dans la troisième étape, le temps et la distance nécessaire pour s’arrêter varieront considérablement et dépendront de la vitesse initiale. Les directives de l’AIPCR fournissent un tableau associant le temps et la distance à la vitesse pratiquée. À 100 km/h, la distance couverte durant le freinage avant l’arrêt complet du véhicule est de jusqu’à 300 mètres (et peut-être même davantage si le freinage est plus long pour cause de route mouillée ou autre).
Dans la pratique, les manières habituelles d’éviter ces situations sont de:
Graphique 8.1 : L’exigence de six-secondes Source: AIPCR. À noter que les temps pour les choix de conduite sur la gauche du diagramme sont approximatifs et peuvent se chevaucher.
Le déplacement dans l’environnement a pour conséquence un changement constant du champ visuel. La perception de l’espace et de la distance est complexe et dépend de plusieurs indices différents, tels que le mouvement relatif ou les différents objets dans le champ visuel et la taille apparente des objets familiers (personnes, véhicules, etc.), mais les êtres humains ne se rendent pas compte consciemment de ces indices. La complexité du champ visuel et la vitesse à laquelle il change peut donner lieu à des erreurs de perception de l’espace qui peuvent conduire à des choix de conduite à haut risque, telle que s’approcher à trop grande vitesse ou prendre la mauvaise voie dans un virage. Les facteurs qui distraient d’un champ de vision sûr comprennent :
Ces facteurs peuvent être abordés en :
Il est essentiel que la route corresponde aux attentes des usagers. Autrement, il est probable qu’ils commettent des erreurs causant des accidents. À mesure qu’ils conduisent le long d’une route, les conducteurs s’habituent à ses caractéristiques, telles que la largeur et les rayons de virage, ainsi que le mode de signalisation et de marquage présents. Si l’une de ces caractéristiques change, un changement dans le comportement de conduite suit (par exemple, changement de vitesse, position latérale ou préparation à répondre aux situations d’urgence). Si le conducteur ne répond pas au changement dans l’environnement routier, une situation dangereuse peut être créée. Le guide HFPSP de l’AIPCR donne des exemples d’environnements routiers ne répondant pas aux attentes des conducteurs, parmi lesquels :
La figure 8.2 donne un exemple de conflit entre la direction de la route et le paysage, pouvant potentiellement donner l’impression au conducteur que la route va tout droit au lieu de tourner vers la droite (image de gauche). Des améliorations peuvent être effectuées en fournissant des directives plus claires au long des changements dans l’environnement routier (image de droite du graphique).
Graphique 8.2 : Direction de la voie : indices visuels trompeurs (à gauche) et indices visuels corrects (à droite)) Source: Birth, Pflaumbaum & Sieber, 2006, citée dans AIPCR (2012b)
En plus des points soulevés dans le guide HFPSP de l’AIPCR, il convient de réaliser que les piétons et autres usagers vulnérables de la route ont aussi des attentes en ce qui concerne l’utilisation des routes. Il est donc important que les concepteurs et les gestionnaires comprennent ces attentes et les besoins de mobilité, d’accès et d’interaction sociale qui les sous-tendent, et y répondent par l’installation adéquate d’allées piétonnières, de zones commerciales et de voies cyclables ou réservées aux motocyclettes. Les PRFIs ne devraient pas supposer que le public comprendra automatiquement quelles sont les activités appropriées pour ces différentes installations, et il peut être nécessaire de prévoir une période de mobilisation de la population avant et après l’introduction de nouveaux équipements afin d’assurer une utilisation appropriée.
8.2 Concevoir un système sûr
Le Paragraphe 4.7.2 traite de la relation entre la vitesse de déplacement et la capacité de survivre aux accidents. Le Système Sûr est fondé sur ce concept fondamental, et plus particulièrement sur celui des vitesses auxquelles les usagers de la route ont peu de chance de survivre à une collision. La vitesse à laquelle il est possible de survivre varie selon le type de collision (voir le Chapitre 4). Certains aspects clés de la conception d’un Système Sûr proviennent directement de cette relation.
Comme déjà signalé au Chapitre 8.1, les usagers se déplaçant sur des routes conçues en tenant compte des caractéristiques et limites humaines éviteront beaucoup d’erreurs qui causent les collisions, mais pas toutes. Quitter la route et entrer en collision avec une barrière ou un poteau électrique ne devrait pas avoir pour conséquence le décès ou des blessures graves, tant que la vitesse du véhicule au moment du choc est raisonnablement proche de la vitesse pour laquelle la route a été conçue. Ceci ne vaudra pas si la vitesse est très supérieure. La gestion de la vitesse est donc d’importance capitale pour parvenir à un Système Sûr. Puisque la vitesse du véhicule se trouve habituellement sous le contrôle direct et immédiat du conducteur, il est essentiel que les usagers disposent de signaux clairs sur le type d’environnement routier dans lequel ils se déplacent, renforcés par des informations spécifiques aux points appropriés.
Ces exigences sont largement couvertes par le concept de routes « lisibles », examiné au Paragraphe 8.2.4.
Des messages exprimant les exigences réglementaires, les avertissements de dangers, les indications de direction et autres informations utiles peuvent être transmis aux conducteurs et autres usagers de la route de plusieurs manières, parmi lesquelles :
Le guide HFPSP de l’AIPCR cité au Paragraphe 8.1 présente des solutions pour améliorer le marquage ou la signalisation par panneaux en tant que possibles traitements pour les trois catégories d’exigences principales énoncées ci-dessus, habituellement comme mesure corrective pour résoudre un problème de façon satisfaisante ou en tant qu’avertissement pour indiquer une situation potentiellement dangereuse. Il est essentiel que les facteurs humains soient pris en compte dans la conception et la mise en œuvre de ces traitements. Les principaux facteurs à considérer sont :
Il est à noter que le Système Sûr ne se créé pas de la seule communication avec les usagers de la route. Cependant, des indications claires sur les actions attendues des conducteurs, en particulier les limites de vitesse et des avertissements clairs sur les dangers possibles, peuvent grandement contribuer à réduire le nombre d’accidents et à réduire la gravité de ceux qui se produisent. De ce fait, les facteurs humains sont un élément important pour parvenir à l’établissement du Système Sûr, et contribuent aussi à réduire les accidents sur les systèmes routiers qui ne satisfont pas aux exigences du Système Sûr.
La division physique de la route est nécessaire là où les vitesses permises excèdent le seuil de survie possible pour une catégorie particulière d’usagers. Au-delà de 30 km/h, il est essentiel de séparer les piétons du trafic motorisé. Ceci peut se faire au moyen d’une allée piétonnière surélevée le long de la route et de passages piétons à intervalles adéquats, qui peuvent ne pas requérir de signalisation si les vitesses ou les volumes de circulation sont faibles. Dans le cas contraire, ils devraient obligatoirement être signalisés pour assurer aux piétons une opportunité suffisante de traverser la route et, dans les situations à grande vitesse, pour réduire les risques de collision aux graves conséquences.
Les principes du Système Sûr exigent que les routes soient conçues pour éliminer les possibilités d’usagers tués ou blessés. À la vitesse de 50 km/h et au-delà, les impacts latéraux ne permettent généralement pas la survie, et le respect des principes du Système Sûr exige donc qu’à ces vitesses, les mouvements de traversée de la circulation soient contrôlés (par exemple par des carrefours giratoires). S’il n’est pas possible ou pratique de satisfaire à ces exigences, des solutions sont à considérer pour éliminer au maximum les risques d’impacts latéraux dans les environnements permettant des vitesses de 50 km/h et plus.
Les collisions frontales permettent généralement la survie jusqu’à des vitesses de 70 km/h, et les exigences du Système Sûr requièrent donc qu’au-delà de ces vitesses, des mesures soient prises pour diviser ou séparer les flux opposés de circulation, comme par exemple des barrières médianes.
Pour les routes à grande vitesse, la séparation complète est nécessaire, au moyen de barrières médianes, de carrefours dénivelés, de l’exclusion du trafic lent, des clôtures et des barrières pour exclure les piétons. La vitesse maximum permise sur ces routes conçues selon les normes les plus élevées varie d’un pays à l’autre, généralement de 100 à 130 km/h.
Il est bien connu que les différences des normes applicables à différents types de routes ont pour résultat des niveaux différents de victimes, bien que des données sur ce point restent peu disponibles. Le Graphique 8.3 se fonde sur une analyse exhaustive des accidents mortels et graves et des données de circulation au Royaume-Uni (Lynam & Lawson, 2005).
Graphique 8.3 : Accidents mortels et graves par milliards (109) de kilomètres-véhicule parcourus sur différentes catégories de routes Source: Lynam et Lawson (2005). Note: les usagers vulnérables (VRUs) sont exclus des autres catégories.
Ce Graphique suggère que :
Plus la catégorie de la route s’approche des principes du Système Sûr, et moindres sont les occasions d’erreurs de la part des conducteurs, d’où un taux d’accidents plus faible. Lorsque les voies de circulation sont séparées, comme dans le cas des autoroutes et des voies rapides, les collisions frontales sont pratiquement éliminées ; elles sont le second type le plus fréquent d’accidents sur les chaussées uniques. Les accidents impliquant des usagers vulnérables sont également très rares sur les autoroutes, lesquelles excluent les piétons et les cyclistes. Les accidents aux intersections sont la catégorie la plus fréquente d’accidents sur les routes à chaussées uniques ou séparées, et la deuxième plus fréquente sur les autoroutes, en dépit du fait que la conception de celles-ci assure que les mouvements de circulation à l’entrée et à la sortie de l’autoroute soient contrôlés par des panneaux de signalisation et des rampes délimitées. Les interférences de circulation entre voies en conflit est une situation très exigeante, dans laquelle les nombreuses possibilités d’erreurs du conducteur sont la cause d’un taux relativement élevé d’accidents. Les autoroutes et les voies rapides ne fournissent pas de protection spécifique contre les collisions arrières, sauf peut-être des voies additionnelles pour manœuvrer.
Les trois paragraphes suivants donnent des exemples dans lesquels la séparation a eu pour résultat la réduction de certains types d’accidents sur lesquels repose la philosophie du Système Sûr.
Entre 2002 et 2008, quelque 1 800 km de routes « libres de collision » ont été ouvertes à la circulation sur le réseau routier suédois, grâce à l’usage de barrières à câble métallique séparant les flux de circulation (Carlsson, 2009). Presque tous les tronçons de route avaient la même configuration 2 + 1, c’est-à-dire deux voies en direction A et une voie en direction B, alternant avec une voie en direction A et deux voies en direction B. Ces routes ne sont pas totalement libres de collisions, parce que celles-ci restent possibles et parfois se produisent avec des véhicules accédant à la route, des véhicules situés devant, ou des objets sur les accotements (y compris les barrières à câble métallique). Néanmoins, les résultats sont impressionnants. Les blessures graves et mortelles ont fait l’objet de suivi sur environ 1 300 km du réseau, ce qui a montré une réduction de presque 57%. Les blessures graves et mortelles impliquant des motocyclistes ont baissé de 40 à 50%, et celles impliquant des usagers vulnérables (piétons, cyclistes et cyclomoteurs) ont baissé de 90%. Le taux de décès sur les routes 2 + 1 était équivalent à celui des routes construites selon les normes autoroutières. L’étude de cas du Chapitre 11.2 fournit plus de détail sur cette approche.
Jusqu’à maintenant, les preuves de l’efficacité des barrières flexibles ne se fondent que sur l’expérience dans les PREs, mais il est logique de supposer, si elles sont correctement installées, que ces barrières sont tout aussi efficaces pour réduire les accidents véhicule contre véhicule et les sorties de route dans les PRFIS, et qu’elles auraient un rôle à jouer pour décourager les piétons d’accéder à la chaussée et aussi pour les protéger en bord de chaussée.
Bien que les déplacements sur les routes divisées soient plus sûrs, diviser une route peut aussi diviser les communautés qu’elle traverse. Une circulation dense et des vitesses élevées, combinées avec une barrière médiane, rendent plus difficile pour les usagers non motorisés la traversée de la route. Si une nouvelle route traverse un village, ou si une route existante à travers un village est divisée, les connections commerciales et sociales entre les communautés des deux côtés de la route seront fortement réduites, et à moins que des dispositions satisfaisantes ne soient prises pour les protéger, les individus qui continueront de traverser la route courront de grands risques dus à la circulation à vitesse élevée dans un environnement où les conducteurs ne s’attendent pas à la présence de piétons.
Il est préférable d’éviter cette situation autant que possible en concevant des routes contournant les zones urbanisées au lieu de les traverser. Cependant, si cela n’est pas possible, des passerelles surélevées ou d’autres formes de saut-de-mouton devraient être installées pour permettre aux piétons de traverser. D’autres traitements d’appui tels que clôtures ou rampes peuvent être utilisés pour encourager les piétons à utiliser les passerelles.
Selon l’Administration fédérale des Routes des États-Unis (FHWA, 2010), l’aménagement d’allées piétonnières le long des deux côtés de la route réduit le nombre des accidents « en marchant le long de la route » de 88%. De même, l’aménagement d’accotements asphaltés ou dallés de plus de 1,2m de large réduit ce type d’accidents de 71%. Il est à noter que si les allées piétonnières réduisent efficacement les accidents piétonniers, ce type d’accidents est relativement inhabituel dans les PRE, où ils impliquent la traversée de la route plutôt que de la longer à pied. L’aménagement d’allées piétonnières surélevées ou autrement séparées permet d’atteindre un résultat du Système Sûr, ce qui est particulièrement important dans les PRFIs où les conducteurs de voitures et de motocyclettes utilisent fréquemment l’accotement comme une voie supplémentaire de circulation.
L’expérience de la Malaisie, résumée dans APEC (2011), a montré que des voies réservées aux motocyclettes pour les séparer des autres véhicules sont un moyen très efficace de réduction des accidents de motocyclettes. Une étude de Radin Umar et al, 1995, a conclu que l’installation d’une voie réservée aux motocyclettes le long d’un tronçon de route principale réduisait les accidents de 34%. Une plus ample évaluation postérieure sur la même route a noté une réduction de 39% de ces accidents (Radin Umar et al, 2000). Cette étude a conclu que les voies réservées aux motocyclettes sont un grand bénéfice là où les volumes de circulation sont supérieurs à 15 000 véhicules par jour et où les motocyclettes représentent de 20 à 30% de ce volume de circulation.
Les premières conceptions de voies réservées aux motocyclettes en Malaisie étaient basées sur celle des pistes cyclables (Tung et al, 2008), et comportaient des glissières de sécurité conçues pour protéger les cyclistes allant à basse vitesse des véhicules motorisés qui avaient quitté la chaussée. Cependant, ces glissières de sécurité conçues pour protéger les cyclistes des véhicules motorisés en sortie de route étaient associées à près de 25% des accidents mortels survenus à des motocyclistes entrant en collision avec des objets sur les accotements, et augmentaient donc le risque de blessures graves pour cette catégorie d’usagers. Ceci suggère que la mise en place de glissières de sécurité pour les voies réservées aux motocyclistes doit être considérée avec soin.
Il a aussi été conclu que les normes de largeur des pistes cyclables étaient inadéquates pour les voies réservées aux motocyclistes. Hussain et al ont observé en 2005 les distances de séparation préférées par les motocyclistes et ont conclu que la largeur nécessaire pour une motocyclette était d’environ 1,3 m, et que le dépassement d’une moto par une autre était peu probable si la largeur de la voie était inférieure à 1,7 m.
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Dans les dernières années, gérer la vitesse en agissant sur l’infrastructure de la route a évolué considérablement, mais n’a pas encore été appliqué de manière généralisée sur le réseau routier. Pour quelque temps encore, le contrôle policier des limites de vitesse restera donc essentiel pour restreindre les déplacements à des vitesses dangereuses.
Pour restreindre les vitesses au niveau maximum désiré, les ingénieurs routiers disposent actuellement des techniques suivantes.
« Modération de la circulation » est le terme général utilisé pour les techniques d’ingénierie encourageant des vitesses plus faibles, et inclut désormais une variété de traitements bien documentés. Le site Internet de l’Institut des Ingénieurs en Transport (Institute of Transportation Engineers, ITE, 2013) offre un panorama complet des mesures de modération de la circulation. Des fiches de renseignements sont disponibles pour certains des types de dispositifs les plus utilisés, à savoir :
Le site Internet fournit aussi des liens vers des domaines concernant d’autres types de traitement, tels que avancées de trottoir, îlots de refuge, passages piétons surélevés, et bandes rugueuses, et des liens vers des sujets tels que la réduction de la vitesse, de la fréquence des accidents, et des mouvements coupant à travers la circulation.
Dans le meilleur des cas, la modération de la circulation est habilement intégrée dans l’aménagement urbain à travers la conception des rues, la gestion du stationnement, l’aménagement paysager et la plantation de végétaux, pour créer un environnement qui est à l’évidence un environnement de faible vitesse, adapté pour les piétons et les cyclistes et où le comportement approprié est évident pour tous les usagers, y compris le choix d’une vitesse appropriée par les conducteurs.
Les principes de modération de la circulation ont été largement appliqués dans l’établissement de zones à faible vitesse dans les quartiers résidentiels. Ce concept est né aux Pays-Bas comme « woonerf » ou « zone conviviale », et a depuis été adopté par plusieurs pays sous des formes variées. Les principaux facteurs de succès sont un réseau de voiries avec de faibles volumes de circulation, un ensemble qui ne puisse pas être traversé rapidement, et un changement dans l’aspect des rues.
Au Royaume-Uni, les premières zones à vitesse limitée à 20 miles à l’heure ont produit des changements substantiels dans les vitesses et les accidents. Une revue a conclu que la réduction moyenne de la vitesse a été approximativement de 14 km/h, et celle du nombre des accidents de 60%. Le nombre d’accidents impliquant des enfants a baissé de 70%, et les accidents impliquant des cyclistes ont baissé de 29% (Webster & Mackie, 1995). Le flux de circulation dans ces zones a baissé en moyenne de 27%, et augmenté de 12% sur le réseau alentour, ce qui n’a cependant pas entraîné une augmentation des accidents sur ces routes aux alentours.
Un exemple extrême de modération de la circulation est l’approche d’espace partagé, connue dans certaine presse comme l’approche des « rues nues », dont Hans Modermann a été le pionnier aux Pays-Bas. Dans des rues et autres espaces publics où les piétons ont la priorité, retirer tous (ou presque tous) les panneaux de signalisation et le marquage supprime les indices visuels qu’il s’agit d’un environnement pour véhicules motorisés et que les conducteurs devraient se comporter en conséquence. Au contraire, il est rendu très clair que cette zone est principalement piétonnière, et que les conducteurs sont supposés prévoir les mouvements de leur véhicule de manière à ne pas gêner les piétons, et qu’un degré de communication est nécessaire entre les usagers pour décider si la priorité est donnée aux véhicules ou aux piétons. Cependant, un examen exhaustif des données disponibles n’a pas permis de conclure si l’espace partagé a oui ou non amené une réduction des accidents (Edquist & Corben, 2012). Si certains des sites étudiés ont effectivement connu une réduction des taux d’accidents, d’autres au contraire ont souffert d’une augmentation, y compris des sites où antérieurement il n’y avait jamais eu d’accident. La pauvre conception des études examinées et le fait de ne pas prendre en compte la possible augmentation de l’activité piétonne ont aussi rendu difficile de parvenir à une conclusion.
Les enthousiastes du concept d’espace partagé ou « rues nues » précisent que celui-ci ne convient qu’aux environnements où il est approprié de donner la priorité aux piétons, tels que les zones résidentielles, les espaces publics ouverts, et les routes accueillant un grand nombre de piétons (par exemple, centres commerciaux ou culturels). Le fonctionnement de l’économie et de la société exige que la priorité soit donnée à la circulation automobile sur la plupart des autres routes, et par conséquent, une gamme complète de signaux, panneaux, marquage et autres dispositifs sont nécessaires pour communiquer les comportements attendus des conducteurs.
Des combinaisons de traitement telles que le marquage sur la chaussée, le rétrécissement de la route et des panneaux de signalisation ont été utilisées avec succès pour réduire les vitesses à la traversée des villages. Un rapport du ministère des Transports du Royaume-Uni fournit un résumé complet de la recherche sur la modération de la circulation, y compris les traitements aux entrées de secteur ou d’agglomération (Graphique 4). Il conclut que les traitements à bas coût réduisaient les vitesses de moins de 5 km/h, les traitements plus substantiels jusqu’à 11 km/h, et que les traitements les plus importants, tels que le rétrécissement de la chaussée, amenaient une réduction jusqu’à 16 km/h (DETR, 2007).
En Nouvelle-Zélande, Makwasha et Turner (2013) ont constaté des réductions de vitesse étaient associées avec les traitements des entrées. Conformément aux recherches antérieures, ils ont constaté que la réduction de vitesse était plus importante aux points de passage avec une chaussée rétrécie, qu’aux entrées marquées seulement par de la signalisation. Une réduction de 41% des décès et blessés graves a été constatée aux passages rétrécis, contre une légère augmentation aux passages seulement marqués par de la signalisation. Ceci concorde avec les travaux antérieurs de Tayler et Wheeler (2000) au Royaume-Uni, qui ont montré une réduction de 43% des accidents mortels et graves pour les seuls traitements aux entrées de secteur ou d’agglomération, et une réduction de 70% de ces accidents si le traitement était accompagné de traitements de modération de la circulation en aval (Graphique 8.4).
Le guide HFPSP de l’AIPCR présente un exemple détaillé de traitement d’un passage.
Graphique 8.4 : Traitement avec panneau d’entrée d’agglomération, îlot médian et radar pédagogique (afficheur de vitesse). Source: Dr. Peter Cairney.
Les traitements sont aussi utilisés à l’entrée des zones à vitesse limitée en agglomération. Cependant, les vitesses étant de toute manière généralement limitées à ces endroits, il peut être difficile d’évaluer l’efficacité des traitements (DETR, 2007).
Comme déjà mentionné plus haut, les ingénieurs routiers disposent d’une large gamme de techniques et de dispositifs efficaces pour communiquer avec l’usager de la route. Le respect du code de la route s’améliorera probablement de manière considérable si ces techniques sont utilisées conjointement avec la conception de base de la route pour créer un environnement routier fournissant des messages cohérents aux usagers sur le type de route qu’ils sont en train d’emprunter, la fonction de celle-ci, et, par inférence, le type de comportement de conduite et de choix de vitesse approprié. Ce concept est généralement connu comme « la hiérarchisation des routes ».
Les routes lisibles poussent ce concept encore plus loin en aménageant le système routier et ses abords immédiats de telle sorte que les choix de conduite désirés soient évidents pour les conducteurs.
Le site Internet de la Commission européenne (EC, sans date) décrit ainsi les routes lisibles:
« L’objectif est que différentes classes de routes soient distinctes, et que dans chaque classe, les caractéristiques telles que la largeur de la chaussée, le marquage au sol, la signalisation et l’utilisation de l’éclairage public soient cohérents sur toute la route. Les conducteurs devraient percevoir le type de route et « instinctivement » savoir comment se comporter. L’environnement fournit efficacement une « étiquette » du type particulier de route et réduit ainsi le besoin de dispositifs de contrôle de la circulation tels que des panneaux de signalisation additionnels pour réguler le comportement routier ».
Les routes ont des fonctions différentes qui nécessitent des vitesses de circulation différentes et des comportements différents, par exemple l’état d’alerte pour réagir à la présence de cyclistes et de piétons (y compris les jeunes enfants). Si ces fonctions peuvent être rendues explicites par la conception et les caractéristiques de la route, il devrait être beaucoup plus facile d’encourager les conducteurs à se comporter de manière appropriée. Une route vraiment lisible rendrait évidents d’autres aspects du comportement du conducteur, comme par exemple quel flux de circulation devrait céder la priorité à un autre, lorsque le conducteur s’approche d’un croisement ou d’une courbe, où il est probable que des piétons traversent la route, et où le conducteur devrait positionner son véhicule pour traverser un flux de circulation. Une route lisible nécessiterait peu de panneaux ou de marquage parce que les choix de conduite désirés seraient inspirés intuitivement par son aspect.
Aux Pays-Bas, où le concept est né, quatre catégories de routes ont été jugées suffisantes pour servir tous les besoins (Theeuwes & Godthelp, 1995) à savoir : autoroutes, grandes routes interurbaines, routes rurales pour relier les zones résidentielles aux secteurs commerciaux et de services, et woonerfs (ou zones résidentielles soumises à modération de la circulation). D’autres pays peuvent considérer qu’ils ont besoin de plus de catégories pour couvrir l’ensemble de leurs types de routes (par exemple, routes rurales d’accès, routes collectrices urbaines). Le point important ici est que les routes peuvent être conçues pour créer différentes attentes de comportement des conducteurs.
Une récente application des principes de routes lisibles dans une banlieue d’Auckland en Nouvelle-Zélande, montre comment une conception appropriée (dans ce cas, le réaménagement d’une zone grâce à la plantation de végétation et d’autres mesures peu coûteuses) peut influencer le comportement. Après la mise en œuvre, les vitesses moyennes ont diminué dans les rues locales mais n’ont pas changé sur les routes collectrices et dans les deux cas, la variabilité des vitesses a diminué (Charlton et al, 2010). Sur les routes locales, le nombre de véhicules a diminué, le maintien de la trajectoire du véhicule est devenu moins constant, et la signalisation moins fréquente. De plus, le nombre de piétons a augmenté, et les piétons étaient moins limités dans leurs déplacements. Cependant, ces changements n’étaient pas évidents sur les routes collectrices (Mackie et al, 2013). Les auteurs ont interprété ces changements comme indiquant qu’un environnement moins formel et plus calme avait été créé dans les rues locales, ce qui était l’objectif du projet. Ces changements de comportement ont été accompagnés par une baisse de 30% des accidents et une réduction de 86% du coût des accidents.
Les implications des routes lisibles sont particulièrement pertinentes pour les PRFI. Les preuves accumulées montrent que les conducteurs perçoivent des messages puissants sur la façon appropriée de conduire à partir des indices visuels de l’environnement. Les projets de développements de nature commerciale ou sociale ayant un impact sur l’infrastructure routière doivent être examinés soigneusement. Si la fonction commerciale ou sociale est retenue, il faut veiller à séparer la circulation de transit de la zone d’activités mixtes, et qu’un environnement à grande vitesse n’y est pas imposé. S’il n’est pas possible de conserver les fonctions commerciales ou sociales, il faut trouver un site alternatif adapté à ces activités, et la nouvelle infrastructure routière qui remplace l’ancienne zone d’activité mixte devrait être clairement identifiable comme étant principalement destinée à la circulation.
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Il existe une distinction claire entre la fatigue qui provient du temps passé à exécuter une tâche, et la somnolence qui varie selon le moment de la journée et la quantité de sommeil qu’une personne a eu. Les deux termes sont souvent utilisés de manière interchangeable parce que les deux phénomènes se produisent souvent ensemble et ont le même effet affaiblissant sur la conduite. Un récent examen par le ministère pour l’Environnement, des Transports et les Régions du Royaume-Uni (Jackson et al, 2011) a conclu que la fatigue affecte la capacité de conduite de trois manières, en augmentant :
Les manières les plus efficaces de gérer la fatigue des conducteurs professionnels semblent être les programmes de gestion de la fatigue sur le lieu de travail, soutenus par des programmes pour assurer que les conducteurs se présentent au travail suffisamment reposés, en abordant des questions de style de vie. Cependant, il semble que l’infrastructure joue aussi un rôle pour contrer les effets de la fatigue.
Roberts et Turner (2008) ont identifié des domaines spécifiques où des contremesures relatives à l’infrastructure peuvent être efficaces, parmi lesquelles :
Les occasions de repos sont bénéfiques. Il est établi que de courtes périodes de sommeil peuvent restaurer la capacité des conducteurs fatigués. Cependant, il existe une incertitude sur la localisation des aires de repos par rapport aux tronçons à haut risque de la route, et sur le meilleur type d’installations à fournir selon les aires.
Réduire la monotonie a été jugée utile, mais il existe une incertitude quant aux types de traitement qui seraient efficaces. Il est à noter que le guide HFPSP de l’AIPCR suggère que la création de tracés sinueux et rythmés peut contrer la monotonie en changeant constamment le champ visuel et suggère qu’une végétation et des environnements bâtis monotones soient évités (AIPCR, p. 37).
Dans les zones où le risque d’accidents dus à la fatigue est élevé, la signalisation et le marquage attirant l’attention et informant sur les possibilités de repos en ville ou sur les aires dédiées sont considérées comme ayant avoir un bon effet.
Les marquages au sol audibles sont des lignes thermoplastiques surélevées produisant un son bourdonnant lorsqu’un véhicule passe dessus, alertant ainsi le conducteur que le véhicule dérive vers l’accotement (si la ligne audible est installée au bord de la route) ou vers le centre de la route et la voie opposée (si la ligne est installée au centre de la route). Ces lignes se sont révélées très efficaces pour réduire les accidents, mais généralement elles ne produisent pas un son assez fort pour être aussi efficaces pour les camions. Dans les pays où les routes rurales sont généralement asphaltées, un traitement équivalent peut être produit à moindre coût en créant des dépressions dans l’enrobé au moyen d’un rouleau spécial, ou en effectuant des rainures de fraisage en surface de la route. Ceci n’est pas possible avec les revêtements en enduit superficiel, ce qui est typique de nombreuses routes dans les PRFI et les PRE à faible densité de population. Les marquages par ligne audible peuvent aussi être appliqués aux routes en béton, en utilisant les mêmes techniques de lignes thermoplastiques ou de fraisage.
Si toutes ces mesures ne suffisent pas à prévenir les accidents liés à la fatigue, les barrières et/ou les zones de dégagement libres d’obstacles aux emplacements appropriés ont le potentiel d’éviter les accidents graves.
8.3 Susciter un comportement sûr
Pour aborder le non-respect des règles de circulation, il est important de considérer la spécificité de chaque situation. Il y a de nombreuses raisons possibles pour que les usagers ne respectent pas les règles, et plusieurs d’entre elles peuvent relever d’une situation donnée. Ces différentes raisons requièrent différentes stratégies pour encourager un meilleur respect des règles.
Il est possible que certains usagers ne comprennent pas ce qui est attendu d’eux, ou quels sont les comportements appropriés dans certaines situations. Dans certains cas, il peut même s’agir de la majorité des conducteurs, et ceci peut être particulièrement vrai pour les groupes socialement défavorisés de la population, en particulier si l’analphabétisme est un problème. Ceci sera probablement vrai aussi pour les situations nouvelles. L’étude de cas sur l’introduction des carrefours giratoires en Australie et aux États-Unis est un bon exemple.
Selon la situation, des traitements peuvent être apportés au moyen de :
Même si les usagers ont une bonne compréhension des règles de circulation et des dispositifs de contrôle de la circulation, il peut exister des situations ou des sites où les conducteurs ne sont pas sûrs des actions de conduite. Ceci se produit généralement dans des situations non familières, par exemple lorsqu’un site possède une géométrie inhabituelle, ou si les conducteurs partagent la route avec des objets peu familiers comme par exemple des véhicules hors gabarit et lents ou des groupes d’animaux conduits le long de la route. Dans l’idéal, la formation et l’expérience d’un conducteur devraient lui avoir enseigné un comportement de sécurité et d’attendre jusqu’à ce que la situation inhabituelle ou peu claire se résolve, afin de pouvoir avancer ou dépasser de manière sûre. Il est à espérer qu’avec le temps, les situations avec une géométrie inhabituelle ou trompeuse seront éliminées par le traitement progressif des sites dangereux identifiés par les registres d’accidents ou les analyses du risque. D’ici là, des mesures devraient être prises pour assurer que les directives correctes sont données à tous les usagers au moyen de signaux, d’éclairage public, de marquages linéaires et de délinéateurs. Il est important d’assurer que l’ensemble des mesures de guidage soit adéquatement compris, en particulier si des signaux peu familiers sont partie du traitement.
Il est peu probable que les règles et procédures soient respectées si elles ne sont pas crédibles pour les usagers, par exemple des piétons ne respectant pas les signaux « attendre » aux carrefours dans les moments de faible flux de circulation, ou la résistance des conducteurs à respecter les signaux de limite de vitesse en raison de travaux sur la route s’il est évident qu’aucuns travaux ne sont en cours à ce moment. Le risque réside dans le fait que les usagers continuent d’agir de la même manière lorsque les dangers sont en fait présents, que les piétons traversent subitement devant des véhicules motorisés en pleine nuit, ou que des conducteurs continuent de dépasser la limite de vitesse alors que les travaux sur la route ont repris. S’il est difficile d’appliquer des contremesures à ces situations, il est recommandé de suivre de près la gestion du chantier (par exemple en couvrant le signal de limite de vitesse à la fin de la journée de travail) afin d’aider dans la seconde situation.
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De nombreuses communautés utilisent l’espace routier à des fins autres que le transport, et souvent de manières qui sont en conflit avec la sécurité routière. Dans les PRFIs, le commerce sur les abords de route est fortement enraciné et constitue un élément de l’économie. Dans de nombreuses villes du Royaume-Uni, le théâtre de rue est une utilisation habituelle de l’espace routier. Limiter la vitesse à 20 miles à l’heure (32 km/h) dans des zones locales sélectionnées du pays, et soutenir en même temps des mesures de modération de la circulation a été très efficace dans la réduction des décès des enfants piétons. Une évaluation précoce de ces schémas a montré une réduction de 60% de tous les accidents graves, et de 67 % des accidents graves impliquant des enfants (Webster & Mackie, 1996). Des solutions créatives sont nécessaires pour traiter du commerce sur les abords de route et augmenter les flux de circulation dans les PRFIs.
En plus du système officiel de règles et réglementation, la culture de sécurité routière d’une communauté influence fortement le comportement des usagers et les résultats en matière de sécurité routière qui en découlent. Par exemple, la pression des pairs est un mécanisme important pour respecter les normes sociales ou dans certains cas pour les contourner.
Les changements physiques et psychologiques qui affectent les personnes au cours de leur vie ont une profonde influence sur leur habileté face au système routier. Si les routes sont faites pour servir toute la population, les concepteurs et les gestionnaires devraient être conscients des principaux changements dus à l’âge. Certains des principaux aspects sont que :
L’incapacité à court terme peut avoir un effet désastreux sur la conduite. Parmi ses causes les plus fréquentes se trouvent :
Certaines formes d’incapacité rendent difficile le plein respect des règles de circulation. Les principes du Système Sûr exigent des conducteurs capables et efficaces, et de nombreux pays ont des critères physiques minimum pour l’octroi du permis de conduire. La question la plus commune concerne la vision ; un examen élémentaire pour s’assurer de l’acuité visuelle à une distance spécifique fait habituellement partie de la procédure d’examen pour le permis de conduire. Il n’existe que peu de restrictions physiques empêchant totalement les personnes de conduire, et beaucoup d’entre elles y compris celles avec de forts handicaps peuvent conduire de manière satisfaisante avec l’assistance d’aides à la conduite leur permettant de surmonter leurs limitations physiques. Mais de telles procédures d’examen n’existent pas pour les piétons ou les cyclistes. De nombreux pays développés possèdent une législation anti-discrimination qui exige que les fournisseurs de transport fassent en sorte que les invalidités n’empêchent pas l’accès à leurs services. Certains traitements mis en place sur le réseau routier pour satisfaire à ces exigences sont :
Parvenir à un meilleur respect des règles de circulation et des procédures établies pour la conduite peut être résumé par les quatre rubriques ci-dessous. Chaque partie est conclue par une brève description quant à la manière dont l’infrastructure peut être utilisée ou adaptée dans ce but.
L’éducation en sécurité routière est généralement considérée comme liée à des programmes dans les écoles.
Le projet ROSE25 (Road Safety Education dans les 25 États-membres de l’UE) de la Communauté européenne (CE) a inclus des ateliers et des consultations dans tous les membres de l’Union, qui ont débouché sur la production d’un petit livre qui résume les éléments essentiels des bonnes pratiques en matière d’éducation en sécurité routière. Il met l’action sur les interactions en face-à-face avec les écoliers. L’accent sur l’éducation en sécurité routière devrait porter sur les points suivants :
Bien que la formation et l’éducation doivent préparer les conducteurs à « attendre l’inattendu », il y a une limite à ce que l’éducation peut faire, et il est clairement impossible d’entraîner les conducteurs à réagir à toutes les situations inattendues. La meilleure solution est donc de minimiser le nombre des situations hors-normes à travers l’amélioration progressive du réseau et l’application des principes de routes lisibles dans la plus grande mesure du possible, afin d’assurer que les trois règles des directives de l’AIPCR sur les facteurs humains sont respectées dans toutes les situations.
La formation des automobilistes et des motocyclistes se réfère spécifiquement au processus de préparation des personnes à leur « rôle » de conducteurs de véhicules ou de motocyclettes. Ceci implique non seulement de maîtriser les compétences de base en matière de contrôle d’un véhicule et une connaissance pratique des règles et procédures de la circulation, mais aussi de posséder la capacité primordiale de « lire la route » et d’anticiper les actions des autres conducteurs. Le Paragraphe 8.3.1 cite des travaux qui ont démontré que plus un conducteur a été formé au moyen d’une pratique supervisée, plus sûr sera son comportement lorsqu’il commencera à conduire seul. De nombreux pays ont introduit ou sont sur le point d’introduire des mesures pour allonger la pratique de conduite supervisée avant de pouvoir passer un examen pratique de conduite.
Un examen des mesures de sécurité routière dans les pays de l’Union européenne a recommandé de renforcer la formation formelle des conducteurs en encourageant la conduite accompagnée, et en rendant le conseil et l’information disponibles aux conducteurs accompagnants pour aider à maximiser leur efficacité (SUPREME, 2007). Les bonnes pratiques en matière d’examens de conduite consistent en tests sur des routes choisies, et incluent toutes ou la plupart des situations critiques que l’autorité qui octroie les permis estime nécessaires pour démontrer la compétence du candidat conducteur, et qui sont évaluées comme étant à peu près égales en termes de difficulté pour celui-ci. Les autorités qui octroient les permis de conduire devraient consulter les gestionnaires des routes pour identifier des routes où les examens ne causeront pas d’interférences indésirables avec la circulation normale et n’exposeront pas les candidats conducteurs ou les examinateurs à des risques évitables.
Il y a de plus en plus de preuves que le système de permis progressif incorporant une longue période de conduite supervisée est une manière efficace de former des conducteurs sûrs. Aux États-Unis, nombreuses sont les preuves qui indiquent que les schémas de permis à points, qui permettent de réduire le risque et l’exposition au risque en exigeant que les nouveaux conducteurs évitent les situations à haut risque (telles que la conduite de nuit) ainsi que des durées spécifiques avec un permis de débutant et un permis intermédiaire avec des restrictions, ont été hautement efficaces pour réduire les accidents mortels et graves parmi les jeunes conducteurs (NHTSA, 2013).
En termes de facteurs humains, la période relativement longue de pratique supervisée assure que le candidat conducteur aura acquis une pratique lui permettant de faire face à une large gamme de situations de conduite, y compris les erreurs et le non-respect intentionnel d’autres usagers. Elle offre aussi l’avantage de faire que les compétences de base sont mises en pratique au point de devenir largement automatiques, de telle sorte que le conducteur peut porter son attention à l’interprétation et la préparation de sa réaction à de nouvelles situations sans avoir à penser à des actions telles que freiner, regarder dans le rétroviseur ou donner un coup de volant.
Les autorités routières organisent des campagnes de communication pour des motifs divers. La publication de l’AIPCR (2012a) « Les meilleures pratiques pour les campagnes de sécurité routière » (Best Practices for Road Safety Campaigns) fournissent une vue générale de ce domaine, fondée sur des revues de la littérature existante dans des pays-membres de l’AIPCR ; les messages principaux sont :
Les espaces publicitaires sur les bords de la route devraient être utilisables pour transmettre des messages sur la sécurité, soit en les réservant à cette fin, soit à travers l’achat d’espaces. Lorsque cela est possible, une utilisation limitée de panneaux à message variable pour transmettre des messages de sécurité appropriés au moment et à l’endroit devait être considérée, par exemple, afficher des rappels sur l’alcool au volant tôt dans la soirée des fins de semaine, lorsque de nombreux conducteurs sont de sortie.
La publication du European Transport Safety Council « Application des règles de circulation dans l’UE : Aborder les Trois principaux Tueurs sur les Routes de l’Europe » (Traffic Law Enforcement across the EU: Tackling the Three Main Killers on Europe’s Roads (ETSC, 2011)) est une bonne source générale d’information sur le contrôle policier. Il s’agit d’un compendium de meilleures pratiques, fondé sur l’expérience acquise dans les pays membres, et qui offre un large ensemble de recommandations sur la manière d’aborder chacun des trois « tueurs » : la vitesse, la conduite en état d’ivresse, et le non-port de la ceinture de sécurité ainsi que des lignes directrices générales sur la planification, le ciblage et les principes généraux d’un contrôle policier efficace.
Dans les dernières années, de grands progrès ont été réalisés dans le contrôle-sanction policier automatisé, en particulier dans le contrôle des limites de vitesse. Une probabilité relativement de contrôle couplée à une certitude élevée de conséquences négatives, ont changé les comportements de manière importante, là où le contrôle automatique a été vigoureusement appliqué.
Si nécessaire, des espaces devraient être créés pour permettre d’effectuer les opérations policières là où elles auront probablement le plus grand effet dissuasif. Les refuges surélevés installés sur les autoroutes du Royaume-Uni pour faire respecter les limites de vitesse sont un bon exemple. L’installation de radars ou d’autres dispositifs automatiques doit être considérée avec soin afin de la coordonner avec les éléments de l’infrastructure (par exemple, des radars tronçons disposés sur les portiques existants).
Les facteurs humains ne sont pas aussi bien pris en compte qu’ils devraient l’être sur la plupart des routes du monde, y compris celles des PREs. Dans les années 60 et 70, plusieurs enquêtes approfondies sur des accidents majeurs ont été faites, qui considéraient le comportement humain comme le principal facteur contributif dans la plupart des accidents. Plus récemment, il a été compris que beaucoup de ces erreurs de conduite étaient dues autant à des déficiences du réseau routier qu’à des erreurs du conducteur. Il s’agit notamment des accidents dus à une distance inadéquate des panneaux de signalisation, à un mauvais éclairage des endroits critiques, ou à des revêtements de chaussée offrant moins d’adhérence que le conducteur ne l’attendait, situations qui sont très similaires aux questions abordées dans les trois exigences du guide HFPSP de l’AIPCR, couvertes au Chapitre 8.1.
Les PRE peuvent avoir un grand nombre de déficiences du réseau routier à rectifier pour assurer que les facteurs humains sont correctement considérés dans tout leur réseau, ce qui est aussi probable dans les PRFI. Cependant, le réseau routier ne peut être mis à niveau que si les outils fondamentaux de conception (les guides et normes de conception routière) prennent en compte ces questions. Une étude récente de l’AIPCR (2012b) suggère qu’il faudra du temps pour y parvenir.
Un groupe d’experts en facteurs humains a examiné les normes de conception de neuf PRE et les PRFI, et a comparé de façon systématique les conseils et les procédures de chaque norme avec les exigences spécifiques de facteurs humain telles que recommandées dans les trois exigences du guide HFPSP de l’AIPCR (Paragraphe 8.1.3). L’exigence n° 1 qui donne au conducteur un temps suffisant pour réagir, a été la mieux prise en compte, et les besoins des conducteurs ont été pleinement considérés dans 49% des cas. L’exigence n° 2 qui stipule que la route doit fournir un champ de vision sûr a été moins bien prise en compte, et les besoins spécifiques ne sont complètement traités que dans 9% des cas. L’exigence n° 3, qui prévoit que la route réponde aux attentes des usagers, a été pleinement prise en considération dans 34% des cas.
Il semple donc qu’il reste beaucoup à faire pour amener les normes mondiales de conception routière à un niveau où les facteurs humains sont entièrement pris en compte, et avec eux la façon de penser des concepteurs.
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Le chapitre 3 donnait des informations sur la gestion générale de la sécurité routière, et le chapitre 6 mettait en lumière la nécessité de politiques, de plans et d’objectifs efficaces de sécurité routière au niveau national et régional. Le présent chapitre montre l’importance des politiques, normes, recommandations et outils relatifs à une infrastructure routière sûre. La planification, la conception, l’exploitation et l’utilisation du réseau routier ne produiront des résultats efficaces que lorsque les interventions (y compris les programmes et projets d’infrastructure sûre) seront mises en œuvre en tant que partie intégrante d’un système de gestion efficace. Une approche fondée sur le retour d’expérience liant les fonctions de gestion institutionnelle aux interventions est nécessaire pour produire les résultats désirés. Le chapitre 3 couvre en détail ce processus de gestion de la sécurité routière.
Le présent chapitre informe sur le développement de politiques, normes et recommandations, ainsi que sur les outils pouvant aider à délivrer une infrastructure sûre. L’introduction présente les principes généraux de la gestion de la sécurité de l’infrastructure, en se fondant sur la matière présentée aux chapitres antérieurs (en particulier 3 et 6). Il établit aussi le cadre pour les chapitres suivants en exposant l’approche générale pour l’évaluation et le traitement de l’infrastructure routière pour des résultats efficaces de la sécurité. Cette approche implique l’évaluation du risque (identification des sites à haut risque et identification des problèmes contribuant aux accidents mortels et graves au chapitre 10), identification et sélection des solutions appropriées et priorisation des actions (chapitre 11), et suivi et évaluation (chapitre 12). Le graphique 9.1 illustre l’ensemble du processus.
Graphique 9.1 : le processus d’évaluation du risque de l’infrastructure
Il est généralement supposé que les erreurs des conducteurs sont dans une large proportion la cause des accidents de la route, et certaines études suggèrent que l’erreur humaine a joué un rôle dans plus de 90% des accidents (par exemple, Sabey, 1980, Treat, 1980). Bien que le rôle de l’erreur humaine dans les accidents soit substantiel, ce chiffre minimise l’importance du rôle que l’infrastructure peut jouer pour parvenir à des résultats de l’approche Système Sûr (chapitre 4).
Lorsqu’un accident se produit, l’infrastructure routière a la plus grande influence sur ses conséquences. Les améliorations à l’infrastructure peuvent contribuer de manière importante à réduire les décès et les blessures graves.
La Suède a conclu que les facteurs dus à la route étaient les plus liés aux accidents mortels. En 2008, Stigson et al ont examiné le taux d’accidents mortels en se fondant sur une recherche approfondie sur les accidents, catégorisés selon les facteurs ayant contribué aux conséquences de l’accident (et non à sa cause). L’étude a identifié de fortes interactions entre les trois composants du système (les véhicules, l’infrastructure de la route et le comportement des usagers), mais que les facteurs dus à la route étaient plus fortement associés aux conséquences des accidents mortels.
La recherche sur les avantages des traitements de sécurité de l’infrastructure fournit d’autres preuves du rôle que l’infrastructure joue dans les conséquences des accidents graves et mortels. Plusieurs études ont identifié qu’une infrastructure bien conçue (comme par exemple les ronds-points et les systèmes de barrières protectrices) peut réduire les accidents graves et mortels jusqu’à 80%. Cette réduction peut être obtenue que les accidents soient ou non le fait de l’erreur humaine (chapitre 8). Le chapitre 11 offre plus d’information sur les traitements efficaces.
Il existe un fort argument économique pour défendre la cause de l’infrastructure sûre. Des exemples dans de nombreux pays démontrent les avantages des améliorations ciblées de la sécurité routière. En 2008, l’OCDE a identifié que ces améliorations ciblées peuvent amener des bénéfices jusqu’à 60 fois leur coût (c’est-à-dire que pour chaque Euro dépensé, une économie de coût d’accident allant jusqu’à 60 Euros peut être réalisée). La CNUSR a identifié en 2010 que peu d’autres investissements en infrastructure produisent les avantages économiques des améliorations ciblées sur l’amélioration de la sécurité de l’infrastructure. Des programmes d’investissement plus substantiels peuvent aussi offrir des bénéfices substantiels de sécurité par rapport à leurs coûts. Une analyse de l’iRAP (www.irap.org) sur les améliorations de sécurité sur les 10% des routes les pires (celles avec les plus grands nombres de décès) de chaque pays a identifié des gains potentiels substantiels en comparant les coûts avec les bénéfices. La moyenne par pays était un rapport coût-bénéfice (RCB) de 8,1 (8 USD de bénéfices pour chaque USD investi). Ceci va d’un RCB de 5,1 dans les PREs à 19,1 dans les pays à revenu intermédiaire supérieur sur une période de 20 ans.
Les agences routières et les autres responsables de la sécurité routière doivent bien comprendre les principes clés de l’infrastructure. Certains de ces éléments clés pertinents pour l’élaboration de la politique, des normes, des recommandations et des outils pour l’amélioration de la sécurité de l’infrastructure comprennent :
Des recommandations sur le processus d‘évaluation du risque ont été développées dans de nombreuses industries et activités différentes, y compris en sécurité routière. Le processus (brièvement présenté par le graphique 1) commence par l’identification des sites à haut risque, suivie par l’analyse des données pour déterminer la cause du risque, l’identification à partir du retour d’expérience de solutions efficaces dans le traitement du risque, la mise en œuvre de ces solutions, et enfin le suivi et l’évaluation des résultats. Chacune de ces étapes est expliquée en détail aux chapitres 10 à 12.
En termes généraux d’évaluation du risque, le risque de décès ou de blessure grave peut être diminué grâce à la réduction de :
Avec une bonne compréhension de ces facteurs, on peut influer sur les accidents de diverses manières au moyen de changements de l’environnement routier. Par exemple, une amélioration de la sécurité peut être obtenue en :
Les traitements fondés sur l’ingénierie fonctionnent généralement en jouant sur l’un ou plusieurs de ces facteurs. Le sous-chapitre 11.3 donne des exemples de tels traitements.
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Les normes, recommandations et outils sont les mécanismes soutenant une interprétation cohérente et la mise en œuvre des politiques. Les politiques établissent le cadre pour l’activité de sécurité routière, sans elles l’obtention de sécurité routière se fait de manière réactive et manque de structure. Le chapitre 6 et le sous-chapitre 9.3.1 contiennent des recommandations sur le développement de stratégies et de politiques.
Changer la pratique établie est souvent difficile, et une gestion soigneuse de ce processus est indispensable. Une direction forte est aussi nécessaire pour faciliter le changement de politique qui doit se produire avec, en parallèle, une mise à jour des normes et des recommandations.
Une fois les politiques fixées, il est nécessaire de les lier aux normes et aux recommandations. Les normes (ainsi que les règles de circulation et réglementations) dictent les choses qui doivent être faites, et ont typiquement une base juridique. Les recommandations et les manuels montrent la direction sur comment ces choses devraient être faites. Contrairement aux normes, elles laissent un espace pour s’écarter du conseil qu’elles (ainsi que les manuels) contiennent, bien que ceci doive être justifié et évalué en termes d’impact sur les résultats de la sécurité. Les normes et les recommandations sont habituellement fondées sur de nombreuses années d’expérience et les résultats de recherche.
Il est important de noter que le respect des normes et des recommandations ne signifie pas que la sécurité sera maximisée, et il existe de nombreux exemples où de nouvelles routes ont été construites selon les normes, mais n’ont eu que de pauvres résultats en sécurité. Les normes et les recommandations sont souvent périmées, et leur contenu n’est pas fondé sur les principes du Système Sûr. D’une manière générale, elles donnent les critères minimum acceptables pour la conception des routes. S’écarter de ces critères coûte habituellement plus cher que de satisfaire les critères minimaux.
Regarder ce que font les autres pays peut être très profitable lorsque l’on établit de nouvelles normes et recommandations, et cette approche est importante pour établir des comparaisons (paragraphe 3.2.2). Cependant, il arrive souvent que les recommandations soient directement copiées d’autres pays, sans égard pour les conditions locales, et plus particulièrement en matière d’adéquation de la conception aux usagers vulnérables, aux différents types de véhicules et au respect des règles de circulation.
De plus, les recommandations comportent souvent moins d’options d’utilisation dans les environnements contraints. Il est typique de faire plusieurs compromis dans la conception de la route. Lorsqu’ils se combinent, ces aspects peuvent conduire à de faibles résultats en matière de sécurité (voir aussi le paragraphe 9.3.3 sur les critères minimum et le concept de domaine élargi de conception). Typiquement, une évaluation de l’impact probable sur la sécurité routière est requise pour assurer que les objectifs de sécurité sont atteints. Ceci est la raison pour laquelle des approches telles que les audits de sécurité routière (paragraphe 10.4.2) sont nécessaires, et lorsqu’ils sont conduits, ils ne doivent pas être une simple vérification par rapport à des normes et à recommandations.
Les connaissances sur les implications sur la sécurité des choix de conception sont en constante amélioration, et de ce fait il est nécessaire de mettre à jour périodiquement les politiques et les procédures. Ceci inclut la nécessité de moderniser aussi les normes, les recommandations et les outils.
L’Encadré 9.1 montre comment un choix de politique initialement dicté par des considérations économiques au niveau politique a débouché sur des principes de conception plus sûre pour les routes principales de la Nouvelle-Zélande.
La Nouvelle-Zélande a récemment mis en œuvre une politique visant à améliorer les normes de sécurité sur ses routes d’importance nationale (RIN). La motivation initiale de cette politique s’inscrivait dans le cadre d’un plan de relance économique, et les investissements réalisés dans le cadre de ce programme étaient axés sur une circulation plus efficace et plus sûre des marchandises et des personnes, en particulier autour des principaux centres de population. Actuellement, il y a sept RINs, chacune constituant une route clé de liaison. Dans le cadre de la stratégie nationale pour la sécurité, chacune des RINs devra obtenir la classification d’au moins quatre étoiles selon KiwiRAP (le programme national d’évaluation du risque du ministère néo-zélandais des transports, 2013).
L’examen des normes de conception a été entrepris pour s’assurer que cette classe de sécurité est atteinte. Les principaux éléments de conception à modifier pour assurer ce résultat en matière de sécurité sont l’utilisation de séparateurs médians en câbles métalliques et les barrières de sécurité en bord de route. Ces traitements ciblent les accidents par sortie de route ou choc frontal, deux des principaux et des plus graves types d’accidents sur les routes néo-zélandaises.
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Fournir une infrastructure routière sûre ne se fait pas isolément, et il est important de prendre en considération des questions plus larges de sécurité, de gestion des routes et de société lors de l’élaboration des politiques, des normes et des recommandations. De même, il est important de plaider en faveur des résultats en matière de sécurité routière lors de l’élaboration des politiques générales de transports et des secteurs associés. L’étude de cas de l’Encadré 9.2 illustre utilement le lien entre les améliorations de l’infrastructure et d’autres améliorations de la sécurité routière. Les mesures concernant l’utilisation des terres, en particulier, sont étroitement liées aux résultats en matière de sécurité routière, une question qui est souvent ignorée dans les PRFI. Ces mesures définissent le type et l’intensité du trafic généré, et la manière dont il entre et sort de la chaussée. Le sous-chapitre 7.3 examine cette question en détail.
Le problème : En dépit de sa petite taille, Belize a enregistré 70 décès sur la route en 2009, soit 21 décès pour 100.000 habitants.
La solution: Pour résoudre ce problème, deux projets ont été lancés, le premier consistait en un examen de la capacité de gestion de la sécurité (paragraphe 2.6) et cherchait à obtenir le consensus sur une stratégie multisectorielle d’investissement destinée à améliorer cette capacité. Le second concernait un programme d’évaluation des routes pour évaluer la sécurité de 370 miles (presque 600 km) dans des corridors routiers. Les deux tâches ont été terminées en 2012, et ont identifié plusieurs problèmes et contraintes clés affectant la sécurité routière dans le pays. Les résultats et les conclusions ont été présentés lors d’un atelier de travail de deux jours auprès de parties prenantes publiques et privées. À la fin de cet atelier, un accord général a été trouvé au sujet des investissements prioritaires à inclure dans un projet de sécurité routière. En accord avec les recommandations de la Banque mondiale en matière d’audit des capacités, des mesures ont été préconisées pour tester l’efficacité de l’approche, illustrer l’efficacité des investissements et susciter un soutien et une demande plus amples des parties prenantes. En conséquence, un corridor de démonstration a été choisi par les parties prenantes pour illustrer l’impact d’une amélioration de l’infrastructure, stimuler la coopération entre les parties prenantes et intégrer la police, les soins médicaux post-accident et les initiatives d’éducation.
En mai 2012, la Banque caribéenne de développement a approuvé un prêt à Belize pour un projet de sécurité routière, qui a aussi reçu un financement supplémentaire de la part du gouvernement du pays. Le projet multisectoriel consistait en un corridor de démonstration et visait à réduire les accidents graves et mortels. Le projet s’est concentré sur cinq objectifs :
Pour atteindre ces objectifs, les actions suivantes ont été entreprises :
Le projet sera géré par l’Unité de Sécurité routière. Les directeurs du projet proviennent des divers ministères, et sont responsables de le coordonner, de le gérer et de rendre compte à l’Unité de Sécurité routière sur les composants du projet qui leur sont assignés. Cette Unité est supervisée par un Comité de Pilotage opérationnel (CPO), qui est un forum de prise de décisions pour diriger les activités du projet, suivre le progrès des composants du projet, et résoudre les difficultés de mise en œuvre. Au-dessus du CPO se trouve le CNSR, qui fournit au gouvernement une orientation et des conseils de haut niveau impliquant les multiples parties prenantes.
Ce principe de la participation des parties prenantes est fondamental dans l’approche choisie par le gouvernement. Le projet a été lancé en mars 2013, avec une large participation des parties prenantes. Un examen sera effectué chaque année, fournissant l’opportunité d’une évaluation formative. Sur la base de ce qui a bien fonctionné, moins bien fonctionné, et des apports des parties prenantes, le plan de travail sera révisé pour l’année suivante, ce qui permettra le transfert de ressources et de se focaliser sur ce qui contribue réellement aux résultats généraux attendus du projet. Le même cycle sera répété chaque année.
Les résultats : ce projet est toujours en cours d’évaluation, mais les premiers résultats sont positifs. Les décès ont baissé de 26% dans le corridor de démonstration, tandis qu’une légère augmentation (3%) a été enregistrée dans des tronçons similaires du réseau.
Source: Banque caribéenne de Développement, Mavis Johnson, et iRAP.
Des liens peuvent aussi être établis avec les agendas politiques généraux comme le montre l’exemple de l’Encadré 9.3.
Le problème : Une pollution de l’air persistante en Randstadf (une agglomération dans la partie occidentale des Pays-Bas), due en particulier à des émissions de dioxyde d’azote (NO2), a amené le gouvernement néerlandais à expérimenter des limitations de vitesse sur les autoroutes dans cette partie du pays à la population dense.
La solution : En 2002, une réduction de la de vitesse, de 100 à 80 km/h, a été imposée sur un tronçon de l’autoroute A13 reliant La Haye et Rotterdam, et a été appliquée de manière stricte.
Les résultats : Ce projet pilote a enregistré une baisse de 4-5% des concentrations de NO2 dans l’air et une réduction de 10 à 14% de la contribution provenant de la circulation. La réduction des émissions de NO2 a été de 13%. La réduction de la vitesse a aussi amené une baisse de plus de 50% des accidents graves et a eu un effet positif sur le flux de circulation. L’élargissement de ces mesures de limitation de la vitesse a montré des réductions initiales prometteuses des émissions et des effets positifs sur la sécurité et le bruit de la circulation.
Source: Van Beek et al (2007), cité dans OCDE (2008).
Autre exemple, la gestion du patrimoine implique l’entretien et la modernisation des routes, ce qui a généralement un impact sur la sécurité routière. Souvent, la planification et le financement de la gestion du patrimoine et de la sécurité routière se font indépendamment et sans lien adéquat entre les deux. Pourtant, ces deux activités sont étroitement liées, chacune influençant directement l’autre. Une connaissance adéquate des implications sur la sécurité des décisions concernant le patrimoine routier est nécessaire quand on met en place des politiques et des pratiques. De même, les décisions relatives à la sécurité peuvent avoir un impact important sur la gestion du patrimoine (en particulier sur les coûts d’entretien).
Si elles sont considérées isolément, ces deux approches de la gestion des routes sont souvent considérées comme conflictuelles. On peut avoir l’impression que l’augmentation du financement en matière de sécurité routière signifie moins de financement ou une augmentation des dépenses en gestion du patrimoine routier. Il existe cependant des preuves solides que les deux peuvent agir en harmonie pour produire des avantages supérieurs à ceux obtenus par chacune des deux approches séparément.
Les exemples dans les PRFI sont rares, mais l’exemple australien de l’Encadré 9.4 illustre le niveau des avantages qui peuvent être obtenus par une approche coordonnée. Combiner les avantages pour la sécurité avec ceux d’améliorations du patrimoine routier peut souvent mener à une meilleure viabilité du projet. Cette question est examinée plus en détail au chapitre 7.
En Tasmanie, le service de gestion du patrimoine du ministère de l’Infrastructure, de l’Énergie et des Ressources a élaboré un plan durable d’entretien visant principalement à préserver le patrimoine routier, y compris l’extension de la durée de vie des routes existantes au moyen de la rénovation, du renforcement ou de la réfection du revêtement. Si la qualité d’une route existante est inférieure aux normes nationales, des améliorations du profil en travers sont généralement apportées lors de la reconstruction. Ceci inclut l’élargissement de la chaussée, de l’accotement et les types d’accotements, avec l’option de l’étanchéification sur certaines routes. D’autres interventions telles que des améliorations des remblais, des talus et du drainage, seront aussi effectuées.
Dans le cadre de l’analyse qui sous-tend le plan du ministère, une étude a démontré que lorsque la reconstruction du revêtement était accompagnée d’améliorations du profil en travers, en général, le nombre total des accidents baissait considérablement, avec une estimation sur l’économie des coûts sociaux de 36 millions AUD$. Les ratios marginaux coût/bénéfice étaient améliorés de 5 à 9 quand on incluait les bénéfices sur la sécurité et le temps de déplacement (quand on inclue les bénéfices sur la sécurité, le gain pour la société passe à 8$ contre 4$ pour chaque $ supplémentaire investi). L’amélioration significative du rapport coût/bénéfice tenait au fait que de nombreux bénéfices n’étaient pas comptabilisés ; par exemple, les gestionnaires ne prenaient pas en compte la sécurité et le gain sur les temps de parcours dans leur programme, en notant que 89% des bénéfices supplémentaires provenaient de la réduction du nombre d’accidents.
La réduction potentielle des accidents pour l’ensemble du réseau a été estimée être cinq fois plus grande si les déficiences du profil en travers étaient traitées indépendamment de la reconstruction de la chaussée. Ainsi, la maximisation des bénéfices nécessite une prise en considération de l’ensemble des besoins.
Le chapitre 7 donne des orientations sur l’élaboration de politiques visant à obtenir de meilleurs résultats en matière de sécurité routière. Ceci comprend la nécessité de comprendre les problèmes actuels de la sécurité routière par l’analyse des données, et l’élaboration d’un plan pour la sécurité routière comprenant des objectifs et des interventions appropriés. L’élaboration d’une politique d’infrastructure suit le même processus, et devrait être considéré comme faisant partie de l’élaboration d’une politique générale pour la sécurité routière.
Le FMSR (2009) donne des conseils pour les pays qui constituent leur capacité en sécurité routière (à savoir les PRFI) en termes de stratégie d’investissement (chapitre 3). Ces conseils sont utiles pour le développement de politiques, de normes et de recommandations. Il est suggéré que l’attention initiale de ces pays se concentre sur des corridors de démonstration dans les zones à forte densité d’accidents et sur les zones urbaines. L’intérêt de cette approche par corridor de démonstration est décrit dans tout le Manuel, et illustré dans l’Encadré 11.2 sur le Belize.
Le FMSR (2009) a aussi examiné le besoin de réviser et de comparer les politiques et les interventions de sécurité avec celles d’autres pays, avant le commencement et la mise en œuvre des réformes. Ce conseil est également pertinent pour les agences routières qui essaient de mettre en œuvre de nouvelles politiques d’infrastructure. Afin d’attirer l’attention sur les domaines les plus prioritaires et de renforcer la capacité par la pratique, les politiques visant à traiter les accidents à ces endroits peuvent être considérées comme une priorité. De même, la connaissance des approches fructueuses adoptées dans d’autres pays et la manière d’y parvenir est une méthode précieuse.
Il existe peu de connaissances sur les mécanismes de transformation de la politique de sécurité des infrastructures routières en normes et recommandations pertinentes. Mais certains exemples mettent en lumière ce qui peut être réalisé. De nombreux pays ont élaboré leurs propres normes et recommandations, qui dans certains cas peuvent être adoptées par d’autres pays (bien que, comme déjà signalé, avec beaucoup de précaution là où la situation est différente). Croft et al (2010) donnent des conseils fondés sur l’élaboration de recommandations nationales en Australie. Certains éléments clés de ce processus sont que ces recommandations ont été produites :
Les politiques, normes et recommandations, doivent être révisées constamment afin de les améliorer sur la base des innovations récentes. Une approche fondée sur le retour d’expérience est nécessaire pour assurer que les avantages de sécurité escomptés de tout changement sont obtenus. Comparer les approches utilisées dans les pays ayant de bons résultats de la sécurité routière est une bonne démarche pour aider à identifier les innovations possibles. D’autres analyses peuvent être requises pour assurer que les changements auront un effet positif sur la sécurité s’ils sont appliqués dans un autre pays. Les projets de démonstration pour mettre à l’épreuve les innovations sont utiles pour établir si elles sont bénéfiques dans un environnement contrôlé. Après leur évaluation et la preuve de leur efficacité, ces innovations peuvent être déployées plus largement et les changements recommandés peuvent être traduits dans des recommandations.
Il n’y a pas de modèle établi pour l’élaboration de politiques, normes et recommandations et dans les pays qui en ont une couverture complète, elles varient dans leur contenu, le plus souvent pour refléter les conditions locales. Pour les pays souhaitant élaborer ou améliorer des politiques, normes et recommandations pour l’infrastructure, il est utile d’établir des comparaisons avec celles ayant obtenu de bons résultats et de tirer parti des exemples internationaux et régionaux de bonnes pratiques. Les paragraphes suivants présentent des exemples au niveau mondial, régional et national, et peuvent servir de point de départ à cet exercice.
En réponse à l’approche Système Sûr, un changement significatif s’est produit dans les politiques de sécurité routière ces dernières années. Ceci est examiné au chapitre 4, y compris l’origine de cette approche et ses implications. La Décennie d’Action pour la Sécurité routière décrite au chapitre 2, a eu pour résultat un changement significatif de politique. Au niveau international, la Coopération pour la Sécurité routière des Nations Unies (CNUSR) a développé un Plan mondial qui comporte des recommandations pour des routes et une mobilité sûres (Paragraphe 2.3). Ce Plan déclare que l’objectif de ce Pilier est de :
« Améliorer la sécurité intrinsèque et la qualité protectrice du réseau routier au bénéfice de tous les usagers de la route, en particulier les plus vulnérables (par exemple, les piétons, les cyclistes et les motocyclistes). Cet objectif sera atteint par la réalisation d’une évaluation de l’infrastructure routière et une meilleure planification, conception, construction et exploitation des routes dans le souci de la sécurité.»
Source : CNUSR, 2010, p.12.
Ce Plan suggère que ceci peut être réalisé grâce à six activités clés, à savoir :
L’Encadré 9.5 montre plus en détail comment ces activités peuvent être réalisées. Chaque pays devra évaluer comment il réagit à chacune de ces activités, mais l’information fournie ici constitue une liste utile de vérification des mesures qui peuvent être prises pour améliorer la gestion et la fourniture de routes sûres.
Activité 1: Amener les autorités chargées des routes, les ingénieurs et les urbanistes à prendre en main la sécurité routière et à en être responsables :
Activité 2 : Tenir compte des besoins de tous les usagers de la route dans le cadre d’un urbanisme, d’une gestion de la demande de transports et d’une gestion de l’utilisation des sols durables :
Activité 3 : Promouvoir la gestion sûre, la maintenance et l’amélioration par les autorités
de l’infrastructure routière existante pour :
Activité 4 : Promouvoir le développement d’une nouvelle infrastructure sûre qui satisfasse les besoins d’accès et de mobilité de tous les usagers en encourageant les autorités concernées à :
Activité 5 : Encourager le renforcement de la capacité et le transfert des connaissances en sécurité de l’infrastructure :
Activité 6 : Favoriser la recherche-développement dans les domaines de la sécurité des routes et de la mobilité :
Source : OMS
© ARRB Group
Toujours au niveau mondial, la CNUSR a mis en avant dans son document Des Routes plus sûres pour le Développement (Safe Roads for Development, 2010) plusieurs politiques prioritaires pour l’infrastructure, en particulier dans les PRFIs. Le document suggère de cibler les types d’accident principaux sur les routes à haut risque. Les types d’accident concernés comprennent ceux impliquant des usagers vulnérables marchant ou pédalant le long de la route, les chocs frontaux, les impacts latéraux aux carrefours, et les accidents par sortie de route. Les routes à haut risque se réfèrent à la petite proportion des routes du monde où la majorité des accidents graves et mortels se produisent. Le rapport souligne qu’au Royaume-Uni, plus de la moitié des décès et près d’un tiers des blessures graves se produisent sur seulement 10% du réseau, et qu’au Bengladesh, 40% des décès routiers se produisent sur seulement 3% des routes artérielles du réseau.
Les actions prioritaires pour les routes et ces types d’accidents incluent :
En lien avec ce contexte politique international, plusieurs recommandations mondiales ont été publiées pour aider à traiter de la sécurité routière. Des recommandations, produites par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le Partenariat mondial pour la Sécurité routière (GRSP), la Fondation pour l’Automobile (FIA) et la Banque mondiale, existent sur plusieurs éléments liés à la sécurité de l’infrastructure routière. Les recommandations d’intérêt particulier pour les utilisateurs de ce Manuels concernent les systèmes de données (voir chapitre 5), la gestion de la vitesse et la sécurité des piétons. D’autres recommandations mondiales existent aussi sur les casques, la ceinture de sécurité, les dispositifs de retenue pour enfants et la conduite en état d’ébriété. Tous ces documents peuvent être téléchargées depuis le site Internet de l’OMS : http://www.who.int/roadsafety/publications/en/).
L’AIPRC (2012) a conduit un important examen des politiques et plans nationaux de sécurité routière. Ceci traite des politiques pour l’amélioration de l’infrastructure et comporte les principales conclusions suivantes :
Le présent document est évidemment le principal document de recommandation produit par l’AIPCR sur la sécurité routière de l’infrastructure. De nombreux autres documents importants et pertinents pour les politiques et recommandations pour la sécurité routière traitant de la conception et du développement de l’infrastructure, des audits de sécurité routière, de la sécurité sur les zones de chantier, des usagers vulnérables de la route, de l’exploitation de la route, de la sécurité routière durant l’hiver, des tunnels routiers et autres sont disponibles sur son site Internet (Encadré 9.6).
Analyse des accidents de la route, recommandations pour les ingénieurs routiers (2013 - 2013R07FR)
Comparaison des politiques et plans nationaux de sécurité routière (2012 - 2012R31FR)
Guide des inspections pour les vérifications de sécurité sur les routes existantes (2012 - 2012R27FR)
Facteurs humains dans la conception des routes. Examen des normes de conception dans neuf pays (2012 - 2012R36EN)
État de la pratique en matière d'analyse coût-efficacité, d'analyse coûts-avantages et d'affectation des ressources (2012 - 2012R24FR)
Meilleures pratiques pour les campagnes de sécurité routière (2012 - 2012R28FR)
Tirer parti des systèmes de transport intelligents pour améliorer la sécurité routière (2011 - 2011R03FR)
Guide sur les audits de sécurité routière pour les contrôles de sécurité des nouveaux projets routiers (2011 - 2011R01FR)
Catalogue AIPCR des problèmes de sécurité de conception et des contre-mesures potentielles (2009 - 2009R07FR)
Outils pour la gestion de la sécurité dans les tunnels routiers (2009 - 2009R08EN)
Guide sur les facteurs humains pour des infrastructures routières plus sûres (2008 - 2008R18FR)
Facteurs humains et sécurité des usagers dans les tunnels routiers (2008 - 2008R17EN)
En plus d’assister la CNUSR dans l’élaboration du Plan mondial, le Fonds mondial pour la Sécurité routière (FMSV) de la Banque mondiale a produit plusieurs documents de politiques et de recommandations, dont beaucoup sont conçus spécifiquement pour une utilisation dans les PRFIs. Le site Internet du Fonds fournit des ressources documentaires complètes pour aider à la réalisation d’infrastructures routières plus sûres : (http://go.worldbank.org/9QZJ0GF1E0).
La Directive européenne 2008/96/EC traite de la politique pour la réalisation d’une infrastructure sûre. Publiée en novembre 2008, cette directive s’applique au réseau transeuropéen de transport, mais il est suggéré que ses dispositions soient appliquées aux réseaux routiers nationaux. Il existe aussi des recommandations européennes distinctes pour le réseau routier secondaire (voir par exemple Polidori et al, 2012).
Les dispositions de la Directive indiquent que:
La Directive souligne aussi le besoin de disposer de recommandations pour soutenir ces activités, et renseigne sur la formation appropriée, l’échange de meilleures pratiques et l’amélioration continue. Un récent examen de la Directive (EC, 2012) a montré que des processus plus systématiques avaient été mis en place dans les pays de l’Union européenne pour gérer la sécurité de l’infrastructure selon la Directive. Le chapitre 10 examine en détail les approches mentionnées ci-dessus.
Des approches régionales de la sécurité routière dans les PRFIs ont aussi été développées, souvent avec l’assistance des banques de développement, des commissions régionales des Nations Unies ou de groupes économiques régionaux. Par exemple, la Banque asiatique de développement (BAD) a développé une initiative de transport durable qui aborde directement la sécurité routière à travers un plan d’action pour la sécurité routière pour la région (www.adb.org/documents/road-safety-action-plan ).
Ce plan examine la rationalisation de la sécurité dans les zones d’activité de la BAD. Un groupe de la BAD sur la sécurité routière a été constitué, l’un de ses objectifs de ce groupe étant de mettre à disposition pour les pays de la région, des documents de référence, des termes de référence, des recommandations et des outils clés. La version résumée du document Améliorer la Sécurité routière en Asie et dans le Pacifique fournit des conseils et des matériaux de référence utiles sur la sécurité routière, fondés sur la récente expérience de la BAD ; il peut être consulté à :
(http://www.adb.org/sites/default/files/evaluation-document/36104/files/road-safety.pdf ).
L’Encadré 2.4 du chapitre 2 décrit l’approche régionale utilisée pour le développement du Plan africain d’action pour la sécurité routière 2011-2020, dont le développement a fait participer un large éventail de parties prenantes. Au niveau national, différentes approches ont été suivies pour élaborer des politiques, et la production de normes et recommandations appropriées à l’infrastructure. Ceci arrive souvent en réponse aux différents contextes locaux, y compris les différentes législations et enjeux de sécurité routière. Comme déjà signalé ailleurs dans ce Manuel, il n’existe pas une seule approche correcte pour une gestion efficace de la sécurité routière. Il existe cependant des principes généraux qui sont universels.
Aux États-Unis, le Manuel de Sécurité des Autoroutes (Highway Safety Manual, AASHTO, 2010) fournit des recommandations détaillées sur le processus de gestion de la sécurité des autoroutes. L’approche proposée concorde largement avec ce qui est fait dans de nombreux pays, et ce n’est pas par coïncidence qu’elle reflète exactement la structure de la 3ème partie de ce Manuel, en particulier les chapitres 10 à 12. Le processus inclut des étapes clés depuis l’examen du réseau (identifier et classifier les sites) jusqu’à l’évaluation de l’efficacité de la sécurité (suivi de l’efficacité).
Antérieurement à son Manuel de sécurité des autoroutes, l’AASHTO avait produit une série de guides pour assister à l’élaboration du Plan stratégique de sécurité des autoroutes. Cette série exhaustive de 20 guides montre le chemin à suivre pour résoudre des problèmes stratégiques clés. Les guides concernant les problèmes liés à l’infrastructure routière aborde les thèmes des collisions avec des arbres sur de sites dangereux, des chocs frontaux, des carrefours avec et sans signaux, des collisions en sortie de route, des collisions en virage, des poteaux électriques, des piétons et des zones de chantier. Ces documents sont disponibles sur le site Internet : (http://safety.transportation.org/guides.aspx ).
D’autres pays possèdent des ensembles similaires de recommandations sur la gestion de la sécurité routière de l’infrastructure. Par exemple, le Guide sur la sécurité routière d’Austroads (Guide to Road Safety, actuellement en neuf parties) donne des conseils pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande (www.austroads.com.au) ; les Pays-Bas ont leur Manuel de la sécurité routière Road Safety Manual (CROW, 2009) et Faire Avancer la Sécurité durable (Advancing Sustainable Safety (Wegman & Aarts, 2006), et le Royaume-Uni a élaboré son Guide des Bonnes Pratiques (Good Practice Guide (DTLR, 2001)). Dans chaque pays, ces documents sont accompagnés de nombreuses autres normes et recommandations pertinentes. Par exemple, le Centre d'Études sur les Réseaux, les Transports, l'Urbanisme et les Constructions Publiques (Certu) en France, a publié plusieurs guides et documents de références (dont certains traduits à l’anglais) ainsi qu’un Guide méthodologique sur la Sécurité des Transports en Zones urbaines (aussi disponible en anglais : Transportation Safety in Urban Area: Methodological guide, Certu, 2008. Le site Internet du Certu se trouve à: http://www.territoires-ville.cerema.fr/).
Ces documents sont techniquement solides et constituent une base utile pour la gestion de la sécurité de l’infrastructure, mais encore une fois, de grandes précautions doivent être prises pour adapter ces recommandations à d’autres pays. Différentes approches et en particulier différentes solutions peuvent être plus appropriées lorsque le contexte (dont la composition du trafic) est différent.
Comme déjà signalé dans ce chapitre, parfois, différentes politiques ou recommandations sont élaborées pour des routes ayant des fonctions différentes. La Directive de l’UE ne se réfère qu’au réseau routier Transeuropéen, et pour les routes d’ordre inférieur, une information supplémentaire est disponible (voir par exemple Polidori et al, 2012 pour des conseils sur le réseau routier secondaire). Si les principes généraux qui s’appliquent à tous les types de routes sont les mêmes, souvent les détails diffèrent. De même, certains pays publient des recommandations pour les routes locales, reconnaissant que les contraintes peuvent être différentes. Parmi les exemples, le Guide de bonne pratique (Good Practice Guide) du Royaume-Uni (DTLR, 2001), les recommandations du guide Etablir des plans de sécurités : Un manuel pour les propriétaires de routes rurales (Developing Safety Plans: A Manual for Local Rural Road Owners) (Ceifetz et al, 2012) publié par l’administration fédérale des États-Unis (FHWA) et le guide de Austroads (2009) Sécurité routière pour les gouvernements et collectivités locales (Local Government and Community Road Safety) (voir aussi Austroads 2010a). McTiernan et al (2010) donnent aussi des conseils utiles pour les gouvernements locaux australiens sur l'approche Système sûr. Cependant, il n’existe habituellement qu’un seul document concernant la gestion de la sécurité de toutes les routes, les services gestionnaires des différentes parties du réseau étant supposés adapter l’information à leurs propres circonstances.
En plus des documents concernant les thèmes liés à la sécurité (sous-chapitre 3.2 et chapitre 11), de nombreux pays disposent de guides complets sur la conception, la construction, la gestion de la circulation et l’entretien des routes qui intègrent généralement la sécurité, bien qu’il soit notable que beaucoup d’entre eux n’intègrent pas encore complètement les principes du Système Sûr. Il faut souvent du temps pour que les recommandations incluent des approches innovantes pour la conception des routes, parce que leur élaboration et leur évaluation s’étale souvent sur plusieurs années. Les mises à jour des recommandations peuvent être peu fréquentes et il peut y avoir une certaine réticence à changer les pratiques établies. Une approche fondée sur le retour sur expérience est nécessaire, ainsi qu’un processus facilitant l’amélioration et les mises à jour continuelles des guides.
Il n’est pas possible d’inclure dans le présent Manuel des conseils complets sur les questions liées à la conception et à l’entretien des routes et à la gestion de la circulation, les lecteurs sont renvoyés vers les recommandations nationales appropriées sur ces sujets. En ce qui concerne les recommandations sur la sécurité, les pays sont encouragés à comparer les leurs avec celles des pays possédant de bons résultats (c’est-à-dire ceux avec de faibles taux d’accidents) lors du développement ou de la mise à jour de leurs propres recommandations.
La conception et la construction des routes comprennent la conception géométrique et la conception structurelle de la chaussée. L’un des objectifs principaux de la conception géométrique de la route est d’optimiser la sécurité opérationnelle et l’efficacité du transport sous contraintes (budgets, préoccupations environnementales et autres résultats sociaux). La conception doit prendre en compte le volume et le type de trafic supposé utiliser cette route. Les éléments qui sont typiquement supposés avoir un impact sur l’efficacité et la sécurité comprennent les carrefours, les courbes en plan, le profil longitudinal, le profil en travers (largeur de la voie et de l’accotement, barrières médianes et accotements), et les zones d’entrée et de sortie du trafic, questions qui sont habituellement couvertes en détail dans les guides de conception. Une information sur les différents éléments de la conception et leur impact sur la sécurité est disponible (par exemple, AASHTO, 2010; Harwood et al, 2014 ; Austroads 2010b).
Les paragraphes suivants donnent une brève description de contremesures efficaces et des avantages en matière de sécurité de différents éléments de conception, sur la base des documents cités ci-dessus. Cependant, il est important de noter que bien que l’efficacité de ces traitements dans la réduction du risque d’accident dans les PREs soit bien connue, les choses peuvent être différentes dans les PFRIs. Par exemple, des accotements asphaltés plus larges peuvent fournir aux conducteurs un espace supplémentaire de récupération après une erreur de conduite, mais dans les PRFIs, cet espace est souvent utilisé par la population pour installer des stands de vente.
Critères de conception :
Les références suivantes fournissent des exemples de recommandations de différents pays pour la conception des routes :
La gestion de la circulation concerne le déplacement efficace et sûr des biens et des personnes, ce qui implique des dispositions pour les piétons, les cyclistes et les autres usagers vulnérables de la route. Encore une fois, de nombreuses recommandations existent et peuvent assister dans la gestion des routes et de la circulation. Elles sont habituellement étroitement liées aux principes de conception, aux capacités des usagers, et aux caractéristiques des véhicules. Typiquement, les recommandations couvrent des aspects tels que la théorie du trafic, les études et l’analyse du trafic, et l’utilisation de dispositifs de contrôle du trafic (signaux et marquages), ainsi que d’autres mesures associées (signaux lumineux et éclairage public). Elles peuvent aussi couvrir des questions telles que la gestion de la vitesse et la modération du trafic, les installations de transport public, le stationnement et la gestion de travaux routiers. Des exemples comprennent :
Généralement, les recommandations pour la conception sont élaborées en partant de l’hypothèse qu’elles seront utilisées lorsqu’il y a un minimum de contraintes à la réalisation du projet. Sur des sites nouveaux (« green fields ») ce sont les critères de conception du Domaine normal de Conception (Normal Design Domain, NDD) qui devraient être utilisés. Cependant, il est beaucoup plus courant de réaliser des améliorations de sécurité ou autres sur des sites où des contraintes existent, comme par exemple la modernisation de routes existantes ( « brown fields »). Les contraintes peuvent inclure le tracé existant de la route, des installations électriques (y compris les poteaux), le drainage, les points d’accès, etc. Dans ces situations, appliquer les valeurs NDD peut rendre les projets financièrement non viables. De plus, les contraintes peuvent surgir de questions environnementales, de patrimoine historique ou culturel.
De nombreux pays ont élaboré des procédures pour traiter les écarts par rapport au NDD. Si l’on s’écarte des critères recommandés de conception, une justification est requise. Ceci devrait être produit au début de l’étape de conception, et inclure un examen clair et attentif des impacts sur la sécurité découlant de la non-application de ces critères, ainsi que des impacts sur l’exploitation de la circulation. Des stratégies d’atténuation destinées à minimiser tout risque dû à l’écart doivent être formulées.
Des recommandations sur les impacts sur la sécurité résultant de la non-application des critères du NDD existent dans plusieurs pays, ainsi que de l’information sur les stratégies d’atténuation. Parmi les exemples utiles citons les recommandations du Département des Transports du New Jersey, (2012), du Département des Transports et des Routes principales du Queensland (2013) et de Stein et Neumann (2007).
Aux États-Unis, une approche récente (mais aussi appliquée ailleurs sous d’autres noms) est le concept de conception basée sur les résultats (Performance-based practical design, PBPD), qui est une évolution de la conception fonctionnelle. Ceci implique de se limiter aux besoins identifiés et de supprimer les éléments non-essentiels. Ceci a pour effet de réduire les coûts et de permettre des améliorations à un plus grand nombre de sites. Le changement vers une approche PBPD signifie que des décisions informées seront prises en utilisant des outils d’analyse (par exemple, le Manuel pour la Sécurité des Autoroutes). Les agences utilisant cette approche devraient avoir des objectifs spécifiques de résultats à court et long terme pouvant s’appliquer à un projet, à un corridor tout entier, ou à l’ensemble du réseau. Les projets, utilisant les outils disponibles d’analyse des résultats et les évaluations qualitatives, ne devraient inclure que les caractéristiques servant les objectifs de résultats à court et long terme. Les projets n’auraient pas besoin d’inclure les caractéristiques fournissant des résultats dépassant les objectifs déclarés, ne servant pas ces objectifs, ou n’étant pas cohérents avec le but et les besoins. Ceci supprime une préoccupation liée à l’approche en conception classique, qui est que les agences peuvent accorder trop d’importance aux économies à court terme sans une compréhension claire de l’impact de telles décisions sur d’autres objectifs (tels que la sécurité et les résultats d’exploitation, la sensibilité du contexte, les coûts sur le cycle de vie, les objectifs de corridors de longue distance, la qualité de vie et la durabilité).
L’approche PBPD a pour philosophie d’équilibrer les objectifs du projet avec les besoins, les normes de conception, les coûts sur le cycle de vie, les résultats d’exploitation et en matière de sécurité, et la durabilité. Pour tirer le meilleur parti de l’approche PBPD, il est fortement recommandé d’adopter une perspective systémique et d’intégrer les concepts de l’approche PBPD dans toutes les décisions relatives à la planification, la programmation et l’élaboration des projets. Dès la phase de planification et de programmation, un groupe multidisciplinaire peut évaluer les options et les compromis à faire pour définir les objectifs de résultats ainsi que les besoins précis et le but du projet, qui seront utilisés tout au long de sa vie.
Une variété d’outils et d’approches est disponible pour assister dans la gestion de la sécurité des infrastructures. Comme pour les recommandations, certains outils ont été développés pour un usage au niveau mondial, national ou régional. Dans certains cas, les outils développés pour un certain endroit ou pays peuvent être adaptés pour une utilisation dans un autre, mais dans ce cas grand soin doit être pris pour assurer que le nouveau contexte a bien été pris en considération. Les différents types d’outils disponibles pour la gestion de la sécurité de l’infrastructure routière sont brièvement mentionnés ci-après, et d’autres détails sont fournis dans les chapitres pertinents de ce Manuel.
Schermers et al (2011) font un résumé utile des outils utilisés en Europe (dont la plupart sont examinés dans le Manuel). Elvik (2011) suggère un cadre pour l’utilisation d’outils liés aux étapes de la durée de vie d’une route. Les États-Unis ont aussi développé une gamme complète d’outils pour la gestion de l’infrastructure de sécurité routière, qui sont brièvement décrits dans l’Encadré 9.7.
Les outils d’analyse de la sécurité développés aux États-Unis comprennent :
L’Outil d’Examen du Réseau : identifie les sites offrant un potentiel d’amélioration de la sécurité au moyen d’algorithmes qui signalent les zones préoccupantes (par exemple, avec une fréquence d’accidents supérieure aux résultats attendus). De plus, la gravité des accidents ou un taux de type spécifique de collision supérieur aux résultats attendus peuvent aussi être identifiés. Ces algorithmes sont efficaces pour des emplacements particuliers, ainsi que pour des tronçons de route courts ou longs.
L’Outil de Diagnostic : identifie la nature des problèmes de sécurité pour des sites spécifiques, et peut générer une gamme de données, y compris des statistiques résumées sur les accidents, des diagrammes de collisions, l’identification de modèles de collisions (que ce type de collision se produise à un taux supérieur aux résultats attendus ou non). Il peut aussi effectuer des tests statistiques sur des sites spécifiques, et intègre aussi bien les facteurs d’ingénierie que les facteurs humains pour identifier les problèmes de sécurité.
L’Outil de Sélection des Contremesures: aide à sélectionner les interventions destinées à réduire la fréquence et la gravité des accidents sur des sites sélectionnés. Il incorpore des contremesures spécifiques aux sites qui sont recommandées selon le type de site, les modèles d’accidents et les problèmes spécifiques de sécurité identifiés au moyen de l’Outil de Diagnostic ci-dessus. Une seule ou plusieurs contremesures peuvent être sélectionnées et évaluées au moyen de l’Outil d’Évaluation économique et de l’Outil de Classement des Priorités.
L’Outil d’Évaluation économique : fait une évaluation de contremesures spécifiques ou d’autres options sur un site. Grâce à cet outil, plusieurs évaluations économiques peuvent être faites, dont le rapport coût-efficacité, le rapport coûts-bénéfices et les bénéfices nets. L’efficacité de la sécurité est estimée par le biais de de la fréquence et de la gravité des accidents observées, attendues et prédites ainsi que par les modèles d’accidents et les réductions attendues de leur nombre pour chaque contremesure spécifique. Il est intéressant de noter que les résultats des analyses sont cohérents avec les exigences des recommandations du Programme fédéral d’Amélioration de la Sécurité des Autoroutes.
L’Outil de Classification des Priorités : classe les sites et les améliorations proposées selon l’analyse coût-bénéfice effectuée au moyen de l’Outil d’Évaluation économique. Le classement des sites et des améliorations se fait par la comparaison du rapport coût-efficacité, du rapport coûts-bénéfices, des bénéfices nets, des retombées pour la sécurité, du coût de construction, de la réduction du nombre total d’accidents, de la réduction des accidents mortels ou causant des blessures graves, et de réduction des accidents mortels ou causant tout type de blessures. Cet outil aide à optimiser les projets et à maximiser les bénéfices sur l’ensemble des sites.
L’Outil d’Évaluation des Contremesures : permet la pré- et post-évaluation des améliorations de la sécurité au moyen de l’approche empirique de Bayes (EB). Il est de plus capable d’évaluer les changements dans la proportion des types de collision. Des analyses peuvent aussi être effectuées pour évaluer l’efficacité de contremesures individuelles ou combinées et de projets de construction. Il peut aussi exécuter des analyses coûts-bénéfices pour évaluer les avantages économiques des contremesures ou des projets de construction.
Plus d’information sur ces outils est disponible à : http://www.safetyanalyst.org/.
Les outils énumérés dans l’Encadré 9.7 suivent les étapes générales de la gestion de la sécurité de l’infrastructure identifiées au sous-chapitre 9.1. Les chapitres suivants examinent chacun de ces outils clés. Les outils mentionnés pour les différentes étapes de la gestion de la sécurité routière sont :
L’Encadré 9.8 ci-dessous offre un autre exemple, cette fois-ci en France.
Depuis le début des années 2000, la France a élaboré et mis en œuvre un ensemble d’approches de la sécurité routière pour les projets d’infrastructure. Cet ensemble est maintenant décrit dans la Directive européenne 2008/96 sur la gestion de la sécurité des infrastructures routières et est utilisé pour la mise en œuvre des projets français.
Une évaluation de l’impact sur la sécurité routière est effectuée pour tous les projets d’infrastructure dès l’étape initiale de planification et avant que le projet ne soit approuvé. Elle identifie les considérations de sécurité routière qui contribuent à la sélection de la solution proposée et contient toute l’information nécessaire pour l’analyse coût-bénéfice des différentes options évaluées.
Pour tous les projets d’infrastructure, un auditeur ou une équipe d’auditeurs ayant une bonne expérience effectuent un audit des caractéristiques de la conception du point de vue de la sécurité routière. Ces vérifications font partie intégrante du processus de conception du projet d’infrastructure et sont effectuées à différents stades du projet : avant-projet et conception détaillée, pré-ouverture et début de l’exploitation. Si des caractéristiques peu sûres sont identifiées au cours de l’audit, la conception est rectifiée. Si la rectification n’est pas faite avant la fin de l’étape appropriée, les raisons doivent en être déclarées par l’autorité dans une annexe au rapport.
Source: Audits de sécurité routière (Sétra, 2012).
Une inspection de sécurité routière est effectuée sur le réseau routier national pour toutes les routes existantes afin de rendre compte des détails de la route, de ses abords et de l'environnement général qui peuvent influencer le comportement de l'usager ou affecter sa sécurité passive et avoir ainsi des répercussions sur la sécurité routière. Le concept est de fournir une méthode qui aidera l'opérateur à améliorer sa connaissance du réseau. Des visites d'inspection sont effectuées par un personnel qualifié afin d'identifier les principaux problèmes de sécurité routière et d'apporter un point de vue nouveau sur le système. L'inspection systématique d'un tronçon de route consiste donc en une évaluation rapide et pratique des principales configurations auxquelles l'usager de la route ne peut s'attendre, en considérant tous les modes de transport.
Source : Démarche ISRI - Inspections de sécurité routière des itinéraires (Sétra, 2008)
Sécurité des usagers sur les routes existantes : cette approche, appelée SURE en France, est mise en œuvre sur le réseau routier national pour toutes les routes existantes. Il s'agit d'une méthode générale dont la principale innovation est de fournir explicitement et en permanence une approche complète de l'amélioration de la sécurité routière, de l'étude des problèmes de sécurité routière à l'évaluation en passant par la mise en œuvre des traitements. L'objectif de cette approche est de déterminer et de mettre en œuvre des traitements adaptés pour les tronçons de route où le gain de sécurité est potentiellement plus élevé.
Le processus SURE est une application pratique de l'approche commune de sécurité routière présentée au chapitre 9.3.2 :
Sources : Démarche SURE (Sécurité des usagers sur les routes existantes) - Présentation et management (Sétra, 2006)
Démarche SURE (Sécurité des usagers sur les routes existantes) - Étude d'enjeux de sécurité routière pour la hiérarchisation des itinéraires (Sétra, 2006)
Démarche SURE (Sécurité des usagers sur les routes existantes) - Diagnostic de l'itinéraire et pistes d'actions (Sétra, 2006)
Démarche SURE (Sécurité des usagers sur les routes existantes) - Plan d'actions et réalisation des actions (Sétra, 2006)
Tous ces outils peuvent (et devraient) être utilisés en parallèle. Chacun est utile à des fins différentes et à différentes étapes de la gestion de la sécurité de l’infrastructure. Leurs forces et leurs faiblesses sont examinées dans les chapitres suivants.
Historiquement, la collecte et l’analyse des données ont été l’approche la plus utilisée pour gérer la sécurité, et continueront probablement d’être une approche et un point de départ importants dans les PRFIs. Les audits et les inspections de sécurité routière sont d’autres outils largement utilisés, y compris dans les PRFIs. Un avantage supplémentaire de ces approches est qu’elles constituent un mécanisme utile pour améliorer la culture de la sécurité.
Un fait souvent ignoré est que plus tôt les approches de sécurité sont intégrées dans le processus de gestion de la sécurité ou d’élaboration du projet, plus grand est le potentiel d’amélioration des résultats de sécurité de manière économique. Ceci est le plus évident dans les phases de planification et d’étude. Historiquement et dans de nombreux pays, les praticiens de la sécurité routière ont compté sur l’audit de sécurité routière pour identifier les problèmes de sécurité aux stades de la planification et d’étude du projet. Plus récemment, des outils ont été développés pour aider à intégrer la sécurité dans la conception dès les stades initiaux. Il est important de signaler que ces outils sont destinés à des praticiens n’ayant pas de formation en sécurité routière, dans un effort pour inclure les considérations de sécurité dans la prise de décisions. Ces outils peuvent être de nature quantitative (par exemple, fondés sur les modèles de prédiction des accidents), ou qualitative. L’un des modèles quantitatifs les plus utilisés est le Modèle interactif de Conception de la Sécurité des Autoroutes (HSDM) des États-Unis, qui comprend plusieurs modules dont certains peuvent être utilisés dès le stade de l’avant-projet (AASHTO, 2010). Il est à noter que cet outil est généralement appliqué aux routes américaines existantes, étant donné que très peu de nouvelles routes sont construites. L’Encadré 9.10 et le paragraphe 10.4 donnent plus de détail sur le modèle HSDM. Le programme iRAP a aussi été développé pour quantifier les implications de sécurité dès le début de l’étude du projet (voir l’étude de cas de l’Encadré 9.9).
Le problème : la conception des routes nouvelles ont encore pour résultats des nombres significatifs de décès et de blessures graves.
La solution : la classification par étoiles de l’iRAP a été utilisée dans plusieurs pays pour améliorer la conception afin d’obtenir de meilleurs résultats de la sécurité. Parmi les exemples, un projet pilote en Moldavie (le corridor M2-R7 – 116 km) et en Inde le projet d’amélioration de l’autoroute de l’état de Kamataka (550 km). Ces projets ont été soutenus respectivement par la Millenium Challenge Corporation et par le Fonds mondial pour la Sécurité routière, ainsi que par des partenaires locaux et internationaux.
L’information a été tirée des plans de projet des routes avant leur construction ou rénovation pour évaluer la sécurité du projet proposé. La classification par étoiles de l’iRAP montre comment l’infrastructure influence la probabilité d’accidents et la gravité des accidents qui surviennent. Cette approche fournit une mesure simple et objective du niveau relatif de risque associé à l’infrastructure routière lors des déplacements et des manœuvres effectuées par les usagers. Différentes options de projet sont comparées, et les résultats probables de sécurité des différentes variantes sont déterminés.
Les résultats : les routes de la Moldavie et de l’Inde montrent des améliorations substantielles de sécurité sur la base des conceptions finales mises en œuvre, en particulier pour les piétons dans les villages. Il est anticipé que les projets retenus amènent une réduction des blessures graves de 40% par an en Moldavie et de 45% en Inde. Sur le réseau de l’Inde plus grand et plus fréquenté, ceci équivaut à sauver plus de 100 vies par an. Rogers et al, 2012, offrent une description plus complète du projet de l’Inde.
L’évaluation routière a identifié le besoin d’installations piétonnes et d’une amélioration de la sécurité des piétons. À la suite de cette évaluation, des dispositions pour la protection des piétons ont été ajoutées au projet (dont des passages piétons, des terre-pleins médians de refuge et des trottoirs) et des mesures ont été incorporées pour ralentir le trafic.
Source: Etude de cas fournie par l’iRAP.
Le problème : le Département des Transports de l’Idaho (ITD) a identifié des déficiences sur l’autoroute 8, liées à la circulation, à la géométrie de la route, au contrôle de l’accès et à la sécurité. L’autoroute 8 de l’Idaho est une autoroute à deux voies de 11 miles qui traverse des zones rurales résidentielles et agricoles. ITD désirait conduire une étude dans un corridor pour évaluer les conditions existantes de trafic, la géométrie, et pour prédire les futurs taux d’accidents.
La solution : ITD a utilisé le logiciel du modèle IHSDM de l’Administration fédérale des autoroutes (FHWA) pour réaliser cette étude. Ce logiciel est un ensemble d’outils d’analyse permettant d’évaluer la sécurité et l’exploitation de décisions de conceptions géométriques sur les autoroutes, et de prédire les taux d’accident sur la base des méthodologies du Manuel sur la sécurité des Autoroutes (Highway Safety Manuel, AASHTO). L’utilisation du logiciel IHSDM permet d’effectuer un examen détaillé de plusieurs éléments critiques du corridor simultanément (c’est-à-dire l’exploitation de la circulation, la géométrie et la sécurité) pour identifier et cibler les potentielles zones à problèmes et développer des stratégies efficaces d’atténuation. Les données nécessaires comprenaient les données sur les accidents, les plans de la route existante, de la vidéo, des informations sur le contrôle de la circulation, et les volumes de trafic (existants et projetés). L’information sur la réduction attendue des taux d’accidents a été utilisée pour comparer les effets de variantes de traitement. La liste des stratégies d’atténuation développées pour aborder les problèmes identifiés a été évaluée et priorisée.
Les résultats : à partir des éléments fournis par le logiciel IHSDM, l’ITD a conclu que plus de la moitié du corridor de 11 miles de long présentait des taux d’accidents supérieurs à la moyenne de l’État. Les modules Examen des Politiques et Prédiction des Taux d’accident de l’IHSDM ont identifié des déficiences géométriques, des emplacements spécifiques méritant des investigations plus poussées, des zones nécessitant des améliorations de la conception et des problèmes de sécurité dans ce corridor. Un rapport sur les plans pour le corridor a été préparé, qui résumait l’examen, l’analyse et les recommandations en vue de la mise en œuvre par l’ITD dans les 10 prochaines années. Les mesures recommandées d’atténuation consistaient en des voies de dépassement, des améliorations de la capacité des carrefours, de la visibilité, de la sécurité sur les accotements, et en systèmes intelligents de transport (IYS), en passages pour la faune et en stratégies de gestion des accès.
Graphique : le couloir de l’Autoroute 8 de l’état d’Idaho
FHWA : (http://safety.fhwa.dot.gov/hsm/casestudies/id_cstd.pdf).
Source: FHWA, 2015.
L’Outil stratégique pour l’Évaluation de la Sécurité routière (STARS), élaboré en Australie, s’appuie sur des listes de vérifications pour aider à identifier les résultats négatifs en matière de sécurité (Jurewicz, 2009). Cette approche donne une valeur de risque à chacune des questions de la liste de vérification, et au final une classification de la sécurité pour le projet prévu. Des listes de vérification sont disponibles pour les différents stades du projet, y compris les plans régionaux ou d’aménagement, les plans directeurs, les plans de lotissement ou de quartier, les corridors artériels, et les nouveaux développements urbains ou commerciaux. Voici des exemples de questions de planification de la sécurité routière au niveau régional :
De plus amples informations sur l'évaluation de la sécurité avant un audit de sécurité routière sont disponibles au chapitre 10.4.1.
Les outils de gestion de la sécurité routière doivent faire l'objet d'un examen constant à mesure que de bonnes pratiques et de nouvelles approches apparaissent. Elvik (2011) a procédé à un tel examen des outils européens de gestion de la sécurité des infrastructures et, malgré les nombreuses années de développement et d'expérience dans l'utilisation de ces outils, un certain nombre de possibilités d'amélioration ont été identifiées. Voici quelques-unes des principales constatations :
AASHTO (2010) Highway Safety Manual Volume 1. American Association of State Highway and Transportation Officials, Washington D.C.
Austroads (2009) Guide to Road Safety Part 4: Local Government and Community Road Safety, Austroads, Sydney, Australia.
Austroads (2010a) Road safety on local government roads. Austroads, Sydney, Australia.
Austroads (2010b), Road safety engineering risk assessment: part 1: relationships between crash risk and the standards of geometric design elements. Austroads report AP-T146/10. Austroads, Sydney, Australia.
Ceifetz, A, Bagdade, J, Nabors, D, Sawyer, M & Eccles, K (2012), Developing Safety Plans: A Manual for Local Rural Road Owners, Federal Highway Administration, Washington D.C.
Certu, 2008, Transportation Safety in Urban Area: Methodological guide, Certu, Lyon, France.
Croft, P, Tziotis, M, Turner, B & Hughes, J, (2010) Research directions for guidelines in road safety engineering, Road Safety on Four Continents, Abu Dhabi.
CROW (2009) Road Safety Manual, CROW, EDE, The Netherlands
DTLR (2001) A road safety good practice guide for highway authorities, Department for Transport, Local Government and the Regions, London, UK.
Elvik, R, (2011) Assessment and applicability of evaluation tools: Current practice in a sample of European countries and steps towards a state-of-the-art approach, Deliverables Nr 4 and 5 of the European Road Infrastructure Safety Management Evaluation Tools (RISMET) project, Eranet Roads, Leidschendam, Netherlands.
European Commission (2014), Study on the effectiveness and on the improvement of the EU legislative framework on road infrastructure safety management (Directive 2008/96/EC), European Commission, Brussels, Belgium.
GRSF (2009), Implementing the Recommendations of the World Report on Road Traffic Injury Prevention. Country guidelines for the Conduct of Road Safety Management Capacity Reviews and the Specification of Lead Agency Reforms, Investment Strategies and Safe System Projects, Global Road Safety Facility World Bank, Washington DC.
Harwood, D, Hutton, J, Fees, C, Bauer, K, Glen, A, & Ouren, H, 2014, Evaluation of the 13 Controlling Criteria for Geometric Design, NCHRP Report 783, Washington DC.
Jurewicz, C, (2009) STARS: a risk-based road safety tool for urban planners, Australasian Road Safety Research Policing Education Conference, Sydney, Australia.
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http://www.state.nj.us/transportation/eng/documents/DEM/pdf/DEM201201.pdf, accessed 25 February, 2014.
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Wegman, F & Aarts, L (2006) Advancing Sustainable Safety: National Road Safety Outlook for 2005-2020, SWOV Institute for Road Safety Research, Leidschendam, The Netherlands.
Ce chapitre examine les méthodes d’identification des sites à haut risque, et les manières d’analyser des données de différentes sources pour évaluer les causes de ce risque. L’évaluation des risques potentiels et l’identification (ou « diagnostic ») des problèmes sont les premières étapes de ce processus d’évaluation du risque présenté au chapitre 9 (Graphique 10.1).
Graphique 10.1: Évaluation du risque et identification des problèmes dans le processus d’évaluation du risque
L’approche traditionnelle utilisée pour identifier le risque est l’analyse des données historiques sur les accidents. Elle est certes toujours pertinente aujourd’hui, mais il a été reconnu ces dernières années que d’autres sources d’information devraient être aussi utilisées dans le processus d’évaluation du risque. Cette approche dynamique élargie est importante pour tous les pays, mais plus particulièrement pour les PRFIs où les données sur les accidents peuvent être de faible qualité. Les approches dynamiques sont de plus en plus utilisées dans les PRE pour compléter les données sur les accidents. Bien que ce chapitre soit structuré de manière à présenter séparément l’information sur chaque approche, il est très important d’utiliser à la fois les approches dynamiques et réactives pour évaluer le risque.
L’accent de ce Manuel est mis sur l’élimination des décès et des blessures graves, puisque ce sont là les types d’accidents ayant le plus grand impact sociétal. Cependant, identifier des sites à haut risque où se produisent des décès et des accidents graves n’implique pas seulement l’analyse des données sur ce type d’accident, mais aussi l’utilisation d’autres sources d’information pour identifier les emplacements où il est probable que des décès et des blessures graves puissent survenir.
Les paragraphes suivants renseignent brièvement sur les approches au niveau du programme et des projets pour évaluer le risque. Le chapitre 10.3 traite des méthodes d’identification et d’évaluation du risque fondées sur les données d’accidents. Le chapitre 10.4 informe sur les approches dynamiques, y compris l’évaluation de l’impact, l’audit de sécurité routière et les inspections de sécurité. Le chapitre 10.5 rassemble les approches dynamiques et réactives pour examiner une approche intégrée de l’évaluation du risque.
En priorité, une évaluation devrait être effectuée pour les routes et les corridors à haut risque (voir l’étude de cas au Belize dans l’Encadré 1), en utilisant les données d’accidents disponibles ainsi que l’information sur les éléments de la route liés à la sécurité (par exemple au travers des audits de sécurité et des programmes d’évaluation des routes, chapitre 10.4).
Typiquement, les agences routières affectent les fonds destinés à améliorer les sites à haut risque, que ce soit sur la base des données historiques sur les accidents ou sur le risque potentiel. Ces fonds peuvent prendre la forme d’un financement réservé aux sites à haut risque ou être intégrés dans d’autres budgets d’exploitation (par exemple, grands projets de gestion du patrimoine). La plupart des actions des agences routières ont un impact sur la sécurité, qu’elles soient entreprises pour des raisons de sécurité ou non. Si les considérations de sécurité sont incluses dans toutes les prises de décision, le risque pour la sécurité peut être réduit, souvent avec peu ou pas de coûts additionnels. L’évaluation du risque doit se faire au niveau du programme et du projet, et les conseils donnés dans ce chapitre sont pertinents pour les deux niveaux.
L’évaluation du risque devrait être effectuée sur l’ensemble du réseau de la responsabilité de l’agence routière. Une telle approche requiert une évaluation du risque et des enjeux à l’échelle du réseau. Les résultats de cette approche devraient identifier les principaux types d’accidents, les tendances, les régions ou zones géographiques, les types de déficiences, etc., et déterminer les programmes de travaux.
Il arrive souvent qu’un fort pourcentage des décès et des accidents graves se produise sur un faible pourcentage du réseau. Au niveau du programme, la tâche est d’identifier les routes dangereuses et de les traiter. Pour les pays avec des ressources limitées ou manquant de données adéquates sur l’ensemble du réseau, ces routes ou sites sont les plus importants candidats à une évaluation, et peuvent constituer la base d’un projet de corridor de démonstration. Le contenu de ce chapitre et des suivants peut servir de guide pour l’évaluation du risque sur les réseaux ou dans les corridors. Les exemples ci-dessous au Belize (Encadré 10.1) et en Australie (New South Wales) (Encadré 10.2) décrivent l’approche de corridor.
Le problème : comme indiqué dans l’étude de cas du chapitre 9.2.2, bien qu’étant un pays de très petite taille, le Belize a enregistré 70 morts sur la route en 2009, ce qui équivaut à 21 décès dus à la circulation pour 100.000 habitants.
La solution : pour évaluer la sécurité routière au Belize, une approche multisectorielle a été choisie, et impliquait des améliorations à l’infrastructure dans un corridor de démonstration. Le processus initial pour cette phase comprenait :
Des options d’investissements spécifiques ont été recommandées aux parties prenantes du projet, la décision finale pour un niveau approprié d’investissement étant prise par l’autorité routière du Belize. Des améliorations dans un corridor de démonstration de 82 km allant de Belize City à Belmopan ont été acceptées, et comprenaient :
Des modèles de taux de décès et de blessures sur la route avec et sans les améliorations recommandées ont été établis pour le corridor de démonstration, et une évaluation économique a comparé les coûts incrémentaux et les avantages de ces deux alternatives. Les résultats de cette analyse incrémentale ont indiqué que pour le niveau d’investissement proposé, 470 décès et blessures graves pourraient être évités sur une période d’analyse de 20 ans. Ceci équivaut à une réduction de 20% du nombre de décès et de blessures graves sur cette période.
En utilisant des valeurs très conservatives des coûts des accidents, la valeur nette actuelle (VNA) estimée de ce projet est de un million de USD, et le taux de rentabilité économique (TRE) est de 28,8%. Ce TRE est largement supérieur à la valeur plancher de 12,0% de la Banque caribéenne de Développement, ce qui met en lumière les importants avantages économiques qui peuvent être obtenus grâce aux investissements en sécurité routière. L’analyse économique s’est concentrée sur les coûts quantifiables et les avantages associés aux améliorations de la sécurité de l’infrastructure dans le corridor de démonstration, parce qu’ils peuvent être estimés avec une plus grande fiabilité et robustesse. De plus, les actions de renforcement institutionnel et de la capacité sont aussi supposées avoir un impact significatif sur la sécurité routière dans tout le pays. Des avantages tangibles sont aussi attendus des activités proposées d’éducation routière, de sensibilisation et de communication.
Les résultats : ce projet est toujours en cours d’évaluation, mais les premières indications sont positives.
Source : Ministère des Travaux publics du Belize et Banque caribéenne de Développement
Le problème : les seules améliorations de sécurité apportées à l’infrastructure ne produisaient pas de résultats assez forts en termes de réduction des décès et des blessures graves sur la route.
La solution : New South Wales a développé des inspections de la sécurité des routes principales avec une approche par corridor pour analyser et sélectionner des travaux (et certains programmes de changement des comportements) destinés à améliorer la sécurité routière. Les inspections de sécurité routière sont différents des audits d’ingénierie et des programmes de traitement des points noirs. Ils se concentrent sur un seul corridor, sur l’analyse des accidents mortels, et un examen physique de la route tout entière par une équipe multidisciplinaire de sécurité routière (incluant l’expertise en ingénierie, conception des routes, science ou psychologie du comportement, en statistiques et en action de la police). L’examen ne se concentre pas sur les sites où la route ne répond pas aux normes, mais plutôt sur l’analyse des conditions des accidents mortels. L’équipe d’auditeurs considère la route comme un tout et aborde la question de savoir comment éviter les blessures plutôt que les accidents. Roos et al (2008) donnent plus de détails sur ce sujet.
Les résultats : les gains obtenus en matière de sécurité routière ont été élevés, comme l’indique le graphique ci-après. Sur l’autoroute Pacifique (plus de 600 km), la comparaison du nombre d’accidents avec celui dans les années précédant les travaux montre une réduction de 45% des décès, et une forte réduction du nombre des blessés. Le même processus pour l’autoroute des Princes (plus de 400 km) montre une réduction de 83% des décès et une forte réduction du nombre de blessés. Ces examens ont donné un rapport bénéfices/coûts moyen de plus de 12,1 pour les travaux, très au-dessus des valeurs obtenues avec les programmes traditionnels de traitement des points noirs ou audits d’ingénierie dans l’Etat.
Réduction des accidents mortels à la suite de la mise en œuvre d’un programme de travaux de sécurité routière sur les autoroutes Pacifique et Princes Source : Dr Soames Job, Global Road Safety Solutions.
Au niveau du projet, les étapes indiquées dans ce chapitre sont aussi pertinentes. Elles soulignent comment identifier et diagnostiquer le risque à des emplacements plus spécifiques (par exemple carrefours, routes ou zones). Les approches fondées sur les taux d’accidents (réactives) et celles plus dynamiques sont pertinentes aussi bien pour les approches au niveau du programme que pour celles au niveau du projet. Dans les deux cas, les mêmes étapes sont nécessaires pour évaluer les risques et identifier les problèmes occasionnels.
Les prochains paragraphes se concentrent sur l’identification fondée sur les accidents des sites à haut risque, un processus connu comme « investigation des accidents » ou « traitement des points noirs ». L’expression « site avec potentiel d’amélioration » est aussi utilisée, et l’approche implique la sélection de sites offrant un fort potentiel de réduction des accidents par l’introduction d’améliorations ciblées de sécurité. Cette approche se fonde sur l’analyse des accidents pour premièrement identifier les problèmes de sécurité avant de rechercher une solution. Ces méthodes sont souvent appelées « réactives » »parce qu’elles déclenchent une solution seulement après que l’occurrence des accidents. Le document de l’AIPCR Analyse des accidents de la route, recommandations pour les ingénieurs routiers (2013) examine cette approche plus en détail.
Comme indiqué plus haut et au chapitre 10.4, ne compter que sur les données sur les accidents peut produire des situations où seulement une faible proportion des accidents peut potentiellement être abordée. Pour cette raison, il est recommandé d’utiliser une combinaison de données sur les accidents et de données d’autres natures pour aborder et traiter le risque.
Les approches réactives incluent typiquement les étapes suivantes :
Le présent chapitre se consacre aux deux premiers points: l’identification et le diagnostic. Il s’intéresse aussi à la manière dont les données sur les accidents sont utilisées et ses limitations. Les autres étapes seront couvertes par les chapitres 11 et 12. Une base fiable de données sur les accidents est un outil critique dans ce processus, pour pouvoir identifier et analyser les sites d’accidents (voir chapitre 5.3.2), et il existe aussi d’autres outils comme par exemple les outils d’Examen du Réseau et de Diagnostic de l’Analyse de Sécurité (Encadré 9 du chapitre 7).
Afin de traiter les causes des accidents, les données sur les accidents sont nécessaires pour fournir à l’autorité routière l’information utile. Le chapitre 5 donne plus d’information sur le recueil et l’utilisation des données sur les accidents, et les questions liées au besoin de données de qualité. Pour assurer une qualité adéquate, les données doivent être exactes, complètes (c’est-à-dire inclure toutes les caractéristiques), disponibles (c’est-à-dire accessibles à tous les utilisateurs) et uniformes (c’est-à-dire conformes aux définitions standard) (AIPCR, 2013).
La première source de données pour les initiatives de réduction des accidents est celle des rapports de police sur les accidents. Ces données devraient fournir les informations essentielles, au minimum sur la gravité de l’accident, le nombre de chaque catégorie de gravité des blessures (mortelles, graves, mineures, etc.). Selon l’AIPCR (2013), les autres informations importantes à collecter sont :
Le type d’accident est de particulière importance, parce qu’il constitue la base pour les critères de sélection des sites (voir les paragraphes suivants). Normalement, les types d’accidents sont divisés en groupes d’accidents ayant des attributs communs, tels que chocs frontaux ou accidents impliquant des piétons. Le chapitre 10.3.3 donne plusieurs exemples de types d’accidents.
Certaines limitations des données sur les accidents devraient être bien comprises avant de les utiliser aux fins d’analyse, notamment la sous-déclaration, l’information partielle ou les erreurs dans les données, ainsi que le fait que les données peuvent être subjectives et qu’il peut exister des délais dans leur inclusion. Le chapitre 5 donne plus de détail sur le recueil, l’analyse et l’intégration des données sur les accidents, ainsi que sur les types, la qualité des données et la sous-déclaration des accidents.
Le site d’un accident peut être un emplacement localisé (carrefour ou virage), un tronçon de route, une zone du réseau routier, ou un ensemble de sites dans tout le réseau montrant les mêmes caractéristiques d’accidents. Afin de pouvoir identifier les sites d’accidents, il est nécessaire d’avoir accès à une base de données contenant des informations suffisantes sur le lieu et les circonstances exactes des accidents survenus. Une fois que tous les sites ont été identifiés, des critères de sélection doivent être établis afin de choisir les sites d’intérêt aux fins d’analyse et de traitement.
Les paragraphes suivants donnent une vue générale des approches pouvant être utilisées pour identifier les sites d’accidents. De nombreux pays ont élaboré des recommandations guidant l’identification des sites à haut risque. En plus du Manuel de l’AIPCR (2013), d’autres sources offrent des informations, comme AASHTO (2010), Austroads (2009a), et RosPA (2007). La Banque africaine de Développement (2014a) a récemment publié des recommandations spécifiquement conçues à l’intention des PRFIs.
Il est important de considérer ce que sont les limites d’un site d’accident. Il doit exister un point défini de coupure, comme par exemple entre les accidents survenant à un carrefour et ceux qui sont considérés « à mi-chemin d’un pâté de maisons ». Pour analyser les données sur les accidents, il peut être nécessaire de regarder au-delà de ces limites prédéfinies. Par exemple, les accidents survenant dans les dix mètres d’une route à l’approche d’un carrefour peuvent être considérés comme étant survenus au carrefour. Cependant, il peut être intéressant de regarder au-delà de cette limite pour d’autres accidents pouvant être liés au carrefour (par exemple cent mètres). Le lieu de l’accident est aussi généralement identifié comme le point auquel un impact s’est produit. Cependant, ce point peut n’être en fait que le point final d’une séquence d’évènements. Les facteurs liés à la cause de l’accident peuvent avoir commencé plus en amont sur la route.
Le lieu de l’accident est parfois mal défini ou avec peu d’exactitude, et il est important de garder ceci à l’esprit lors de la comparaison des sites d’accidents. Il y a plusieurs méthodes pour déterminer le lieu d’un accident. Dans les zones construites, la pratique commune est de mesurer la distance depuis un carrefour, un embranchement ou un repère architectural. Cependant, dans les zones rurales et aussi dans certains pays en général, il peut arriver que les routes ne portent pas de nom et que les intersections soient peu nombreuses et éloignées. Si la technologie est disponible, le système de positionnement mondial (GPS) peut être utilisé pour relever les coordonnées de latitude et longitude. D’autres systèmes courants sont le système de référencement linéaire et le système lien-nœud, qui s’appuient tous deux sur les noms de route ou des indicateurs kilométriques fiables le long de la route. Pour plus de détail sur la définition du lieu de l’accident, voir le chapitre 5 et l’OMS (2010).
Avec le temps et en particulier dans les PRE, la tendance est allée vers l’évaluation de de zones plus larges, incluant des approches par itinéraire. En Europe, le terme gestion de la sécurité du réseau est utilisé pour englober une approche évaluant des tronçons longs, typiquement de 2 à 10 km (Scheemers et al, 2011). Les taux et la gravité des accidents sur ces tronçons sont supérieurs à ceux d’autres tronçons similaires. Divers outils ont été développés pour assister dans ce processus, et certaines des approches principales sont examinées ci-dessous.
Typiquement, une période de trois à cinq ans est choisie pour obtenir un échantillon suffisant de données, tout en minimisant les chances de changements du réseau routier. Dans certains PRFI, les sites à haut risque et les modèles d’accidents sur un même site peuvent commencer à prendre forme après un ou deux ans seulement. Une fois qu’un modèle clair a été établi, en particulier là où les accidents graves et mortels se produisent, il est plus important de mettre les traitements en œuvre dès que possible, que d’attendre jusqu’à la fin des cinq ans pour obtenir plus de données. Pour sélectionner la période de temps, il est important d’utiliser des années entières pour éviter les variations cycliques ou saisonnières dans les données d’accidents et de trafic. Il est également important d’être au courant de tout changement pouvant s’être produit dans les définitions des bases de données durant cette période.
Les financements sont généralement insuffisants pour traiter tous les sites identifiés. Des critères de sélection doivent donc être appliqués pour prioriser les sites d’accidents en vue d’investigations plus poussées et d’un traitement. Il est fortement recommandé que les types d’accidents graves et mortels soient utilisés pour sélectionner les sites, selon l’approche Système sûr (chapitre 4). Cependant, les accidents ne causant que des blessures mineures ne doivent pas être ignorés, parce qu’ils peuvent indiquer un potentiel d’accidents graves et mortels dans le futur. Le processus de sélection des critères varie selon l’objectif du projet et les types d’actions pouvant être considérées :
Il existe plusieurs méthodes pour identifier les sites d’accidents, en utilisant des mesures telles que la fréquence des accidents, les taux d’accidents et la gravité des accidents. AASHTO (2010) et Austroads (2011) donnent plus d’information sur cette question, qui aide à identifier les sites à haut risque, et en particulier ceux de plus forte gravité. Il est toutefois important de noter que bien que les points noirs peuvent être ciblés aux fins de traitement, ils ne représentent qu’une faible proportion du réseau responsable de décès et d’accidents graves. Dans de tels cas, des réponses dynamiques supplémentaires peuvent être nécessaires (chapitre 10.4).
Pour la plupart des méthodes décrites ci-dessous, les sites d’accidents doivent être sélectionnés selon les mêmes définitions du « lieu de l’accident » (par exemple, le même rayon ou la même longueur de route) et la même période temporelle afin de permettre une comparaison directe. Cependant, pour certaines méthodes, les données peuvent être normalisées pour permettre une comparaison directe (par exemple, conversion en accidents par kilomètre, accidents par an).
Au niveau le plus élémentaire, la représentation des sites d’accidents sur une carte peut fournir des informations sur les groupes d’accidents. En l’absence d’un système de base de données sur les accidents plus sophistiqué, ceci donne une rapide indication des sites d’accidents par fréquence. Le graphique 10.2 présente un exemple de sites d’accidents repérés sur une carte, dans une zone urbaine. Plus le cercle est grand, plus le nombre d’accidents est élevé. Parce qu’elles sont faciles à comprendre, les cartes sont un puissant moyen de présenter l’information aux parties prenantes principales, y compris le personnel technique, les décideurs politiques, les hauts exécutifs, les politiciens et le public, et peuvent constituer un puissant outil de plaidoyer.
Graphique 10. 2 : Carte de sites d’accidents en Nouvelle-Zélande Source : New Zealand Crash Analysis System (CAS).
Une classification par fréquence d’accidents (des nombres les plus élevés aux plus bas) peut former la base d’une liste initiale des sites d’accidents pour des évaluations plus poussées. Habituellement, un niveau de seuil est sélectionné, les sites dépassant ce seuil devant être évalués. Le seuil est souvent établi de manière arbitraire (par exemple, cinq accidents par an), mais il est préférable de prendre en compte le budget disponible et/ou un seuil concernant les accidents d’un type particulier (par exemples, trois piétons blessés par an).
Puisque le but de la gestion de la sécurité routière est de minimiser les accidents mortels et graves, il est préférable de sélectionner les sites à évaluer sur la base de la gravité des accidents. Une méthode commune d’identification des sites à haut risque pour prendre en compte la gravité des accidents est de prioriser les sites au moyen d’une analyse du coût des accidents. Une méthode efficace souvent utilisée est celle de l’équivalence avec les seuls dommages matériels (Equivalent Property Damage Only, EPDO), qui consiste à pondérer les accidents selon leur gravité. Par exemple, la pondération la plus élevée est affectée aux accidents mortels tandis que les accidents avec seulement des dommages matériels (Property Damage only, PDO) (ou les accidents mineurs si les données sur les PDO ne sont pas collectées) reçoivent la pondération la plus faible par accident. Bien que ces « critères » soient relativement simples à mettre en œuvre, ils fournissent une base cohérente pour créer une liste restreinte des sites méritant plus d’investigation. De même que pour la simple approche fondée sur la fréquence des accidents, les sites sont classés du coût le plus élevé au coût le plus faible, et un seuil est fixé pour les investigations.
Une méthode similaire et pourtant plus sophistiquée est celle de l’Indice de Gravité relative (Relative Severity Index, RSI), qui affecte des coûts d’accident normalisés aux accidents selon leur type et l’environnement routier (Tableau 10.1).
Tableau 10.1 : Coût des accidents selon l’Index de Gravité relative (RSI)
Coût des accidents pour l’état de Victoria, Australie | ||
---|---|---|
Un seul véhicule | Zone urbaine | Zone rurale |
Piéton heurté en traversant la route
| 166,300 | 183,800 |
Heurter un obstacle permanent | 162,400 | 163,400 |
Heurter un animal sur la route
| 102,300 | 79,500 |
Sortie de route, tout droit
| 119,900 | 146,100 |
Sortie de route, tout droit, heurter un objet
| 177,500 | 206,600 |
Perte de contrôle, sur la route, tout droit
| 98,100 | 115,700 |
Sortie de la route, dans un virage
| 146,900 | 175,900 |
Sortie de la route, dans un virage, heurter un objet
| 191,700 | 219,700 |
Perte de contrôle, sur la route, dans un virage
| 120,100 | 112,110 |
Deux véhicules | Zone urbaine | Zone rurale |
Carrefour (approches adjacentes)
| 124,000 | 173,200 |
Choc frontal
| 240,300 | 341,600 |
Tourner en sens contraire
| 132,700 | 168,600 |
Choc arrière
| 64,200 | 109,700 |
Changement de voies
| 88,500 | 132,800 |
Changement de voies
| 79,900 | 104,600 |
Voies parallèles, demi-tour
| 124,600 | 135,600 |
Demi-tour, virage en U ou à travers
| 93,200 | 129,100 |
Véhicules quittant la chaussée | 97,000 | 138,000 |
Dépassement dans la même direction | 112,500 | 202,700 |
Heurter un train | 384,400 | 559,100 |
Source: Adapted from Andreassen (2001).
Ces coûts sont calculés sur la base de l’analyse de la gravité des accidents de chaque type Il est important de noter, cependant, que les types d’accidents et les coûts différeront entre pays. Cette méthode prend en compte la gravité des accidents, mais accorde moins d’importance aux sites où un seul accident mortel peut fausser les résultats du fait de son coût très élevé. Un tel résultat peut provenir d’un événement « aléatoire » qui ne sera jamais répété. Ceci est plus probable sur les routes ou réseaux routiers à faible circulation, où les accidents mortels sont très peu fréquents. Les sites, routes ou zones où des évènements de forte gravité sont susceptibles de se répéter dans le futur sont en revanche plus intéressant à considérer. En utilisant les coûts moyens des accidents par type d’accident, les accidents survenu, un coût peut être affecté à chaque site, et les sites sont ensuite classés par coût total des accidents.
Dans certains cas, des méthodes d’identification multiple sont utilisées. Elles combinent deux ou plusieurs des méthodes identifiées ci-dessus. D’autres critères de sélection sont aussi disponibles. Certains sont assez complexes et utilisent des modèles de prédiction des accidents et la méthode empirique de Bayes (AASHTO, 2010). La méthode de Bayes est actuellement considérée comme l’une des plus robustes approches à la sélection des sites d’accidents. Cependant, d’autres approches identifiées ci-dessus peuvent produire des résultats satisfaisants, en particulier si une pondération adéquate est appliquée aux accidents graves et mortels.
Les sites d’accidents peuvent être évalués en utilisant l’analyse statistique pour identifier ceux qui montrent un nombre d’accidents statistiquement significatif durant une période donnée. Ceci peut être utile pour distinguer les sites avec des taux anormalement élevés d’accidents et ceux où se produit simplement une variation aléatoire.
Le processus d’identification des accidents permet de sélectionner des sites qui seront soumis à investigation. Une liste restreinte de sites candidats à traitement peut être établie en utilisant n’importe laquelle des méthodes mentionnées ci-dessus. Le financement disponible limitera le nombre de sites pouvant être traités, et donc les sites de la liste restreinte devraient être évalués au moyen d’inspections sur site et d’un diagnostic initial des accidents pour identifier où des traitements économiques peuvent être mis en œuvre.
Diagnostiquer le problème est fondamental pour sélectionner des solutions efficaces à un problème de sécurité. Pour bien comprendre le problème, il est nécessaire de considérer les éléments suivants :
Le diagnostic des problèmes de sécurité sur un site d’accidents est un processus en quatre étapes.
Ces étapes sont examinées plus en détail ci-dessous.
Les données sur les accidents sont l’information la plus importante, et devraient être disponibles auprès de la police ou de l’autorité routière, laquelle peut aussi avoir des informations sur les volumes de trafic et l’histoire du site, comme par exemple le plan d’aménagement, tout changement dans les formes de circulation ou l’utilisation des terres, et tout souci passé ou actuel exprimé par la collectivité locale ou les parties prenantes.
Une manière efficace d’identifier les séries/regroupements de certains types d’accidents ou d’autres facteurs communs à un site est de présenter les données dans un diagramme de fréquence, une matrice de facteurs, ou un diagramme de collisions pour les différents types d’accidents. Une brève description de chacune de ces méthodes d’analyse suit.
Examiner les types d’accidents
Typiquement, les accidents sont catégorisés dans une base de données sur les accidents selon un certain type de codification des types d’accidents. L’AIPCR (2013) a établi une classification commune en dix regroupements, comme suit :
Certains pays peuvent utiliser plus ou moins de regroupements de types d’accidents. Étant donné l’importance des accidents motocyclistes graves et mortels dans de nombreux pays, des dispositions devraient être prises pour l’enregistrement des détails de ces accidents. Typiquement, ceci est enregistré par type de véhicule, en tant que variable additionnelle à celles présentées ci-dessus.
Le type d’accident peut être caractérisé en termes des parties impliquées, collision et manœuvre piéton/véhicule juste avant l’accident. Chaque variable est codée comme un nombre à deux chiffres qui représente un seul type spécifique d’accident. Pour les accidents appartenir à plusieurs types, le nombre correspondant de variables devrait être sélectionné.
Un diagramme ou histogramme simple de fréquence peut être utilisé pour montrer la distribution des accidents et déterminer si des tendances dans les accidents sont en train d’émerger. Ceci peut être utile pour une évaluation initiale, mais ne devrait pas constituer du fait de sa simplicité une alternative à la matrice de facteurs ou au diagramme de collisions.
Construire une matrice de facteurs
Une matrice de facteurs pousse l’approche de tableau de fréquence un pas plus loin, et considère les facteurs additionnels tels que la gravité des accidents, l’année de l’accident, le sens de circulation, la catégorie d’usagers, le type de collision, la surface de la route et les conditions d’éclairage, et l’heure et la date de l’accident (Graphique 10.3).
Graphique 10.3 : Exemple de matrice de facteurs; le Système d’Analyse des Accidents, Nouvelle-Zélande
Un diagramme de collision est une représentation illustrée des accidents survenus sur un site (Graphique 10.4). Ceux-ci sont épinglés sur un schéma de carrefour ou du tronçon de route et montrent le type d’accidents (au moyen de symboles normalisés), le sens de circulation et d’autres informations pertinentes (par exemple l’heure et la date de l’accident, les conditions climatiques et d’éclairage). Plusieurs logiciels permettent la création automatique de ces diagrammes.
Graphique 10.4 : Exemple de diagramme de collisions en Allemagne Source : AIPCR (2013).
Le but principal de ces types de représentation des données est d’identifier les facteurs contributifs communs aux accidents se produisant au même endroit. Il est à noter que normalement, ce sont toujours plusieurs facteurs qui causent un accident. S’il n’existe apparemment aucun type dominant d’accident émergeant des données, il peut être très difficile de traiter le site, parce qu’il est très difficile pour un seul traitement de solutionner tous les différents problèmes de l’endroit (la gestion de la vitesse peut être l’exception à cette règle, en particulier pour éliminer les accidents très graves). Il peut parfois être utile d’étudier les rapports de police pour plus de détails sur les circonstances de l’accident, ce qui peut aider à mettre en lumière un facteur causal commun.
Le but principal d’une inspection est d’identifier toute difficulté environnementale ou de circulation pouvant contribuer aux accidents à un même endroit. Une inspection du site peut permettre à l’équipe d’investigation de l’accident d’examiner physiquement le site du point de vue de l’usager et d’observer les comportements de circulation. Des données supplémentaires peuvent de plus être collectées, telles que les vitesses véhiculaires, les caractéristiques de la route, les restrictions de stationnement et limitations de vitesse, qui peuvent permettre à l’équipe d’évaluer toute autre caractéristique de l’environnement routier immédiat.
Il est recommandé, quand cela est possible, que l’évaluation soit faite par une équipe plutôt que par un individu. Une approche en équipe amènera généralement une gamme plus diverse d’opinions et d’idées, qui sont plus faciles à générer par des discussions en groupes. Les membres de l’équipe peuvent inclure un expert formé en ingénierie de sécurité routière et en investigations sur les lieux d’accident, des officiers de police et/ou des membres du personnel de l’autorité routière, en particulier ceux connaissant bien le site. Le groupe peut aussi inclure un nouveau venu en matière d’investigation des accidents, mais ayant dans l’idéal reçu un certain degré de formation. Cette approche est essentielle pour assurer le développement de qualifications pour les futures investigations sur les accidents. Les recommandations sur les Facteurs Humains (chapitre 8) devraient être prises en considération dans toute investigation sur les sites d’accidents.
Il est également recommandé que les analyses de données décrites ci-dessus (par exemple, la production d’une matrice de facteurs ou d’un diagramme de collisions) soient communiquées à l’équipe d’investigation des accidents, avant toute inspection de site et sous la forme d’un rapport préliminaire.
Pour pleinement comprendre l’expérience de l’usager, une inspection faite en conduisant sur le site devrait être réalisée. Il est souvent utile de sélectionner une personne ne connaissant pas la zone pour conduire, de manière à ce qu’elle puisse faire l’expérience du site comme le ferait pour la première fois un usager. Il sera souvent nécessaire de conduire plusieurs fois à travers le site. Une inspection à pied sera aussi nécessaire pour observer de plus près le comportement de l’usager de la route et les conditions du site. Ceci permettra aussi la collecte de photos, et de notes, et de documenter toute conclusion tirée de l’inspection. Il est parfois également utile d’inspecter le site à différentes heures du jour ou jours de la semaine pour vérifier la variabilité des flux de circulation ou des conditions d’éclairage et de visibilité. Par exemple, si de nombreux accidents se sont produits durant la nuit, une inspection de nuit est essentielle.
Le tableau 10.2 dresse une liste des possibles facteurs contributifs aux différents types d’accidents (y compris ceux contribuant le plus aux accidents graves et mortels) qui devraient être considérés lors de l’inspection du site. Bien qu’elle ne fasse pas partie de la liste, la vitesse est reliée à la fréquence et à la gravité de tous les accidents.
Accidents à angle droit (carrefours) | Accidents en tournant et avec des véhicules en sens inverse |
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Accidents en sortie de route | Chocs frontaux |
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Accidents motocyclistes | Accidents cyclistes |
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Accidents piétons | Collisions arrière tout droit |
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Collisions avec des objets fixes | Accidents aux passages à niveau ferroviaires |
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Collisions avec un véhicule à l’arrêt | Collisions avec des véhicules faisant demi-tour |
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Changements de voie et manœuvres | |
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Avant de terminer l’analyse d’un rapport, il faut se demander si des informations supplémentaires sont nécessaires. Par exemple, si l’analyse de l’accident et/ou les inspections du site suggèrent des problèmes de dérapage, des mesures d’adhérence devraient être faites.
Exemple d'aménagement à faible coût par marquage au sol en Pologne
Un rapport résumé devrait être préparé de manière à informer clairement ses lecteurs sur les conclusions tirées de l’analyse. Ceci constituera la base sur laquelle les traitements seront considérés et sélectionnés. Il devrait inclure une description du site ou de la zone, les résultats de l’analyse des données (par exemple, diagrammes d’accidents), des observations sur les inspections du site y compris les possibles facteurs contribuant aux accidents, des commentaires sur tout facteur commun identifié comme contributif aux accidents, et les possibles mesures correctrices (chapitre 11.3).
Comme déjà mentionné ci-dessus, il existe des méthodes établies qui aident à détecter, prioriser et traiter les sites à haut risque d’accidents et se fondent uniquement sur l’historique des accidents. Cependant, bien que ces sites méritent financement et attention, ils ne représentent qu’une faible proportion du réseau responsable des accidents mortels, en particulier dans les pays à revenu élevé. Par exemple SWOW (2007) rapporte que rien qu’aux Pays-Bas de 1987 à 1989, 10,5% seulement de tous les accidents mortels ou causant l’hospitalisation se sont produits sur des sites points noirs. De 1997 à 1999, le pourcentage a baissé à 6%, et de 2004 à 2008, à 1,8% seulement. Cette étude a conclu qu’un nombre croissant d’accidents graves se produit sur des sites qui ne sont pas des points noirs.
Dans les PRFI, des données exactes sur les accidents ne sont pas toujours disponibles, et donc l’approche d’évaluation du risque fondée sur celles-ci peut ne pas être possible. Aux États-Unis, il a été noté que certains états ont éprouvé des difficultés à atteindre les objectifs de sécurité en utilisant cette approche d’investigation limitée aux sites à haut risque (Preston et al, 2013). Dans de tels cas, des réponses proactives supplémentaires sont nécessaires pour aider à évaluer et à traiter le risque. Les approches proactives sont plus récentes que celles fondées sur l’évaluation des accidents, mais elles évoluent et s’améliorent avec le temps, et couvrent toute une gamme de techniques d’évaluation et de traitement du risque.
Les actions proactives de sécurité peuvent être utilisées pour éviter de futurs accidents en :
Il est à noter que les actions proactives, bien qu’elles soient une mesure préventive, ne devrait pas se limiter à une simple vérification du respect des normes de conception. Souvent, le projet peut respecter les normes mais peut ne pas être sûr du fait de la configuration ou de l’adoption de minima sur certains éléments de la route.
Les paragraphes suivant examinent plusieurs types de vérification de la sécurité routière, qui sont généralement exécutées à différents stades de la mise en œuvre d’un projet routier. Ces vérifications peuvent se faire dans le cas d’une nouvelle route, de la modification d’une route ou d’une caractéristique existante, et même durant l’exploitation habituelle de la route.
Bien que l’attention principale de ce chapitre se porte sur l’identification du risque et les outils utilisés pour cela, certaines des approches décrites aident aussi à identifier des solutions ou même à prioriser les interventions (chapitre 11). Des considérations dépassant le stade de l’identification du risque y apparaissent quand cela est pertinent. De ce fait, le présent chapitre devrait être lu en parallèle avec le chapitre suivant, consacré à la sélection et à la priorisation des traitements.
Les différents types de vérification de la sécurité routière sont :
Il est à noter que dans certains pays, l’inspection de sécurité des routes existantes est parfois appelée un audit des routes existantes, les deux termes se référant à un processus similaire.
Le but de chacune de ces vérifications est similaire, mais la distinction principale se trouve dans le calendrier et la portée de ces procédures (Graphique 10.5). Les programmes d’évaluation des routes sont typiquement utilisés pour évaluer les routes en exploitation, mais de récents développements ont élargi leur utilisation pour y inclure l’évaluation des projets.
Étant donné le calendrier et la portée différents de chaque procédure, toutes peuvent être entreprises en parallèle. Chaque pays décide quelles procédures adopter. Chacune possède différents avantages et faiblesses, qui sont examinées dans les prochains paragraphes.
Graphique 10.5 : Séquence des vérifications de la sécurité routière durant les étapes de conception
Selon l’AIPCR (2012a), certains des objectifs et des avantages principaux de chacune de ces vérifications de la sécurité sont :
Les différents types de vérification de la sécurité routière sont détaillés dans plusieurs recommandations nationales, dont certaines sont disponibles au niveau international. Des exemples de recommandations sont donnés dans le reste de chapitre.
D’autres outils d’évaluation de la sécurité durant les étapes de planification et de développement sont décrits au chapitre 9.4. Certains d’entre eux sont conçus pour être utilisés par des praticiens avec peu ou pas d’expérience en sécurité routière, pour identifier et aborder le risque dès les premiers stades du développement des programmes et des projets.
Les vérifications de la sécurité suivent généralement des procédures de gestion similaires, présentées dans le graphique 10.6 qui montre aussi les responsabilités à chaque étape du projet.
Graphique 10.6 : Étapes de la vérification de la sécurité et répartition des responsabilités Source: Adapté de Austroads (2009b).
L’évaluation de l’impact sur la sécurité routière se fait pour les projets d’infrastructure au stade initial de planification, avant l’approbation du projet d’infrastructure. Elle indique les considérations de sécurité routière qui contribuent à la sélection de la solution proposée et fournit l’information pertinente nécessaire pour l’analyse coûts-bénéfices des différentes options évaluées. Ceci permet de comparer l’impact de différentes variantes de route ou de trafic sur les résultats de la sécurité, pour une nouvelle route ou la modification d’une route existante. Ce processus doit être conduit en premier, dès le stade initial de planification du projet pour aider à la sélection du projet, et doit être ensuite continuellement examiné durant la phase d’avant-projet. L’évaluation de l’impact sur la sécurité précède généralement l’audit de sécurité routière (chapitre 10.4.2), mais c’est un processus complémentaire. Comme déjà indiqué au chapitre 9.3.2, l’évaluation de l’impact est exigée pour tous les projets d’infrastructure du Réseau Transeuropéen, selon la directive de l’Union européenne.
Selon Eenink et al (2008), une évaluation de l’impact sur la sécurité comporte cinq étapes.
Un rapport final détaillé devrait être préparé à la fin de l’évaluation de l’impact sur la sécurité routière, et contenir :
Lors d’une évaluation de l’impact sur la sécurité routière, il est important de se poser certaines questions. Les objectifs de la politique de sécurité routière sont-ils réalistes ou ambitieux ? Existe-t-il d’autres schémas qui n’ont pas encore été considérés ? Les schémas sélectionnés sont-ils adéquats, non seulement en termes de sécurité, mais aussi en d’autres termes tels que les impacts sur l’environnement ou l’accessibilité ou la connectivité pour tous les usagers ? Existe-il des problèmes associés, tels que le manque de soutien de la part de la population ?
Il est important de noter que l’évaluation de l’impact sur la sécurité routière ne remplace pas l’audit de sécurité routière. Elle constitue simplement une étape préliminaire en vue de la sélection de la variante la plus avantageuse pour un projet. Les audits de sécurité sont essentiels pour assurer, pendant le processus détaillé de conception et de construction, que tous les dangers sont identifiés, ce qui sera examiné en détail au chapitre 10.4.2.
La partie C du Manuel sur la Sécurité des Autoroutes (AASHTO, 2010, voir Encadré 10.3) informe sur les modèles de prédiction des accidents pour différents types de routes, y compris les routes rurales à deux voies, les routes à double sens de circulation, les autoroutes rurales multivoies, et les artères urbaines et suburbaines. Il couvre les tronçons à voies séparées ou non et les carrefours avec divers nombres de branches et dispositifs de contrôle. Ceci peut être utilisé pour prédire la fréquence moyenne attendue d’accidents, à partir des volumes de trafic et des caractéristiques de la route.
Le Manuel sur la Sécurité des Autoroutes (AASHTO, 2010 et http://highwaysafetymanual.org) a été élaboré pour aider à intégrer les questions de sécurité dans la prise de décisions sur la planification, la conception, l’exploitation et l’entretien des routes. Plusieurs outils ont aussi été développés pour soutenir cet objectif, y compris l’Analyste de Sécurité (chapitre 9.4), le Centre d’Information sur les FMA (Paragraphe 11.3) et le Modèle interactif pour la Conception d’Autoroutes sûres IHSDM, Encadré 9.10).
L’IHSDM est en ensemble de logiciels permettant d’évaluer les effets sur la sécurité et l’exploitation des décisions sur la conception géométrique (à partir des plans du projet), qui sont des outils avancés d’analyse et de prédiction, et considérés comme meilleure pratique par de nombreux professionnels de la sécurité (par exemple Schermers et al, 2011).
Ces outils se fondent sur une recherche robuste et variée sur les modèles de prédiction et les facteurs de modification des accidents (FMA) développés principalement aux États-Unis durant les 15 ou 20 dernières années. L’IHSDM est particulièrement utile pour sélectionner les options de sécurité à partir d’une liste de possibilités et pour comprendre le compromis de sécurité qui peut résulter de l’adoption de normes de conception minimum due aux contraintes de site ou aux économies sur les coûts de construction. Les modèles et les FMA sont continuellement affinés à mesure que les conclusions de nouvelles recherches sont disponibles. L’IHSDM inclut des procédures de calibrage qui permettent de l’adapter à chaque état de l’union américaine ou chaque pays, et ont été mises à l’épreuve dans certains pays d’Europe et en Australasie.
Le Programme international d’Évaluation des Routes (iRAP) a développé une technique pour classer les projets par étoiles. Bien qu’il ne constitue pas strictement une évaluation de l’impact, ce processus a un objectif similaire (Étude de cas du chapitre 9.4).
© ARRB Group
L’audit de sécurité routière est défini comme la vérification technique formelle et indépendante d’un schéma de conception et de construction d’une route, destinée à identifier toute caractéristique peu sûre ou tout danger potentiel et à recommander des mesures correctives à n’importe quelle étape, de la planification jusqu’au début de l’exploitation (AIPCR, 2011; ETSC, 1997; NRA, 2012).
L’objectif principal d’un audit de sécurité routière est d’identifier et de traiter les problèmes de sécurité routière. Un audit de sécurité n’est pas une vérification par rapport aux normes de conception, mais un outil de détection des dangers. L’audit d’un projet routier doit être exécuté dans toutes les conditions d’exploitation et prendre en compte toutes les catégories d’usagers de la route.
L’audit de sécurité routière est conçu pour être une mesure économique pour identifier et traiter les problèmes de sécurité. Plus tôt il est effectué et plus grands sont ses avantages, parce que l’ajustement des plans de conception peut être une option moins coûteuse que la modification des caractéristiques de sécurité après construction. Plusieurs études ont documenté ses avantages, comme par exemple Macaulay et McInerney (2002), qui ont estimé qu’un échantillon d’audits au stade de la conception a un rapport bénéfice-coût (RCB) entre 3 :1 et 242 :1 si toutes les recommandations des audits individuels sont mises en œuvre. De plus, 75% des recommandations ont un RCB plus grand que 10, et 90% des recommandations ont un RCB plus grand que 1.
Pour les PRFIs, les audits de sécurité routière (ainsi que d’autres méthodes proactives) sont très importants, parce qu’ils offrent une opportunité de développer une culture de la sécurité routière parmi les responsables de la planification et de la fourniture d’infrastructure routière. Sur cette seule base, il existe déjà un très fort argument pour le développement d’un processus formalisé d’audits de sécurité routière pour tous les grands projets d’infrastructure. L’Encadré 10.4 donne un exemple de certains des avantages supplémentaires qui peuvent être obtenus de grands projets d’audits de la sécurité routière dans les PRFI.
Le problème : il était nécessaire d’établir des corridors de transport sûrs et efficaces le long du Corridor International de transit depuis l’Europe occidentale jusqu’à la Chine.
La solution : les normes pertinentes (y compris en matière de sécurité routière) et les données disponibles sur les accidents de la route ont été examinées. La conception des tronçons pas encore construits ou finalisés a été vérifiée (« auditée »), et d’autres tronçons aux stades pré-et post-ouverture au trafic ont été inspectés. Le processus a fait appel à 16 participants de différentes institutions liées aux Ministères des Transports et des Affaires intérieures. Les recommandations de l’AIPCR sur l’audit de sécurité routière et les inspections de sécurité routière ont servi de fondation pour ces travaux, mais en étant adaptées au contexte local. Les principales déficiences identifiées étaient les longues lignes droites monotones causant fatigue et excès de vitesse, les accotements instables et les installations passives de sécurité, les virages en épingle à cheveux dangereux, le manque de sécurité pour les piétons et les arrêts de bus à de nombreux carrefours peu sûrs avec de petites routes le long de la route principale. Il a été recommandé de les reconstruire sous la forme de carrefours giratoires avec arrêts de bus et passages piétons, en tant que solution sûre et peu coûteuse.
Passage piéton sur un tronçon à quatre voies de l’autoroute au sud de Kysylorda
Dans le cadre de ces travaux, plusieurs lois pertinentes ont aussi été examinées et des recommandations d’améliorations ont été formulées concernant la régulation des audits de sécurité routière et les inspections de sécurité. La gestion de la circulation sur les sites en travaux a aussi été examinée.
Les résultats : les résultats de ces travaux comprennent des recommandations d’améliorations de la sécurité au long de cette route, l’élaboration de recommandations adaptées aux conditions locales, des recommandations d’amendements aux lois pertinentes, et la formation de nouveau personnel. Un autre résultat clé est que le client a appris durant la formation et les discussions que la sécurité routière n’est pas seulement le problème des usagers de la route, mais qu’il est important d’inclure la police de la circulation et les gestionnaires de l’entretien des routes dans les discussions sur le sujet. Il a aussi été compris que sans l’identification proactive des déficiences de la sécurité routière, des améliorations seraient nécessaires avec les petits budgets d’entretien.
Source : Hans Vollpracht, Association mondiale de la Route (AIPCR)
Il existe de nombreux guides sur les audits de sécurité routière. L’AIPCR a développé le Guide pour les audits de sécurité routière (2011) disponible à : www.piarc.org/ressources/publications/7/6852,WEB-2011R01-TM.pdf ), qui montre une procédure complète pas-à-pas pour conduire un audit de sécurité routière, et fournit des listes de vérification détaillées pour les autoroutes et les routes principales urbaines et interurbaines à chacune des étapes du projet (étude de faisabilité, avant-projet, projet détaillé, pré- et post- ouverture au trafic). D’autres guides utiles existent dont le Road Safety Audit Guidelines (FHWA 2006 et son site Internet http://safety.fhwa.dot.gov/rsa/) et le Guide on Road Safety Audit d’Austroads (2009b). La Banque africaine de Développement (2014b) a publié des recommandations spécifiquement conçues pour utilisation dans les PRFI.
Les audits de sécurité routière peuvent être entrepris à tous les stades suivants :
L’audit de sécurité routière peut aussi être effectué dans d’autres circonstances, par exemple pour évaluer la sécurité de la gestion proposée pour des sites de travaux, en particulier dans les contextes de forts volumes de circulation ou complexes.
Comme indiqué au chapitre 9.3.2, la directive de l’Union européenne sur la gestion de la sécurité des infrastructures routières stipule que l’audit de la sécurité routière doit être effectué pour tous les projets d’infrastructure du réseau de transport transeuropéen, et suggère qu’il devrait se faire aussi sur toutes les routes nationales. La Directive stipule aussi que de tels audits doivent être effectués aux stades de l’avant-projet, de la conception détaillée, en pré- et post-ouverture, et au début de l’exploitation.
Le guide de l’AIPCR (2011) identifie et détaille trois parties dans le processus d’audit : le démarrage, l’exécution et l’achèvement.
La sélection de l’équipe d’audit avec les qualifications appropriées est un aspect important de la phase de démarrage du processus d’audit. Il est essentiel que l’équipe soit indépendante de l’équipe de projet. La taille et la composition de l’équipe varieront selon la taille et la complexité du projet et l’étape de l’audit entrepris. Il est important que les membres de l’équipe, et plus particulièrement son chef de file, aient la formation nécessaire. De nombreux pays ont développé des exigences de formation formelle (parfois mentionnée dans les recommandations nationales sur l’audit de sécurité) et des registres des auditeurs qualifiés. Pour les petits projets, il peut être possible pour un seul auditeur d’effectuer un audit de sécurité routière, ce qui, bien que n’étant pas l’idéal, est certainement préférable à pas d’audit du tout.
Dans les PRFI, la disponibilité et la formation d’auditeurs convenablement qualifiés est un défi important. La capacité peut être augmentée à court terme en formant le personnel clé (soit dans son propre pays, soit en suivant des stages de formation reconnus dans un PRE). À moyen terme, il est souhaitable de doter le pays des moyens de former les auditeurs. Ceci nécessitera typiquement une approche à plus long terme de « formation de formateurs », selon laquelle un petit nombre d’experts recevront une formation avancée et un soutien continu. Ces experts développeront ensuite par l’expérience les compétences pour former de nouveaux auditeurs.
De nombreux pays ont développé des listes de vérification pour les audits de sécurité routière. Ces listes fournissent des exemples et des rappels des thèmes devant être abordés par les équipes lors de l’audit. Elles sont utiles pour assurer que les thèmes principaux sont considérés, mais il ne faut pas oublier que chaque situation diffère, et que les listes ne devraient donc être utilisées que comme guides. Ceci est dû au fait que d’autres thèmes peuvent être identifiés durant l’audit, qui ne sont pas anticipés dans la liste de vérification. Différentes listes ont été développées pour les différentes étapes du processus d’audit, ou pour des types spécialisés d’audit (par exemple, audits piétons et cyclistes).
L’une des critiques faite dans le passé aux audits de sécurité routière est que leurs recommandations ne sont pas mises en œuvre. Il est donc essentiel qu’il y ait un processus pour conclure l’audit, comprenant une réponse formelle au rapport sur chacune des actions recommandées. Dans le cas où les recommandations n’ont pas été suivies, il convient d’en indiquer les raisons ainsi que la stratégie d’atténuation qui sera mise en œuvre pour aider à réduire le risque au minimum. Cette réponse écrite au rapport d’audit doit faire partie de la documentation du projet.
Harwood et al (2014) pensent que l’audit est une manière coûteuse d’identifier les interventions, et qu’il est possible de passer à côté d’interventions qui pourraient être ajoutées, et qui sont un moyen économique d’améliorer la sécurité. De plus, l’évaluation économique des interventions n’est généralement pas incluse, à moins qu’elle ne soit ajoutée au processus normal d’audit. Du côté positif, ils indiquent que l’audit est une manière utile d’identifier les éléments de sécurité manquants ou en mauvais état, et qu’il constitue un bon moyen de réunir un personnel expert pour examiner la sécurité. Ils ont aussi identifié les avantages des examens sur le terrain (c’est-à-dire des inspectons de site), un processus qui n’est pas toujours inclus dans les autres méthodes d’évaluation du risque.
Il est important de noter que le processus d’audit de sécurité existe depuis de nombreuses années. Il a été mis en œuvre pour la première fois à la fin des années 80, et une documentation a été rédigée dans les années 90 dans de nombreux pays. Cependant, il n’y a eu que peu d’ajustement dans les dernières années du processus d’audit pour y inclure les concepts de Système sûr. Dans certains pays, l’attention a changé pour se porter sur une meilleure maitrise des questions liées à l’élimination des décès et des blessures graves, bien que ceci ait toujours fait partie intégrante du processus d’audit. L’attention reste principalement portée sur les déficiences de la route, et les solutions visent généralement à améliorer l’environnement routier. Cette approche peut être adéquate dans de nombreuses situations, mais plusieurs pays, en vue d’adopter l’approche fondée sur le Système sûr, ont développé des cadres d’évaluation pouvant être considérés comme des audits de Système sûr. Ces audits diffèrent des audits traditionnels parce qu’ils se concentrent sur la réduction des accidents mortels et graves et/ou choisissent une approche plus holistique des problèmes (et des solutions) en fonction de chacun des piliers du Système sûr (par exemple les problèmes liés à la sécurité des usagers tels que la fatigue, ou les risques d’accidents liés à la vitesse). L’Encadré 5 présente un tel exemple.
Un autre exemple (Encadré 10.5) provient du ministère de la Planification, des Transports et de l’Infrastructure (DPTI) de l’Australie méridionale. Il impliquait une évaluation complète selon le Système sûr d’un projet majeur, et a été utilisé avec succès comme argument de plaidoyer auprès du gouvernement pour obtenir un financement. L’approche diffère d’un audit typique parce qu’elle évaluait les aspects relatifs aux véhicules et au comportement en plus des aspects typiques d’infrastructure. Il est intéressant de noter que certains des aspects relatifs aux véhicules et aux comportements ont pu être abordés au travers de changements apportés à l’infrastructure (voir aussi le chapitre 8.2).
Dans un développement plus récent des audits quantifiés ont été effectués pour déterminer l’impact de la nouvelle conception. Des modifications peuvent être apportées à cette conception et des améliorations probables de la sécurité peuvent être déterminées. Le chapitre 9.4 donne un exemple de cette approche.
Le problème : en 2007, le Commissaire aux routes principales d’Australie occidentale a ordonné que l’objectif de sécurité pour un grand projet routier soit de zéro accident dans les cinq premières années d’exploitation, et que la condition minimale de satisfaction soit une réduction de 10% comparée aux meilleures pratiques pour le même contexte routier. Comme les meilleures normes de conception du moment et des processus d’audit de la sécurité devaient être appliqués (comme dans la pratique normale), il n’était pas clair comment la sécurité routière pouvait être encore améliorée.
La solution : une nouvelle approche, concentrée sur les risques d’accidents graves et mortels a été développée et appliquée. Ceci a fourni une approche structurée pour l’évaluation du projet par rapport aux objectifs de Système sûr. Une caractéristique importante de ce cadre est qu’il cherche à limiter les forces, dans l’éventualité d’un accident, à un niveau supportable par le corps humain. Une autre caractéristique notable est la reconnaissance du fait que les autorités routières doivent utiliser leurs ressources limitées de la manière la plus efficace. Pour cela, le cadre comporte une « hiérarchie de contrôle » pour les traitements. Cette approche structurée a signifié une plus grande utilisation majeure de solutions durables (telles que les barrières de sécurité avec câbles métalliques) en vue d’assurer des taux élevés de protection des usagers en cas d’accident.
Les résultats : bien que le processus ait démarré durant la construction du projet (ce qui limitait les opportunités de l’améliorer), une baisse de 28,6% du taux des accidents graves et mortels, par rapport à la meilleure pratique antérieure en Australie occidentale, a été enregistrée.
En plus d’améliorer la sécurité routière, l’approche peut améliorer d’autres résultats du projet. Par exemple, le second projet a enregistré une économie de presque 10% du budget du projet ainsi qu’une réduction significative de l’empreinte environnementale.
Source : Marsh, (2012).
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Le Guide des inspections routières pour les vérifications de sécurité sur les routes existantes (AIPCR, 2012a) définit l’inspection de la sécurité routière (ISR) comme un examen systématique sur place d’une route existante dans le but d’identifier les conditions, défauts et déficiences pouvant causer un accident grave ou mortel. L’ISR doit être effectuée par une équipe ou une personne qualifiée et indépendante possédant l’expérience adéquate. Elle est spécifique aux routes existantes et ne convient pas pour les routes en construction. Elle constitue aussi une méthode dynamique parce qu’elle permet la prévention des accidents à travers l’identification des problèmes potentiels de sécurité, au lieu de répondre aux accidents enregistrés lors d’une investigation sur les sites d’accidents.
Les inspections de la sécurité routière sont utiles parce qu’elles peuvent :
Le guide de l’AIPCR (2012a) identifie comme suit les sujets à couvrir durant une ISR, ainsi que certaines des questions qu’une équipe de vérification de la sécurité prendrait en considération durant une investigation :
L’inspection de la sécurité routière sur une route existante comporte quatre étapes :
Dans les dernières années, le composant d’étude sur le terrain de l’inspection de la sécurité routière a évolué. Des véhicules d’enquête peuvent être équipés avec des dispositifs automatiques pour mesurer et enregistrer les éléments de conception et de gestion de la route (par exemple, tracé en plan et profil en long, dévers, état du revêtement, présence d’obstacles sur les accotements, équipements de la route, etc.). Cette information peut être évaluée pour détecter des problèmes avec les routes, telles que des anomalies de courbure (par exemple, des virages serrés inattendus), une surface de chaussée glissante ou la présence d’obstacles sur les accotements. Le Paragraphe 5.4 renseigne sur la collecte de ces données.
L’ISR d’une route existante vise à détecter les caractéristiques pouvant contribuer à de futurs accidents, et l’information sur les accidents passés n’est pas toujours un indicateur de ceci. L’étude des accidents et les programmes de prévention examinent des caractéristiques contribuant aux accidents déjà survenus et à leur gravité. L’ISR ne nécessite pas de données sur les accidents, mais elle peut être un outil utile pour fournir des recommandations en vue de la priorisation des routes à inspecter. Par exemple, si le financement de l’autorité routière ne permet que l’inspection de certaines routes sélectionnées, la priorité peut être donnée à celles montrant le plus grand nombre d’accidents par kilomètre, ou d’accidents par volume de trafic. Le Paragraphe 11.4 offre plus de détail sur la priorisation des politiques, des projets et des traitements. Les inspections de la sécurité routière peuvent être un complément aux approches réactives telles que les investigations sur les sites à haut risque.
Parfois l’ISR est effectuée pour des thèmes spécifiques, par exemple pour identifier des problèmes concernant les piétons et les cyclistes. Cette approche a été développée encore plus en France, où une méthode impliquant une bicyclette spécialement équipée a été établie pour évaluer le réseau cyclable. Le lien Internet suivant informe sur ce sujet.
http://www.ouest.cerema.fr/IMG/pdf/120925_Securite-routiere_Velaudit_cle05dc7d.pdf.
L’inspection de sécurité routière n’est pas la même chose que les vérifications routinières d’entretien, où des problèmes tels que la végétation, les incohérences dans la surface de la route et une signalisation de faible qualité sont examinées et corrigées. Cependant, elle peut identifier des problèmes de sécurité résultant d’un entretien déficient, comme par exemple des problèmes de signalisation ou de marquage au sol de faible qualité ou de visibilité.
L’inspection de sécurité routière peut permettre de :
Les facteurs humains jouent un rôle crucial dans l’identification des dangers sur un site. Le Chapitre 8 examine plus pleinement la question.
Les inspections de sécurité routière peuvent se faire sur l’ensemble du réseau routier ou sur des sites spécifiques comportant les plus grands risques. Ceci dépend de l’autorité routière. Il est important de noter que les ISR des sites existants peuvent déboucher sur un nombre énorme de dangers et de problèmes identifiés de sécurité. Dans ces circonstances, il n’est pas économiquement viable de traiter tous les problèmes enregistrés. De même, il est peu fructueux de conduire une ISR sur us site avec des ressources qui ne permettront pas d’aborder la majorité des dangers détectés par l’inspection. Dans ce cas, il est plus avantageux d’investir dans un programme d’entretien pour aborder certains problèmes que d’effectuer une ISR formelle.
Le Guide des inspections routières pour les vérifications de sécurité sur les routes existantes de l’AIPCR (2012a) présente des listes de vérification utiles pour différents types de route, pour assurer que chaque investigation sur un site couvre bien tous les éléments nécessaires. Ces listes sont similaires en nature à celles utilisées pour l’audit de la sécurité routière. Il fournit aussi des exemples de rapports d’ISR appropriés pour les routes interurbaines et les routes urbaines. La Banque africaine de Développement (2014a) a récemment publié des recommandations sur l’inspection de sécurité routière, spécifiquement conçus pour utilisations dans les PRFI.
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L’approche proactive a été élargie pour inclure une méthode intègre une quantification dans l’inspection des routes existantes et des projets routiers. Il existe plusieurs approches, la plus commune est celle du programme d’évaluation des routes (RAP). Différents programmes RAP existent dans différentes régions, dont EuroRAP, USRAP, AusRAP, KiwiRAP et ChinaRAP, tous sous la bannière du Programme international d’évaluation des routes iRAP. L’AIPCR (2012b) note que l’approche de l’iRAP offre de grands avantages lorsque les données sur les accidents ne sont pas disponibles ou si la couverture est limitée.
Ces programmes (RAPs) poussent le concept de l’audit de sécurité routière un pas plus loin en estimant le risque (sur la base de la probabilité et de la gravité) pour différents tronçons de route en fonction des caractéristiques de la route et des accotements. Des données sur différentes caractéristiques de la route sont collectées (par exemple par un relevé vidéo suivi d’une analyse au bureau, voir le chapitre 5.4). Sur la base de la recherche effectuée durant de nombreuses années, de vastes connaissances ont été accumulées sur chacune de ces variables et leur niveau de risque. Par exemple, un tronçon de route droit est plus sûr qu’une route avec un virage serré, et ce niveau de risque peut être quantifié. Chacune de ces variables est quantifiée et un algorithme détermine le risque de blessure grave ou mortelle sur chaque tronçon de route (l’iRAP utilise des segments de 100 m).
Cette évaluation peut être utilisée pour identifier les tronçons à plus haut ou moindre risque d’un réseau ou d’une route. Un système de classement à cinq étoiles est utilisé, une étoile signifiant l’infrastructure routière la plus déficiente, et cinq étoiles signifiant que la probabilité d’accident et la gravité de ceux qui surviennent sont les plus faibles. Cette classement peut aussi être représenté avec des couleurs pour donner une rapide indication visuelle de la sécurité de l’infrastructure routière. Ce procédé permet aussi des classements par étoiles distincts pour différents types d’usagers (par exemple, occupant du véhicule, piéton, cycliste et motocycliste).
Cette indication peut aussi être utilisée pour identifier les améliorations de sécurité pouvant être mises en œuvre aussi bien sur l’ensemble du réseau que sur des sites spécifiques. Les calculs peuvent être actualisés pour déterminer les gains de sécurité découlant de ces améliorations. En connaissant le coût des traitements et de leurs bénéfices, et avec les estimations du nombre d’accidents graves et mortels pour un réseau donné, un calcul économique peut être effectué pour déterminer les traitements les plus avantageux à appliquer sur le réseau ou un site. Le logiciel pour cette analyse est disponible gratuitement en ligne à l’intention des autorités routières. Le chapitre 11 renseigne plus amplement sur le sujet, et une description détaillée de l’approche de l’iRAP se trouve à : www.irap.org.
Il existe une forte corrélation entre le classement par étoiles attribué à une route et les résultats réels de la sécurité sur celle-ci, ce qui reflète la forte base empirique du modèle iRAP. Une analyse effectuée par McInerney & Fletcher (2013) et fondée sur le classement par étoiles et le coût des accidents (la moyenne des coûts des blessures graves et mortelles aux occupants du véhicule par kilomètre-véhicule) pour presque 1.700 km d’autoroute donne un exemple de cette relation. Pour chaque augmentation du nombre d’étoiles (c’est-à-dire pour chaque amélioration de la sécurité), le coût de l’accident diminue pratiquement de moitié. En passant de 1 à 2 étoiles, le coût de l’accident est réduit de 40%, de 2 à 3 étoiles il est réduit de 61%, et de 3 à 4 étoiles de 44%.
Harwood et al (2014) ont évalué les outils de USRAP et comparé cette approche à d'autres méthodes d’évaluation du risque. Ils estiment que cette approche est la plus solide et quantitative pour sélectionner les interventions d’amélioration de la sécurité, et que les recommandations sont accompagnées par des estimations économiques souvent absentes dans les autres méthodes. Cependant, ils ont aussi identifié que cette approche requiert beaucoup de main-d’œuvre, et compte beaucoup sur la collecte de données sur les routes et leur encodage par un personnel qualifié. Ils estiment toutefois que ceci peut se faire de manière raisonnablement efficace. La prise en compte des risques associés à des groupes spécifiques d’usagers (motocyclistes, piétons, cyclistes et occupants des véhicules) a aussi été considérée comme un avantage. Une approche similaire a été adoptée en Afrique, avec l’utilisation de Netsafe (Encadré 10.6).
Le problème : En Afrique du Sud, les statistiques sur les accidents sont de faible qualité, ce qui rend difficile l’identification des sites dangereux et des causes des accidents.
La solution : a consisté en l’identification des sites potentiellement dangereux sur la base du réseau existant. L’Agence routière nationale (SANRAL) a développé un Système de Gestion de la Sécurité routière (RSMS) qui est une approche holistique de la sécurité appliqué sur ses presque 20.000 km de route. Un élément important du RSMS est le développement de l’algorithme Netsafe.
SANRAL collecte annuellement des données sur son réseau à partir de véhicules équipés de caméras et de dispositifs laser de mesurage. Antérieurement, ces données n’étaient utilisées qu’à des fins d’entretien, mais à la suite de l’analyse et de l’évaluation des relations entre pente, largeur de la voie, limitations de vitesses affichées, zone de récupération disponible, type de barrière médiane, espace entre les accès, etc., une méthode a été développée, qui permet d’identifier les sites dangereux le long des routes.
En analysant les données nécessaires pour Netsafe plusieurs problèmes concernant la complétude et l’exactitude des données ont été identifiés. Le système GIS a été utilisé pour filtrer plusieurs de ces problèmes de qualité, et il a fallu un temps important pour corriger les données avant de pouvoir les utiliser de manière fiable dans Netsafe.
Les routes ont été divisées en tronçons de 10 mètres et les caractéristiques géométriques de chaque tronçon ont été ensuite été évaluées. Sur la base de la combinaison de ces caractéristiques géométriques, un indice de risque a été calculé, ainsi qu’un indice de priorité prenant en compte le volume de circulation.
Les résultats : la méthodologie a été testée sur certaines des routes principales du pays, à savoir la R61 entre Mthata et Port St Johns, la N4 de Pretoria à Nelspruit et la N3 de Heidelburg à Durban. Des statistiques raisonnablement exactes existaient pour ces routes, et une relativement bonne corrélation a été trouvée entre les zones à haut risque calculées par Netsafe et les sites réels d’accidents. Dans le cadre du RSMS, les audits de sécurité de la route sont devenus obligatoires pour tous les nouveaux projets de modernisation des routes de SANRAL.
Netsafe a mis en lumière le besoin de rigoureux contrôles de qualité dans la collecte et la saisie des données. Il est aussi devenu évident à partir de cet exercice que les accidents sur les routes rurales sont assez rares, et aléatoires. Il est rare qu’un site potentiellement dangereux soit clairement identifié par les statistiques d’accidents ; un outil tel que Netsafe peut permettre de les identifier et de les prioriser. Ceci est important lorsque des fonds limités sont nécessaires pour des investigations plus détaillées de la sécurité des routes.
Source : Randall Cable, SANRAL.
Insuffisance de contact visuel entre les piétons et les automobilistes (Source: Routes/Roads 2018 - N 376 - www.piarc.org)
L’approche fondée sur les données historiques sur les accidents (réactive) ainsi que l’évaluation proactive du risque donnent des informations sur les sites probables de futurs accidents. Combiner ces deux approches peut fournir une meilleure image des sites actuels à haut risque, et de ceux où des accidents mortels et graves se produiront le plus probablement dans le futur. Plusieurs approches sont en train d’émerger dans le monde, et essaient de combiner ces méthodes pour permettre une meilleure compréhension du risque d’accidents.
Une approche « systémique » des projets de sécurité a récemment été développée aux États-Unis (Preston et al, 2013). Elle se concentre sur les solutions à l’échelle du réseau. Cet outil a été testé dans différents états du pays au cours des dix dernières années ; il est encore en développement au niveau national. L’approche comporte plusieurs étapes, s’appuyant à la fois sur les données d’accidents et sur d’autres sources d’information pour identifier et traiter le risque. Ces étapes sont :
L’approche systémique identifie des sites de traitements qui ne sont pas typiquement identifiés avec les techniques traditionnelles d’analyse réactive (chapitre 10.3). L’évaluation du risque est le pilier central de cette approche, ce qui implique la collecte de données sur les caractéristiques de la route et du trafic liées aux facteurs de risque et aux types d’accidents sélectionnés. Ceci est utilisé pour aider à identifier les sites ou portions de route avec la potentialité d’accidents graves. Il est suggéré que cette information soit collectée soit à partir des bases de données existantes sur les routes et le trafic, soit au moyen d’un examen sur le terrain. Dans un exemple donné par Preston et al (2013), une évaluation des virages sur un réseau rural a identifié plusieurs sites ayant des caractéristiques communes de risque de sites d’accidents graves, mais sans qu’aucun accident grave n’ait été documenté. Il est à noter que cette approche peut être utilisée avec ou sans données d’accidents.
Harwood et al (2014) ont examiné l’approche systémique, et identifié plusieurs points forts ainsi que des domaines susceptibles d’être améliorés. Ils estiment que cette approche requiert moins de données sur les routes que d’autres outils, n’a pas besoin de données sur les accidents pour identifier des sites d’accidents, et offre une plus grande flexibilité pour cibler les facteurs de risque et les types d’accident. Cependant, cette flexibilité peut aussi être considérée comme une possible faiblesse, parce qu’il est nécessaire de compter sur les utilisateurs pour identifier les facteurs de risque potentiel et les peser, y compris des questions telles que le volume de trafic, et pour effectuer l’analyse coût-avantage (une tâche optionnelle), dans le cadre de la sélection des interventions.
En Australie, une approche a été développée et combine les données sur les accidents avec une approche plus proactive. Le Modèle national australien d’évaluation du risque (ANRAM) fournit aux agences du pays un système cohérent au niveau national pour l’identification, la mesure et la reddition de comptes sur le risque d’accidents graves. L’ANRAM a été développé en étroite consultation avec les agences routières et l’Association automobile australienne (AAA) pour s’assurer que les résultats du système puissent servir à la préparation de futurs programmes d’ingénierie de sécurité routière. Ceci était particulièrement important pour les routes rurales et locales où les accidents graves sont généralement trop éparpillés pour attirer un traditionnel financement de programmes de points noirs. Cependant, il a aussi été reconnu que ces accidents dispersés représentent une large proportion de tous les accidents graves et mortels.
L’ANRAM réunit plusieurs approches, issues de l’évaluation traditionnelle fondée sur les accidents, des programmes d’évaluation des routes, et du manuel américain Highway Safety Manual (HSM; AASHTO, 2010). Le HSM propose une méthode qui identifie le niveau de performance en matière de sécurité pour différents types de routes. La variation individuelle par rapport à la fréquence moyenne des accidents, peut être dûe aux variations des caractéristiques routières et des conditions d’exploitation de la circulation de chaque site qui diffèrent de la moyenne représentée par le modèle, ainsi qu’à des erreurs statistiques. Cette variation des caractéristiques de la route peut être mesurée et son effet calculé, ce qui, dans le cas de ANRAM, se fait en utilisant le modèle iRAP (AusRAP en Australie). Ce procédé donne une prédiction du nombre d’accidents fondé sur les caractéristiques de la route. Cette évaluation proactive du risque constitue l’un des intrants clés pour l’identification des sites d’accidents graves et mortels.
L’Australie possède aussi une source utile d’information sur les sites historiques d’accidents bien que, comme tous les systèmes de données d’accidents, elle ne permet pas une connaissance parfaite des sites antérieurs d’accidents. Cependant, les résultats observés d’accidents peuvent être utilisés pour améliorer la valeur prédite fournie par le modèle. Cette information (réactive) complète l’évaluation proactive du risque. La méthode empirique de Bayes est utilisée là où la robustesse statistique de la valeur prédite d’accidents et les données observées d’accidents sont prises en compte pour pondérer chaque valeur. Dans les situations où les volumes sont faibles et les accidents plus éparpillés, un poids plus élevé est généralement affecté aux résultats prédits d’accidents. Dans les situations avec un fort volume de trafic et des modèles d’accidents cohérents, les résultats observés d’accidents obtiennent une pondération plus élevée.
Le graphique 10.7 montre la structure de l’ANRAM. Voir aussi Steinmetz et al. (2014) pour plus de détails.
Graphique 10.7 : Structure du modèle australien national d’évaluation du risque (ANRAM)
En Nouvelle-Zélande, le guide High Risk Rural Roads Guide (NZ Transport Agency, 2011) donne des conseils sur l’utilisation des données d’accident et des approches de prédiction du risque (telles que KiwiRAP) pour déterminer les sites à haut risque.
L’approche néo-zélandaise suppose le calcul et l’évaluation des risques collectif et personnel (ou individuel). Le risque collectif indique la fréquence des accidents telle que vécue par la population, c’est-à-dire la moyenne annuelle des accidents par kilomètre de route évalué. Le risque personnel ou individuel indique le risque encouru par un usager individuel de la route, exprimé en kilomètres parcourus par un véhicule (VKT). On peut utiliser les données historiques d’accidents (réactive) et/ou l’évaluation prédictive du risque (proactive). Les deux approches utilisent une échelle pour catégoriser le niveau du risque : élevé (noir), moyen à élevé (rouge), moyen (orange), faible à moyen (jaune) et faible (vert).
Le risque est catégorisé en différents niveaux en utilisant les données historiques sur les accidents (approche réactive) pour identifier les tronçons de route à plus haut risque.
Alternativement ou en complément, l’approche d’évaluation prédictive du risque peut être utilisée. Le classement par étoiles et le système d’attribution de points au niveau de protection de la route évaluent le risque d’accidents sur la base des caractéristiques (ingénierie) de l’infrastructure routière. Les classements par étoiles (qui s’appliquent typiquement à des tronçons de cinq kilomètres) sont dérivés des scores de protection de la route (qui sont calculés pour chaque segment de 100 mètres). Le graphique 10.8 donne un exemple de catégorisation du risque.
Graphique 10.8 : Exemple d’évaluation prédictive du risque (proactive)
Le guide néo-zélandais (NZTA, 2011) recommande l’analyse des données sur les accidents et l’examen des principaux facteurs de risque pour élaborer un programme de traitement approprié pour traiter le risque identifié. Prendre en considération le risque collectif et personnel d’une route aide à guider l’approche vers le choix des investissements de sécurité (chapitre 11.2).
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Une fois que les sites à haut risque ont été identifiés et que l’information pertinente a été analysée pour identifier les causes probables, il est nécessaire de sélectionner des interventions et de les prioriser pour action. Le graphique 11.1 montre comment ceci s’intègre dans le processus d’évaluation du risque pour gérer la sécurité de l’infrastructure.
Graphique 11.1 : Sélection et priorisation des interventions dans le processus d’évaluation du risque
Chaque intervention pour la sécurité de l’infrastructure routière a un coût. Chaque pays a un budget limité pour améliorer la sécurité routière, il est donc important d’assurer que la réduction du nombre des décès et des blessures graves soit maximisée dans les limites du budget disponible.
Les interventions sont les actions individuelles et collectives réalisés pour traiter du risque. Les termes « contremesure » ou « traitement » sont aussi utilisés.
Ce chapitre donne des informations sur la sélection et la priorisation d’interventions d’ingénierie de sécurité routière efficaces. Il conseille sur les types d’options disponibles, sur les processus et les outils qui peuvent être utilisés pour décider quelles sont les options les plus appropriées. Les options et la sélection des interventions sont présentées au chapitre 11.3. Afin de maximiser les résultats en matière de sécurité, une méthode de détermination de la priorité est nécessaire, ceci se fonde généralement sur une évaluation économique. Ce processus est décrit au chapitre 11.4.
Il existe plusieurs recommandations relatives aux principaux types d’accident contribuant le plus aux décès et aux blessures graves. Certaines d’entre elles visent les problèmes dans les PRFI et donnent des informations sur les traitements efficaces, citons :
D’autres documents donnent des conseils plus généraux sur ces types d’accidents et d’autres (c’est-à-dire qu’ils ne visent pas spécifiquement les enjeux des PRFI). Certains d’entre eux sont d’accès gratuit et donnent des recommandations sur les questions suivantes.
Interventions pour les accidents en sortie de route :
Interventions pour les accidents aux carrefours :
Interventions pour les accidents par choc frontal:
De nombreux autres documents peuvent être consultés sur Internet à partir de diverses sources sur ces types d'accidents et d'autres. Toutefois, il faut s'assurer que les documents accessibles à partir de cette source ont été produits par des organismes dignes de confiance et qu'ils fournissent des renseignements fiables. Il existe d'autres documents qui fournissent des conseils sur une gamme de types d'accidents et d'interventions appropriées dans un format facile d'accès. Les documents clés sont énumérés plus loin dans ce chapitre.
Les interventions les plus économiques pour cibler les principaux accidents sont bien connues, et devraient être mises en œuvre comme point de départ et de manière ciblée sur les routes à haut risque. Elles comprennent :
Un point de départ idéal est la mise en œuvre de projets de démonstration multisectoriels (comprenant par exemple des programmes de police et d’éducation) sur les principaux corridors à haut risque en utilisant ces interventions efficaces. Pour ceux qui débutent, c’est une façon utile d’apprendre par la pratique d’une manière facile à gérer.
Des procédures d’évaluation économique doivent être établies, et le personnel clé doit être formé à leur utilisation. Ceci aidera à prioriser efficacement les budgets limités. Il aidera à préparer une analyse de rentabilité adéquate pour investir en sécurité routière.
Faire des évaluations à l’échelle du réseau pour guider l’élaboration du programme est un élément essentiel d’un programme d’ensemble de sécurité routière pour une administration routière. Ceci devrait être fondé sur une bonne compréhension des risques et des problèmes à l’échelle du réseau. Il est également nécessaire d’identifier les risques au niveau du projet en cohérence avec l’approche de niveau supérieur à l’échelle du réseau. Ces deux aspects sont examinés au chapitre 10. De la même manière, des approches au niveau du réseau peuvent être adoptées pour traiter du risque identifié grâce à des interventions efficaces en matière d’infrastructure. Afin d’aborder les problèmes à l’échelle du réseau, une mise en œuvre à grande échelle des traitements est possible.
Le meilleur exemple documenté de cette approche est peut-être celui de la mise en œuvre du concept des routes 2+1 en Suède, comme décrit dans l’étude de cas de l’Encadré 11.1.
Le problème : il a été reconnu que le réseau routier rural, avec un profil transversal de 13 m, avait de très mauvais résultats en matière de sécurité par rapport aux autres types de routes.
La solution : en 1998, l’Administration suèdoise des routes (SRA) a lancé un programme novateur de sécurité routière visant à fournir des routes sûres de 13 m de section transversale de manière économique.
Les routes de 13 mètres se composaient d’une seule voie dans chaque direction et de larges accotements. Le traitement 2+1 consistait à réduire les accotements à 1 m et à prévoir deux voies dans un sens et une voie dans l’autre, avec une barrière médiane étroite et flexible (câble métallique). Bergin et Peterssent (2010) ont conclu que les barrières de sécurité modernes flexibles telles que celles installées sur les routes suédoise sans collision sont le facteur ayant le plus d’impact sur les résultats de la sécurité routière. Les barrières souples absorbent l’énergie de l’impact et dans la plupart des cas évitent les blessures graves associées aux chocs frontaux (Larsson, Candappa & Corben, 2003). Dans la nouvelle conception, la voie du milieu change de direction tous les quelques kilomètres.
Les résultats : à partir de Janvier 2008, presque 1.800 km de routes sans collisions avaient été ouvertes. L’évaluation du programme a révélé une réduction de 76% du nombre de tués, avec des performances de sécurité équivalentes à celles d’une autoroute. De plus, après l’analyse de la conception 2+1 de la route, il a été prédit une réduction du nombre de tués et de blessés graves de 65 à 70% pour les motocyclistes. Cette approche de conception est maintenant utilisée dans de nombreux pays d’Europe, et des essais ont aussi été entrepris dans d’autres parties du monde.
L’exemple ci-dessous montre une conception de route 2+1.
En plus de la mise en œuvre au niveau du réseau de traitements spécifiques (tels que le concept 2+1 illustré ci-dessus), il est également possible d’élaborer des cadres qui fournissent des orientations pour l’application de types de traitement. La Nouvelle-Zélande, par exemple, a développé un cadre pour guider les décisions d’investissement en matière de sécurité, en fonction du niveau de risque collectif ou individuel d’accidents.
Le Graphique 11.2 s’inspire de cette approche et illustre comment le risque collectif et individuel peut être utilisé pour influencer des résultats en matière de sécurité de manière économique. Le risque individuel fait référence au risque de sécurité routière tel qu’il s’applique à un usager de la route. Il est souvent exprimé comme la probabilité pour un usager de la route d’être impliqué dans un accident (souvent en nombre d’accidents par véhicule-kilomètres parcourus, ce qui tient compte du volume de trafic. D’autres mesures sont aussi disponibles). Le risque individuel est une mesure utile pour évaluer la qualité (en termes de sécurité) d’une infrastructure routière. Le risque collectif fait référence au nombre total attendu d’accidents pour tous les véhicules (par exemple les accidents par kilomètre), et est fortement influencé par le volume de trafic.
En utilisant l’information sur le risque collectif et personnel/individuel, les types de traitements peuvent être regroupés en quatre catégories :
Graphique 11.2 : Diagramme de risques. Source : Adapté de Durdin & Janssen (2012).
Pour les routes à fort volume de trafic, le nombre attendu d’accidents graves est élevé, et pour celles qui ont des caractéristiques d’ingénierie inférieures aux normes pour leur fonction, ce nombre sera probablement plus élevé aussi bien dans les zones à risque collectif que dans les zones à risque individuel (la zone en rouge dans le graphique11.2). Un investissement substantiel dans les traitements de sécurité sur ces routes serait souvent justifié, par des travaux de transformation en Système sûr (par exemple une modernisation importante, la fourniture d’un itinéraire alternatif de meilleure qualité, des échangeurs de type autoroutier, etc.). Le chapitre 11.3.2 donne d’autres exemples de ces traitements plus coûteux mais très efficaces.
Les routes qui présentent des risques collectifs et individuels intermédiaires relèvent des catégories Corridors plus sûrs ou Gestion de la Sécurité (zones orange et jaune dans le graphique 2). Par exemple, les autoroutes dans les zones rurales à trafic modéré, certains accidents sévères localisés et dispersés et une conception déficiente peuvent tomber dans la catégorie Corridors plus sûrs. L’approche de traitement la plus efficace peut passer par des améliorations à l’échelle du corridor en utilisant une combinaison de solutions coûteuses et économiques (par exemple, installation de barrières de sécurité, marquages au sol, modernisation des carrefours, etc.).
Les idées de la Gestion de la sécurité peuvent s’appliquer aux routes où le volume de circulation est plus faible, où les accidents graves sont plus dispersés (par exemple rues et routes locales) et où les normes routières sont toujours inadéquates. Le meilleur rendement économique pour la sécurité serait obtenu par des traitements peu coûteux, à l’échelle du réseau et/ou de corridors, comme la révision des limites de vitesse, le marquage au sol ou une gestion ciblée du patrimoine routier (par exemple re-surfaçage de la chaussée et les traitements associés, comme l’étanchéisation de l’accotement). Cette catégorie inclut aussi les routes à haut risque collectif d’accidents graves en raison d’un volume de trafic élevé, mais avec un bon niveau général de sécurité routière (par exemple, les autoroutes urbaines). Les mesures les plus rentables peuvent être fondées sur des changements systémiques ciblés, par exemple des techniques de gestion d’autoroutes des mesures d’application pour l’infrastructure.
Les routes à faible risque collectif et individuel (zone verte dans le graphique 2) sont les plus susceptibles de faire l’objet d’activités d’entretien de sécurité. Ceci implique souvent des changements progressifs et systémiques tels que la gestion des routes (par exemple, gestion de l’adhérence), des améliorations de la signalisation et du marquage au sol, et d’autres bonnes pratiques d’entretien.
Le graphique 11.2 montre qu’à mesure que le risque collectif et individuel augmente, il faudra probablement des traitements plus extensifs. Au fur et à mesure que le risque progresse vers des catégories plus élevées, les avantages de l’application d’options de traitements des catégories inférieures devraient aussi être considérés.
Bien qu’elle ait été développée et mise en œuvre dans les PREs, cette approche est tout aussi utile dans les PRFIs, en particulier pour l’amélioration de l’infrastructure routière existante. Elle peut constituer un moyen efficace d’aider à prioriser les activités de sécurité routière.
Une fois le type de problème identifié (que ce soit au moyen d’une analyse d’accidents ou d’autres formes d’évaluation du risque), l’étape suivante du processus consiste à choisir une intervention appropriée. Les principaux objectifs de cette étape sont :
Il y a un certain nombre de questions à prendre en considération lors de la sélection des interventions. Habituellement, le coût et l’efficacité économique sont les considérations premières, mais il en existe d’autres. Il est important de s’assurer que l’intervention est rentable, qu’elle offre un rapport coût-avantage positif, et qu’elle peut être mise en œuvre dans les limites du budget disponible. En se fondant sur les questions soulevées par Ogden (1996) et BITRE (2012), d’autres considérations entrent en ligne de compte :
Une hiérarchie de contrôle est souvent utilisée dans l’évaluation du risque pour sélectionner et prioriser les interventions. Par exemple, Marsh et al (2013) suggèrent qu’une telle hiérarchie aide à identifier un ordre de priorité pour les différents types de traitement de sécurité routière, en fonction des résultats. Ils suggèrent une hiérarchie des mesures d’ingénierie routière fondée sur l’approche du Système sûr pour aider à résoudre les problèmes de distraction et de fatigue des conducteurs. Cette hiérarchie comporte quatre niveaux, et il est suggéré que le niveau 1 correspond à un niveau de risque auquel des résultats du Système sûr sont probables :
Un grand nombre d’interventions peuvent être utilisées pour améliorer la sécurité routière. Certaines d’entre elles n’ont que peu d’impact sur la sécurité, tandis que d’autres peuvent produire des réductions substantielles du nombre de tués et de blessures graves. Le concept d’infrastructure à forts résultats a été présenté au chapitre 4.7.1 et examiné dans le contexte de l’approche de Système sûr dans plusieurs documents. Par exemple, Turner et al (2009) font la distinction entre les traitements de sécurité routière «primaires » et les traitements « de soutien ». Les traitements primaires sont ceux qui constituent un grand pas en avant vers des résultats de Système sûr, c’est-à-dire zéro décès et blessures graves. Ceci peut être obtenu en réduisant l’impact des forces à des niveaux sûrs ou en séparant les différentes catégories d’usagers. Un traitement « de soutien » aide à améliorer la sécurité, mais seulement de manière marginale. Par exemple, un panneau d’alerte au danger peut réduire le nombre d’accidents (y compris les accidents graves), mais n’aura pas d’impact sur la gravité des accidents. Il est fortement recommandé que les traitements primaires soient utilisés autant que possible, dans un effort pour atteindre les objectifs du Système sûr. Des exemples de certains traitements clés sont présentés dans le graphique 11.3.
Graphique 11.3 : Exemples de traitements efficaces de sécurité Source: Photos courtoisie de ARRB Group Ltd sauf signalé autrement.
Les questions spécifiques aux PRFI concernant l’utilisation de tels traitements sont traitées plus en profondeur au chapitre 11.3.4.
NZTA (2011) se réfère aux traitements de transformation en Système sûr pour les routes interurbaines. Ces traitements sont définis comme pouvant traiter de forts pourcentages d’accidents mortels et graves pour les trois principaux types d’accidents sur ces routes (sortie de route, choc frontal et collisions aux carrefours). Il a été reconnu que ces traitements sont typiquement plus coûteux, et que leur mise en œuvre requiert plus de temps. Des exemples de tels traitements comprennent les voies express (4 voies et des traitements 2+1), les barrières médianes et latérales, des zones dégagées (zone libre de danger sur les accotements), des carrefours dénivelés (passerelles et échangeurs), les carrefours giratoires et la gestion efficace des vitesses.
L’une des considérations les plus importantes dans le choix des interventions est la connaissance du gain de sécurité apporté par le traitement. Ce gain est souvent décrit comme un facteur de réduction des accidents (le pourcentage attendu de réduction du nombre d’accidents) ou facteur de modification des accidents (FMA, le multiplicateur appliqué au nombre d’accidents avant traitement. Par exemple, un FMA de 0,8 indique que la réduction attendue du nombre des accidents sera de 20%). Plusieurs sources renseignent sur cette question (voir aussi l’Encadré 11.2).
Le Centre d‘Information sur les Facteurs de Modification des Accidents (FMA) (http://www.FMAclearinghouse.org/) est l’une des sources d’information les plus complètes et les plus avancées sur l’efficacité des mesures de sécurité routière sur l’infrastructure. Financé par l’administration fédérale des autoroutes (FHWA) des États-Unis, il fournit une base de données consultable sur l’efficacité. Il est constamment mis à jour, ce qui en fait l’une des sources d’information les plus actualisées sur le sujet. Le centre d’Information sur les FMAs applique un système de classement par étoiles (de 1 à 5) selon la robustesse de chaque FMA. Ce classement est fondé sur la conception des études, la taille de l’échantillon, l’erreur type, les biais potentiels et la source des données.
Étant donné que l’objectif de l’approche du Système sûr est d’éliminer les décès et les blessures graves, il est important de comprendre l’effet que les différentes interventions auront sur les accidents mortels et graves. Toutefois, une grande partie de la recherche fournit de l’information sur l’efficacité des interventions sur la réduction du nombre de victimes (c’est-à-dire la réduction du nombre de décès, de blessures graves et mineures combinées), ou sur le changement dans tous les accidents (y compris ceux sans blessures). Il s’agit là d’une distinction importante, et il est dommage que l’information sur les accidents mortels et graves soit si rare. Bien qu’il soit souhaitable de réduire au minimum tous les accidents, y compris ceux qui n’entrainent pas de blessure, la réduction globale des accidents graves et fatals est primordiale. Les professionnels de la sécurité ne devraient pas être dissuadés d’utiliser des interventions qui ont un effet neutre sur les accidents mineurs et sans blessures, et il peut même exister des situations où ces accidents augmenteront (généralement par une réduction de la gravité des accidents qui continuent de se produire sur un site traité).
En l’absence d’information sur l’effet des interventions sur les accidents mortels et graves, il convient d’utiliser celle sur la réduction du nombre de victimes, bien qu’un élément de jugement technique puisse aussi être nécessaire pour utiliser cette information. La réduction attendue des accidents graves et mortels est souvent plus élevée que la réduction de toutes les victimes. Par exemple, BITRE (2012) a constaté que l’impact de l’installation de carrefours giratoires sur les collisions était plus important dans le cas des accidents graves :
Les mêmes tendances ont été notées par Jensen (2013) dans une étude européenne. Il ressort donc clairement que l’utilisation de la réduction des accidents résultera souvent en une valeur conservative pour la réduction attendue des accidents graves et mortels.
La matrice suivante (Tableau 11.1) fournit un résumé des options de traitement de sécurité routière et de leur efficacité sur certains des principaux types d’accidents mortels ou causant des blessures graves. L’information sur chacun de ces traitements ainsi que leurs coûts indicatifs généraux est présentée au chapitre 11.3.3. Des coûts indicatifs généraux sont également fournis.
Traitements | Type d'accident | Coût | |||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
1. | 2. | 3. | 4. | 5. | 6. | ||
Réduction attendue du nombre des accidents de 60% ou plus | |||||||
Carrefours – Ronds-points Barrière médiane Passage piéton – carrefour dénivelé Allée piétonnière Contrôle aux passages à niveau Sécurité des accotements – barrières | ✓ | $$ | |||||
Carrefours – Ronds-points | ✓ | ✓ | $$ | ||||
Barrière médiane | ✓ | $$$ | |||||
Allée piétonnière | ✓ | $$ | |||||
Contrôle aux passages à niveau | ✓ | $$ | |||||
Sécurité des accotements – barrières | ✓ | $$ | |||||
Réduction attendue du nombre des accidents de 25 à 40% | |||||||
Voie supplémentaire
| ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Pistes pour motocyclettes | ✓ | $$$ | |||||
Duplication | ✓ | $$$ | |||||
Carrefour dénivelé | ✓ | ✓ | ✓ | $$$ | |||
Carrefour à feux | ✓ | $$ | |||||
Élargissement de la voie | ✓ | ✓ | ✓ | $$ | |||
Réseau à sens unique | ✓ | ✓ | ✓ | $$$ | |||
Passage piéton – sans feux | ✓ | $ | |||||
Passage piéton – avec feux | ✓ | $$ | |||||
Ilot de refuge pour piétons | ✓ | $ | |||||
Correction du tracé en plan | ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Restreindre/combiner les points d’accès directs | ✓ | ✓ | $$ | ||||
Sécurité des accotements – enlèvement des obstacles | ✓ | $$ | |||||
Route de service | ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Revêtement de l’accotement | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $$ | ||
Adhérence | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |
Gestion de la vitesse | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $ |
Modération de la circulation | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $$ | |
Réduction attendue du nombre des accidents de 10 à 25% | |||||||
Hachurage central | ✓ | ✓ | $ | ||||
Voie centrale de tourne à gauche (longueur entière) | ✓ | ✓ | $ | ||||
Délinéateurs | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $ | ||
Carrefour – délimitation | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Carrefour – voies de virages (sans feux) | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Carrefour – voies de virages (avec feux) | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Amélioration du stationnement | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Correction du profil en long | ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Régulation de l’activité commerciale sur les accotements | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Bandes rugueuses | ✓ | ✓ | $ | ||||
Amélioration des talus | ✓ | $$$ |
Note: $ = faible coût; $$ = coût moyen, $$$=coût élevé.
Comme le montre le tableau 11.1, la gestion de la vitesse est un moyen de traitement de presque tous les types d’accidents. Lorsque la vitesse a été identifiée comme un problème, les vitesses peuvent être réduites par des mesures efficaces de gestion. Il en résultera moins de décès et de blessures graves, à condition que le taux de respect des règles de circulation soit élevé, ou que des mesures supplémentaires de contrôle par la police soient prises.
Les interventions devraient être sélectionnées en fonction du site, de la route ou d’une zone particulière, et en fonction du type d’accidents qui s’y produit. Les types d’accidents peuvent être identifiés grâce à des méthodes réactives (fondées sur les accidents) ou proactives (chapitre 10).
Des interventions uniques peuvent être utilisées, ou plus communément des combinaisons d’interventions peuvent être choisies pour combattre un type d’accidents ou un problème particulier. La sélection finale de l’intervention requiert un jugement d’expert sur les facteurs qui ont contribué ou qui peuvent contribuer aux accidents.
Plusieurs guides fournissent des conseils sur les interventions appropriées pour aborder des problèmes spécifiques d’accidents. L’AIPCR (2009) fournit un ensemble détaillé d’options dans son Catalogue des problèmes de sécurité en conception et des mesures correctives, selon la fonction de la route, la section transversale, le tracé, les intersections, les services publics et privés, les usagers vulnérables, la signalisation et le marquage et les caractéristiques routières.
Un certain nombre d’interventions sont proposées pour aborder les problèmes de sécurité liés à chacun de ces sujets. Dans chaque cas, des informations sont fournies sur le problème de sécurité routière. Les types de traitement sont présentés accompagnés de photos du traitement, d’une brève description, de coûts indicatifs, des types d’accidents concernés et des catégories d’usagers affectées. L’exemple ci-dessous (graphique 11.4) montre des solutions potentielles pour les problèmes liés à des accotements qui ne pardonnent pas (catégorisés dans la rubrique Caractéristiques des accotements).
Graphique 11.4 : Traitements pour les accotements qui ne pardonnent pas, d’après le Catalogue de l’AIPCR
Il existe plusieurs outils en ligne qui fournissent des renseignements comparables et dans certains cas plus détaillés. Certains couvrent une ample variété de traitements, tandis que d’autres se concentrent sur des types particuliers d’accidents. Austroads (engtoolkit.com.au) et l’iRAP (toolkit.irap.org) ont développé des boites à outils en ligne donnant des conseils sur les options de traitements pour différents problèmes de sécurité routière. Elles sont toutes les deux régulièrement mises à jour et révisées afin de tenir compte des résultats les plus récents en matière de sécurité routière. Chacune comprend des informations détaillées sur les problèmes de problèmes et les traitements des accidents, y compris les coûts indicatifs, la sécurité et autres avantages, les questions de mise en œuvre et les références.
La boite à outils d’Austroads est conçue pour traiter les problèmes de sécurité identifiés par les enquêtes sur les accidents et les audits de sécurité routière (lacunes de sécurité). Des informations détaillées sont fournies sur les solutions, y compris des liens vers les documents de conception pertinents. La boite à outils sur la sécurité est destinée aux praticiens des PRFIs, et a été traduite en plusieurs langues, dont le français, l’arabe, l’espagnol et le mandarin. Le graphique 5 montre une image extraite de cette boite à outils.
Graphique 11.5 : Traitements d’allées piétonnières de la boite à outils pour la sécurité routière
Bien que ce Manuel soit axé sur les interventions relatives à l’infrastructure, il est important de veiller à ce que les approches multisectorielles (par exemple impliquant l’éducation et l’application de la loi) soient prises en compte, parce qu’elles auront souvent un impact sur la sécurité plus fort que les seules mesures relatives à l’infrastructure. Ceci est particulièrement vrai dans les PRFI, où le niveau de respect des règles de la circulation peut être moins élevé et où le grand public peut moins bien comprendre les intentions des interventions de sécurité routière. Les questions spécifiques aux PRFI et à l’efficacité des interventions sont examinées au chapitre 11.3.4. L’Encadré 11.3 donne un exemple de programme combiné d’intervention sur l’infrastructure et d’éducation pour aborder la sécurité des piétons en Afrique du Sud.
Le problème : le manque d’installations piétonnières, de sensibilisation à la sécurité routière et d’accès.
La solution : le Projet Autoroute R300 englobait la nécessité d’aborder de manière holistique les besoins de mobilité et d’accessibilité de tous les usagers de la route. Le projet impliquait l’utilisation de méthodes non conventionnelles pour encourager la population à s’approprier les responsabilités en matière de sécurité routière qui ont une incidence sur leurs besoins de déplacements quotidiens. Ceci a été fait dans le contexte d’un investissement majeur en infrastructure routière et en veillant à ce que les préoccupations existantes en matière de sécurité routière soient abordées et non pas accrues par inadvertance.
En 2007, l’agence nationale sud-africaine de la sécurité routière (SANRAL) a modernisé l’autoroute R300. Il s’agissait de passer de quatre à six voies avec des chaussées séparées afin d’augmenter sa capacité, d’installer des barrières médianes en béton pour séparer les chaussées, d’installer un éclairage public le long de la ligne médiane et des bas-côtés sur toutes les rampes d’échange existantes, d’élargir les ponts au long de la route, et de déployer un système de gestion de l’autoroute comprenant un système de surveillance par télévision en circuit fermé et des panneaux à message variable. Le projet a été achevé en juillet 2010.
Pour faciliter l’accès et la mobilité des piétons en toute sécurité, une passerelle piétonne a aussi été construite, travaux qui se sont terminés en 2008. En plus de la passerelle, SANRAL a aussi conçu un programme d’éducation destiné à améliorer la sensibilisation et la sécurité routière des piétons dans les zones entourant l’autoroute R300. Cela impliquait également l’utilisation des brochures de sécurité routière « Streetwise » de SANRAL. Ce programme d’éducation comportait différents volets avec des programmes spécifiques pour les élèves (« safer road to school ») et la population en général.
Les résultats : le projet a permis d’améliorer la mobilité des véhicules et des piétons, avec des passages piétons plus sûrs. L’utilisation de l’infrastructure piétonnière comme les passerelles s’est améliorée, ce qui a réduit l’exposition des piétons aux véhicules à grande vitesse. Bien qu’il soit encore trop tôt pour déterminer l’efficacité exacte du programme en termes de réduction du nombre de piétons tués, les statistiques disponibles indiquent une tendance à la baisse dans les accidents de piétons. Pour la période allant de mars 2010 à août 2012 (presque deux ans et demi), il y a eu 10 accidents mortels et 12 accidents graves de piétons, contre 87 accidents mortels et 81 blessures graves entre 2002 et 2007. La situation est suivie de près.
Les manuels SURE (et plus particulièrement le « Plan d’Action et de Réalisation des Actions ») est un autre exemple d’approche multisectorielle, et offre des conseils fondés sur les méthodes françaises de sélection des interventions de sécurité sur le réseau (encadré 8 du Chapitre 9).
La plupart des informations sur l’efficacité des interventions sont basées sur la recherche effectuée dans les PRE. Dans les PRFI, à l’exception de la recherche sur les interventions relatives aux comportements, il n’existe que très peu d’études sur l’efficacité, en particulier sur les traitements de l’infrastructure. Cette question est importante, car on ne peut pas s’attendre à ce que les interventions utilisées dans les PREs aient les mêmes résultats lorsqu’elles sont utilisées dans les PRFIs.
Cette question a été soulevée dans plusieurs études. L’OCDE/FIT (2012) suggère que de nombreux éléments liés au contexte et à l’environnement influencent la réduction réelle des accidents, et que cet effet est encore plus critique dans les PRFIs. Par exemple, la fourniture d’un accotement revêtu peut améliorer la sécurité dans un PREs, mais dans un pays moins développé, elle peut encourager des utilisations inappropriées, telles que l’installation de stands de vente d’articles aux voyageurs, ce qui peut diminuer la sécurité de la route. La compréhension des ces questions de contexte est évidemment essentielle à la réussite de la mise en œuvre réussie des traitements de sécurité.
Il semble également que plusieurs barrières existent à la mise en œuvre réussie de traitements de sécurité routière. Turner et Smith (2013) ont animé un atelier de travail pour identifier les problèmes autour de la mise en œuvre des traitements d’infrastructure dans les PRFI. Plusieurs traitements efficaces d’infrastructure ont été discutés, et les barrières à chacun de ces traitements explorées. Bien que de nombreux problèmes aient été identifiés pour chaque type de traitement, beaucoup relèvent de catégories similaires. Il s’agit notamment du coût, du non-respect des règles de circulation, de questions de conception et de mise en œuvre, de l’acceptation par le public et de l’entretien.
Le coût est une question soulevée pour de nombreux traitements, mais, curieusement, pas pour tous. Pour certains des traitements très efficaces, le coût ne semble pas être un problème majeur. Il est plus intéressant de noter que les questions relatives au respect des règles de circulation et à la conception et la mise en œuvre ont été soulevées pour un plus grand nombre de traitements que le coût. Le respect des mesures de traitement par les usagers est un problème significatif dans les PRFI, et il est très probable que de ce fait, l’efficacité du traitement sera moindre. Les traitements souffrant le plus de ce problème de respect sont :
Cette question du non-respect montre le besoin d’une réponse multisectorielle aux problèmes de sécurité routière. L’utilisation d’une infrastructure plus sûre doit être soutenue par une éducation et des sanctions policières appropriées, ce qui a déjà été examiné dans ce Manuel.
Les questions de conception et de mise en œuvre sont aussi été considérées comme ayant un impact sur l’efficacité des traitements. Si un traitement n’est pas bien conçu et que sa réalisation n’est pas de bonne qualité, le potentiel de réduction des accidents ne sera pas atteint. Cela a été considéré comme un problème pour tous les traitements examinés. Cette situation ne peut être améliorée qu’en améliorant les compétences et les capacités des praticiens travaillant dans les PRFI, y compris le partage des connaissances sur les bonnes pratiques.
Enfin, l’entretien est aussi une question qui aura un impact sur l’efficacité des traitements en termes de réduction des accidents. Il est courant que les traitements se détériorent jusqu’à des niveaux où ils deviennent moins sûrs (ou même jusqu’à un point où ils posent un risque plus élevé que si le traitement n’était pas présent). Un financement approprié est nécessaire pour assurer que l’entretien des traitements. Une formation peut aussi être nécessaire en ce qui concerne l’entretien.
Bien que toutes ces questions soient susceptibles d’être préoccupantes dans les PRE, elles le sont sans doute encore plus dans les PFRI, et auront certainement un impact sur l’efficacité des traitements. L’ampleur de cet effet n’est pas connue, mais il est permis de supposer qu’en raison de ces problèmes, l’efficacité des traitements soit probablement différente (et typiquement moindre) que lorsque ces mêmes traitements sont utilisés dans les PRE.
Étant donné l’absence de données fiables sur l’efficacité des traitements dans les PRFI, il est recommandé d’utiliser les valeurs de réduction des accidents dans les PRE comme un point de départ pour la sélection des traitements. Toutefois, les questions considérées ci-dessus doivent être soigneusement examinées, et les avantages escomptés doivent être révisés en conséquence. Il est à espérer qu’à plus long terme, la base de connaissance sur l’efficacité des traitements dans les PRFI s’améliorera, mais ceci n’adviendra que si un suivi et une évaluation appropriés ont lieu dans ces pays (chapitre 12).
De nouveaux traitements de sécurité novateurs seront nécessaires afin d’aider à éliminer les décès et les blessures graves sur les routes. Actuellement, de nombreux traitements de sécurité n’ont pour effet que des résultats résiduels en termes du nombre d’accidents graves, et des améliorations aux traitements actuels seront donc nécessaires. À mesure que des traitements seront appliqués à de nouvelles situations (y compris dans les PRFI), il sera nécessaire de les adapter pour obtenir de meilleurs résultats. Il existe aussi un certain nombre de traitements hautement efficaces qui sont utilisés dans certains pays, et pas du tout dans d’autres. Les agences routières et les organisations de soutien doivent innover et adopter de nouvelles approches, à condition que ces dernières soient fondées sur le retour d’expérience. Il est recommandé que les agences routières enquêtent sur de nouvelles interventions, et tirent des enseignements des expériences à l’étranger.
Les raisons pour lesquelles certains traitements très efficaces ne sont pas utilisés dans certains pays sont les suivantes :
Les agences routières doivent être prudentes dans leur sélection de nouveaux traitements, en s’assurant que ceux-ci ont été rigoureusement mis à l’épreuve et qu’ils ont démontré leurs avantages en termes de sécurité. Les projets de démonstration peuvent être un moyen efficace d’évaluer les traitements prometteurs, et de se préparer à un plus large déploiement (chapitre 9).
Il est suggéré de suivre une approche méthodologique de l’innovation, dont les étapes sont les suivantes :
Plusieurs documents de référence présentés plus haut dans ce chapitre donnent des exemples de traitements novateurs de la sécurité routière. Certains organismes font la promotion active de certains traitements (y compris des traitements novateurs) qu’ils aimeraient voir utilisés plus souvent (par exemple FHWA, 20155, qui documente et fait la promotion de contre-mesures prouvées de sécurité, et fournit des renseignements sur la conception innovante des intersections, y compris des vidéos, à l’adresse suivante :
http://www.fhwa.dot.gov/everydaycounts/edctwo/2012/geometrics.cfm). De nombreuses études nationales et locales ont été effectuées pour évaluer les traitements novateurs prometteurs. Ces études sont habituellement entreprises par des universités et des instituts de recherche, et l’information sur les essais est diffusée dans des publications et des conférences internationales, mais il faut s’assurer que cette information est fiable.
L'étude de cas ci-dessous fournit un exemple d'utilisation novatrice des systèmes de transport intelligents (STI) en Thaïlande (Encadré 11.4).
Le problème : Un tronçon de 12,5 km de la route nationale 304 qui traverse le parc national de Tublan en Thaïlande est connu pour ses accidents graves et a été identifié comme l'un des principaux corridors d'accidents par le ministère des Routes (DOH) sur la base de dossiers d'accidents sur 5 ans. Il s'agit de la seule section à deux voies restante du corridor, puisque la majeure partie de la route nationale 304 a été élargie à quatre voies. La section comprend un terrain montagneux avec une pente moyenne de 8 %. Environ 10 000 véhicules par jour empruntent le corridor, dont 25 % sont des camions. Les conducteurs désobéissent aux dispositifs de contrôle de la circulation et changent illégalement de voie dans des zones interdites de dépassement en présence de véhicules lents en montée. Les collisions frontales et les collisions au départ de la route, surtout dans les courbes, sont fréquentes sur ce tronçon de la route nationale 304.
La solution : Bien que des plans d'élargissement de ce tronçon de la route nationale 304 soient en cours d'élaboration, le processus prend beaucoup de temps. Le ministère thaïlandais des routes a mis en œuvre des stratégies STI et un système d'alerte d'incident à titre de mesure provisoire pour remédier au problème. À l'aide de la détection vidéo et hyperfréquence, de caméras et de panneaux à messages variables (PMV), les données, y compris le volume et la vitesse des véhicules, sont recueillies et transmises au siège du ministère pour analyse. Le nouveau système utilise des PMV pour avertir les conducteurs qu'ils approchent de virages serrés ou de pentes abruptes, d'incidents à venir comme un ralentissement de la circulation, de collisions ou de véhicules immobilisés, et pour les avertir également s'ils sont détectés en excès de vitesse. Les policiers et les agents du ministère de la Santé peuvent voir les conditions de circulation en temps réel pour confirmer les incidents, communiquer plus rapidement avec les équipes d'intervention d'urgence et modifier facilement les messages sur PMV lorsque les conditions changent.
Figure: Dépassement illégal d’un camion plus lent
Les résultats : Le projet des STI a été mis en œuvre en mai 2013. Au cours des cinq premiers mois de mise en œuvre, le nombre d'accidents graves est passé de 39 à 15, comparativement à la même période de cinq mois l'année précédente. Cette réduction des accidents graves de plus de 50 % a dépassé toutes les attentes du ministère de la Santé. En outre, le projet a également permis de réduire le nombre d'accidents secondaires et les retards de circulation dans le corridor. Un autre avantage du projet a été le renforcement de la coordination entre les organismes locaux, les équipes d'intervention d'urgence, la police, les conducteurs de dépanneuse et le personnel du ministère des Routes.
Source : Chayanan, S. (2015) "Intelligent Transportation Systems toward Safety Highways", Department of Highways, Ministry of Transport, Bangkok, Thailand.
Le chapitre précédent traitait de la façon d’identifier les risques, et le début du présent chapitre examinait l’utilisation d’interventions efficaces pour traiter les risques identifiés. La prochaine étape importante consiste à déterminer la priorité des différents traitements. Dans la plupart des cas, il y aura probablement des contraintes financières, ce qui signifie que tous les programmes ou projets valables ne pourront pas être financés. Une méthode est donc nécessaire pour identifier les programmes ou projets qui devraient être entrepris avec la plus haute priorité. Il y aura probablement aussi plusieurs options pour aborder un risque, et il est donc nécessaire de déterminer laquelle de ces options offrira les plus grands avantages en matière de sécurité par rapport à son coût. Les évaluations économiques fournissent une base de comparaison qui peut être utilisée pour classer par ordre de priorité, comparer et sélectionner les interventions de sécurité routière. Elles aident à identifier les mesures produisant le rendement social le plus élevé.
Au niveau stratégique, il peut être aussi nécessaire d’établir l’importance relative des mesures réactives et proactives et de décider la part de budget qui sera affectée à chaque approche. Les conseils donnés dans ce chapitre peuvent être utilisés au niveau de la stratégie, du programme ou du projet.
L’AIPCR (2012) a produit un document sur l’état des pratiques en matière d’analyse coût-efficacité, d’analyse coûts-avantages et d’allocation des ressources, qui donne des conseils complets sur les méthodes d’évaluation des projets et d’affectation des ressources. Il définit l’évaluation d’un projet comme une estimation de sa valeur afin d’établir s’il satisfait les objectifs économiques et sociaux du pays. Les approches d’évaluation comprennent l’analyse coût-efficacité (ACE) et l’analyse coût-avantage (ACA). Les indicateurs de résultats de ces analyses (RCA, VNA, TRImm. et TRI) sont examinés dans le présent chapitre. Les paragraphes suivants font le résumé des principaux documents sur ces sujets.
L’analyse coût- efficacité (ACE) consiste à comparer le coût d’une contremesure proposée avec le résultat ou l’effet qu’elle produit. Dans ce type d’analyse, les projets sont examinés et classés selon leur coût et leurs avantages pour améliorer la sécurité routière ou atteindre des objectifs stratégiques. Les effets sont généralement exprimés en unités non monétaires, comme par exemple un changement dans le nombre d’accidents. L’analyse coût-efficacité est principalement appliquée pour comparer les variantes de projets, de programmes ou de politiques ayant un résultat similaire. Ses résultats sont exprimés par le rapport coût-efficacité (RCE) qui se calcule en divisant le nombre d’accidents évités par le coût de la mesure.
L’analyse coûts-avantages (ACA) utilise les valeurs monétaires pour comparer les avantages totaux avec les coûts totaux d’un projet, d’un programme ou d’une politique donnés. Elle est principalement utilisée pour déterminer la valeur d’un investissement sur la base des avantages et des coûts totaux de l’investissement, et pour comparer un projet avec des variantes. Elle est aussi utilisée dans l’évaluation économique de la sécurité routière pour aider à promouvoir la sécurité routière et à assurer un financement de différents programmes ou projets. Elle permet des comparaisons entre des mesures alternatives de sécurité routière en identifiant à la fois le coût et les avantages pour la société dans son ensemble afin de déterminer si le projet doit être entrepris, et d’établir les priorités pour les projets approuvés. Ceci, à son tour, encourage l’affectation efficace de ressources limitées à des politiques concurrentes.
Yannis et al (2008) font un résumé utile des interventions économiques d’infrastructure, dans une analyse pour la Conférence européenne des directeurs des routes (CEDR). Ils ont examiné 55 investissements en infrastructure routière, et ont passé en revue les coûts et les avantages de chacun. En se fondant sur cette analyse, ils ont identifié plusieurs exemples de meilleures pratiques qui devraient être prises en considération dans une planification efficace des investissements. Les interventions rentables étaient :
Les principales exigences en matière de données ou des paramètres pour estimer les coûts et avantages des contremesures sont les suivantes :
Les coûts initiaux se réfèrent aux coûts de mise en œuvre (par exemple, les coûts d’installation, de matériaux et de main-d’œuvre) de chaque contremesure. Les coûts diffèrent selon le type d’environnement routier, les volumes de trafic, le coût local de la main-d’œuvre, et la disponibilité des matériaux.
L’incertitude au sujet des coûts de mise en œuvre est plus grande dans les PRFIs, où l’information n’est pas toujours facilement disponible. La boite à outils pour la sécurité routière (http://toolkit.irap.org) donne un aperçu des niveaux de coûts généraux pour différentes contremesures. Ces valeurs peuvent être utilisées à titre indicatif lorsque les traitements n’ont pas été mis en œuvre auparavant, ou dans les cas où l’information sur les coûts n’est pas facilement disponible.
Les coûts annuels d’entretien et d’exploitation font référence aux coûts d’entretien courant et périodique et aux coûts de fonctionnement. Le niveau et la régularité de l’entretien et des coûts de fonctionnement associés dépendent de la contremesure.
Certaines contremesures peuvent avoir une valeur résiduelle si elles sont supprimées. Par exemple, un carrefour peut être temporairement équipé de feux tricolores pendant un certain nombre d’années jusqu’à ce qu’une déviation soit achevée ; après cet achèvement la baisse des flux de trafic peut justifier l’enlèvement des feux tricolores. Si cette contremesure peut être utilisée ailleurs, le recouvrement de ce coût devrait être pris en compte. Toutefois, dans la plupart des cas, la valeur résiduelle sera probablement négligeable.
La durée de vie (ou service) d’une contremesure se réfère à la période de temps durant laquelle un traitement apportera des avantages en matière de sécurité avant qu’une rénovation majeure ou un remplacement ne soit nécessaire. Elle varie selon :
le type et la portée du projet,
Pour les projets impliquant des traitements multiples, comme par exemple des programmes de points noirs au niveau du réseau ou national, la durée de vie appliquée est celle du composant le plus durable. Le tableau 11.2 donne un exemple de la durée de vie maximale du traitement pour différentes contre-mesures. Compte tenu des questions énumérées ci-dessus, ceci variera probablement de manière substantielle d’un projet à l’autre. Par exemple, aux États-Unis, la durée de vie d’un traitement de marquage au sol devrait être d’un an, est supposée être d’un an, en particulier dans les États soumis à des conditions climatiques telles que neige et glace.
Type de traitement | Durée de vie maximale recommandée du traitement (en années) |
---|---|
Intersection dénivelée | 50 |
Correction d’un virage | 35 |
Carrefour en baïonnette ou modification d’un carrefour | 35 |
Giratoire | 30 |
Barrière médiane | 30 |
Revêtement ou élargissement de l’accotement | 25 |
Ajout ou élargissement d’une voie (y compris de dépassement) | 25 |
Réalisation d’un dévers acceptable | 25 |
Barrières aux passages à niveau | 20 |
Ilots médians (ou autres ilots) | 20 |
Glissières de sécurité (accotement) | 20 |
Éclairage public | 20 |
Enlèvement des obstacles sur les accotements (arbres, pylônes, etc.,) | 20 |
Nouveaux feux tricolores (équipement ou logiciel) | 15 |
Amélioration de la visibilité en enlevant les masques sur la route principale | 10 |
Poteaux de marquage sur les bords (balises) | 10 |
Revêtement adhérent | 10 |
Panneaux de signalisation (conseil, alerte, stationnement, limitation de vitesse, etc.) | 10 |
Marquages surélevés réfléchissants sur la chaussée | 5 |
Marquage au sol (thermoplastique) | 5 |
Marquage au sol (peinture) | 3 |
Source : Adapté de Turner & Comport (2010).
Les principaux avantages des projets de sécurité routière s’expriment en termes d’économies monétaires résultant de la réduction du nombre d’accidents ou à leur prévention (tués et blessés) pour un nombre donné d’années.
L’efficacité des traitements peut être exprimée sous la forme de facteurs de modification des accidents (FMA). Le chapitre 11.3 fait référence à plusieurs ressources complètes qui fournissent des FMA pour différentes interventions, notamment la base de données du Centre d’Information sur les FMA (http://www.CMFclearinghouse.org/) et la boite à outils pour la sécurité routière (toolkit.irap.org). Comme mentionné précédemment, l’efficacité et l’ampleur des changements dans le nombre d’accidents peuvent varier selon le contexte ou l’environnement.
Dans les cas où plusieurs traitements sont appliqués à un même site (contre-mesures multiples), des estimations des avantages généraux sont nécessaires. Certaines approches n’incluent que les économies réalisées grâce au traitement primaire ou principal, mais il est préférable de calculer les avantages totaux. Il faut veiller à ce que les avantages ne soient comptés qu’une fois pour des interventions améliorant la sécurité de manière similaire. Par exemple, pour traiter les accidents dans un virage, des interventions telles que des panneaux d’avertissement avancés, des bordures audio-tactiles et l’amélioration de l’adhérence de la chaussée peuvent être appliquées. L’avantage total de ces traitements ne sera pas égal à la somme des bénéfices de chaque traitement, car chacun d’eux est similaire en termes d’effet sur les accidents. Pour les situations où les traitements sont associés, un ajustement doit être fait. Bien que plusieurs approches complexes aient été conçues pour calculer l’avantage total de traitements multiples, l’approche simple décrite par Shen et al (2004) est généralement suffisante. Ils suggèrent une formule multiplicative dont la forme est similaire à celle présentée ci-dessous :
Par exemple, si trois contremesures sont considérées pour un même site, avec des FMAs de 0,3, 0,75 et 0,5 les résultats seraient :
FMAt = 0.6 x 0.75 x 0.8
= 0.36, ou 36% des accidents continueront de se produire (c’est-à-dire une réduction de 64% des accidents).
Une réduction de 64% des accidents est évidemment inférieure à la réduction de 85% qui serait obtenue si toutes les réductions étaient additionnées.
Roberts et Turner (2007) ont pu comparer les avantages sur le plan de la sécurité pour des sites où des ensembles de traitements ont été utilisés, avec des sites où les mêmes traitements ont été utilisés mais en traitement unique. En appliquant la formule ci-dessus, ils ont déterminé que cette approche tendait à surestimer l’avantage réel des traitements. Ils ont suggéré de multiplier les résultats par 0,66 pour obtenir une approche plus prudente (pour l’exemple ci-dessus, cela donnerait une réduction de 42%).
Pour une discussion détaillée sur l’efficacité des projets à traitements multiples, voir AASHTO (2010), iRAP (2013) et Elvik (2007).
Les avantages résultant au fil du temps des contremesures de sécurité sont estimés en attribuant une valeur économique aux accidents, et en l’appliquant à la réduction attendue du nombre d’accidents. Ces valeurs ne doivent pas être calculées projet-par-projet, mais doivent être fixées au niveau national par des économistes des transports et mises à jour annuellement.
Cette valeur économique, connue comme le coût social des accidents, est la valeur des dommages matériels causés par les accidents aux véhicules, les frais d’ambulance et de soins médicaux, les frais d’assurance et administratifs, la perte de production, les coûts des services de police, et les coûts humains associés à la douleur et la souffrance causés par les décès et les blessures. Le tableau 11.3 présente les différents éléments de coût.
Coûts par victime |
---|
Perte de productivité (selon l’hypothèse sous-jacente, perte brute de production ou perte de production nette de consommation) |
Coûts humains (perte de l’espérance de vie, souffrance physique et mentale de la victime, souffrance mentale de sa famille et de ses amis) |
Coûts médicaux (rééducation médicale) |
Réadaptation non médicale |
Autres coûts économiques |
Coût par accident |
Dommages matériels (y compris environnementaux) |
Frais administratifs |
Autres coûts (par exemple, coûts de congestion, de location de véhicule). |
Source : PIARC (2012).
Il y a eu de nombreux projets et de nombreux débats sur la meilleure manière de déterminer le coût des accidents (Hills & Jones-Lee, 1983; Alfaro et al, 1994; Jacobs, 1995), mais il est désormais généralement admis que seulement deux méthodes devraient être considérées : l’approche de la volonté à payer (AVP) et l’approche de capital humain (CH). Ces approches sont résumées dans le tableau 11.4.
Approche de capital humain (CH) | Mesure l’impact des accidents mortels et des blessures sur la production nationale actuelle et future. Le principal attribut du CH est la valeur actualisée du revenu brut (avant impôts). Les coûts directs tels que coûts de véhicule, les coûts des services médicaux et des services d’urgence sont aussi ajoutés à l’estimation de revenu. Dans d’autres cas, les coûts humains de la douleur, de la souffrance et du deuil sont également inclus dans la valeur des décès et des blessures. |
Les attributs peuvent donc être résumés comme la valeur des pertes futures de production dues aux accidents de la route et le coût des ressources consacrées à la prise en compte des effets des accidents. Les estimations dans le cadre de l’approche de CH sont des valeurs moyennes plutôt que des valeurs individuelles. | |
Approche de la volonté à payer | Mesure le montant que les personnes sont prêtes à payer pour réduire le risque de décès ou de blessure. |
Les estimations sont obtenues à partir des préférences révélées (en observant les situations où des individus font un compromis entre la richesse ou le revenu pour le risque de décès ou de blessure) et des préférences déclarées (les individus indiquent combien ils sont prêts à payer afin de réduire le risque de décès ou de blessure sur la base de situations ou de questions hypothétiques). |
Source: Basé sur Hills & Jones-Lee (1983).
L’AIPCR (2013), HEATCO (2006), Transport Research Laboratory (1995), et la Banque asiatique de Développement présentent une description et un examen détaillés des approches de capital humain et de volonté à payer. Les deux approches sont amplement utilisées, mais la méthode d’évaluation fondée sur la volonté à payer est généralement recommandée (DaCoTA, 2012; McMahon & Dahdah, 2008).
Les coûts doivent être déterminés pour des accidents de divers niveaux de gravité, habituellement classés en accidents mortels, accidents avec des blessures graves, accidents avec des blessures légères ou mineures, et dommages matériels seulement. Ces niveaux de gravité ont été définis au chapitre 5, où il est expliqué qu’un accident mortel implique une situation dans laquelle une personne au moins décède dans les 30 jours suivant un accident, et qu’un accident ayant causé des blessures graves implique au moins une personne admise à l’hôpital, mais sans causer de décès. Un accident léger ou mineur signifie qu’au moins une personne a été blessée d’une façon ou d’une autre, mais que personne n’a été tué ou gravement blessé.
Afin de prioriser les actions visant à réduire la fréquence des accidents, un coût moyen unique pour l’ensemble des accidents corporels est généralement considéré comme suffisant, d’autant plus qu’il est difficile de prévoir la gravité des accidents qui pourraient être évités.
Les coûts sont toujours basés sur des valeurs moyennes, et dans certains pays, ils sont aussi déterminés pour de grandes catégories de routes (par exemple routes urbaines, rurales, autoroutes). Le coût social des accidents fournit une estimation du fardeau économique placé par les différents types d’accidents et de blessures sur l’économie. À titre indicatif, le tableau 11.5 donne un exemple des coûts par catégorie de routes et de la gravité des accidents au Royaume-Uni en 2012.
On constate que les coûts augmentent des routes urbaines aux routes en zone rurale jusqu’aux autoroutes, ce qui indique l’effet des vitesses élevées sur les niveaux de gravité des accidents. Il montre aussi que les coûts sont environ dix fois plus élevés d’un niveau de gravité à l’autre. En d’autres termes, le coût d’un accident avec blessés légers est environ dix fois celui d’un accident avec seulement des dommages matériels, le coût d’un accident grave est d’environ dix fois celui d’un accident léger, et le coût d’un accident mortel est environ dix fois plus élevé que celui d’un accident grave.
Coût par victime en UK£ (US$) | Coût par accident en UK£ (US$) | ||||
---|---|---|---|---|---|
Type d'accident | Toutes les routes | Routes urbaines | Routes rurales | Autoroutes | Toutes les routes |
Mortel | 1,703,822 ($2,650,064) | 1,914,229 ($2,977,322) | 1,920,372 ($2,986,877) | 1,924,341 ($2,993,051) | 1,917,766 ($2,982,825) |
Grave | 191,462 ($297,793) | 218,109 ($339,238) | 220,524 ($342,998) | 229,358 ($356,735) | 219,043 ($340,697) |
Léger/mineur
| 14,760 ($22,957) | 22,773 ($35,421) | 24,559 ($38,199) | 27,857 ($43,328) | 23,336 ($36,296) |
Toutes les blessures | 50,698 ($78,853) | 62,250 ($96,821) | 109,415 ($170,180) | 74,471 ($115,830) | 72,739 ($113,136) |
Dommages matériels seulement | 1,935 ($3,010) | 2,830 ($4,402) | 2,720 ($4,230) | 2,048 ($3,185) |
Source : Département des Transports (2013).
Le calcul des coûts des accidents se fait généralement au niveau national, et le développement d’un chiffre précis peut être un processus complexe, quelle que soit la méthode utilisée. Si aucun chiffre n’est disponible au niveau national, une méthode simple pour obtenir la valeur des accidents, surtout en l’absence des données requises pour les approches de capital humain et de volonté à payer, est la règle empirique de l’iRAP (McMahon & Dahdah, 2008). Cette méthode utilise les informations de pays ayant déjà effectué des calculs de volonté à payer, et analyse la relation entre la valeur de la vie statistique (VVS) et le produit intérieur brut (PIB) par habitant. Selon McMahon et Dahdah (2008, Tableau 10), les hypothèses sont les suivantes :
Cette approche a été originalement développée en utilisant les valeurs de la volonté à payer d’un nombre limité de PRFIs. Ces valeurs ont été récemment mises à jour (Milligan et al, 2014), ce qui a montré que la règle générale tend à sous-estimer la valeur de la vie statistique dans les pays ayant un produit intérieur brut par habitant supérieur à 7000 US$ (Milligan et al, 2014).
La génération de coûts des accidents peut être un problème important dans les PRFIs, même avec la disponibilité d’estimations des coûts des accidents, ou lorsque l’on utilise en utilisant la règle empirique. En raison du faible PIB par habitant dans de nombreux pays, les coûts des accidents peuvent être faibles, tandis que le coût d’installation des traitements techniques peut rester élevé. L’exemple (Encadré 11.4) illustre cette question par un exemple de la Papouasie-Nouvelle Guinée.
Dans une étude des coûts et avantages économiques de politiques alternatives d’entretien de l’autoroute Highlands en Papouasie-Nouvelle Guinée, des comparaisons ont été faites entre l’approche très réactive adoptée dans la stratégie Key Roads for Growth Maintenance Project (KRGMP, 2006–2009) et des politiques alternatives.
Par comparaison avec une « option de référence » qui n’impliquait que des réparations minimales de surface et avait un délai de réponse de près de six mois entre l’apparition de graves défauts du revêtement et leur réparation, les intrants combinés NRRSP/KRGMP, s’ils étaient maintenus sur une période de vingt ans, pourraient procurer des avantages économiques d’environ 1,15 milliards de K (environ 0,5 milliard de USD) pour un RCA marginal de 5 environ, sans les réductions des coûts d’accidents. Cette situation s’explique par des réparations rapides du revêtement, avec un cycle mensuel d’entretien curatif de la surface, de drainage et d’entretien des accotements, de re-surfaçage périodique, et de réparations localisées du revêtement. Lorsque l’option de référence a été modifiée pour y intégrer le renforcement ou la reconstruction du revêtement dans les cas de grave détérioration, les avantages nets sont tombés entre environ 87 à 629 millions de K, avec un RCA marginal maximum de 4,6.
Les taux d’accidents ont aussi été étudiés et ont révélé un potentiel de réduction du risque d’accidents pouvant atteindre 30% par rapport aux chiffres actuels d’environ 4.000 accidents par an. Cette réduction était fondée sur une baisse supposée de 15% en raison de l’amélioration de l’état de la surface de la chaussée et à une combinaison de facteurs tels que l’amélioration de la visibilité et de l’état des accotements.
Le coût total des accidents est donné par le nombre des accidents de chaque type multiplié par leur coût unitaire. Sur cette base, le coût total des accidents est de 21,1 million de K par an. Si on met cela en proportion, ceci équivaut à une réduction de presque 2% de tous les autres coûts, c’est-à-dire que la réduction des accidents augmentera de 2% au maximum les économies réalisées grâce à un meilleur entretien.
Les chiffres ci-dessus sont clairement influencés par la valeur de la vie statistique utilisée, en notant que la valeur utilisée est nettement inférieure (par un facteur de 42) à celle appliquée en Australie. De plus, le taux relatif d’accidents pour l’autoroute Highlands est environ quatre fois plus élevé que le taux d’accidents de base de routes australiennes typiques avec des conditions similaires d’exploitation (McLean, 2001; Turner et al, 2009), ce qui n’est pas étonnant.
Les aspects à prendre en considération sont notamment : a) la valeur de la vie statistique, avec la possibilité que les méthodes actuelles de « perte de production » ne prennent pas suffisamment en compte la famille élargie, qui, dans les sociétés traditionnelles de Papouasie-Nouvelle Guinée et ailleurs, est souvent soutenue par un seul « gagneur de pain ». La perte de revenu peut affecter les possibilités d’éducation et de revenu d’une génération ; b) la nécessité de tenir compte de l’augmentation réelle de la croissance des revenus dans les PRFIs, et de l’augmentation conséquente des coûts « réels » des accidents ; c) le défi d’identifier des traitements techniques abordables pour atténuer les risques d’accidents, en notant que le coût réel des traitements routiers effectués dans les PRFIs et les PREs est pratiquement comparable (probablement une différence maximale de 2 à 3 fois), alors que la valeur attribuée au coût social des accidents est environ 40 fois inférieure).
Alternativement, la valeur des différentes gravités de blessures peut être calculée à l’aide des années de vie corrigées de la qualité de vie (AVAQ) et des années de vie corrigées de l’incapacité (AVCI). Les AVAQ mesurent la valeur d’un décès évité en tenant compte de la quantité et de la qualité de vie. Ils placent un poids de 1 pour une année de parfaite santé et de zéro pour la mort. Les AVCI, d’un autre côté, mesurent la qualité de vie perdue ou les années de vie perdues en raison d’une maladie ou d’une blessure. Ils représentent le fardeau constitué par des maladies ou des blessures. Elles peuvent aussi être utilisées pour mesurer les dommages matériels.
Les AVAQ et les AVCI sont largement utilisées en économie de la santé et très rarement en sécurité routière. L’Encadré 11.6 présente un exemple d’application des AVAQ et AVCI en sécurité routière en Colombie.
Pour estimer le coût des accidents en Colombie, Bhalla et al (2013) ont appliqué les méthodes de la volonté à payer et la valeur des années de vie statistiques (VAVS). Il s’agissait d’estimer l’incidence et la gravité des blessures causées par les accidents de la route.
En se fondant sur la relation bien établie entre la valeur de la vie statistique (VVS) et le PIB par habitant, ils ont utilisé différentes règles empiriques pour estimer le coût des accidents à l’aide des estimations AVCI. Ces règles sont décrites ci-dessous.
Source : Bhalla et al, 2013
Les coûts unitaires utilisés dans l’estimation sont présentés ci-dessous.
Source : Bhalla et al, 2013
Dans toute évaluation économique d’un projet routier, il est important d’identifier une année de référence à partir de laquelle tous les coûts et avantages futurs peuvent être évalués. En effet, la valeur d’un dollar reçu dans le futur est inférieure à la valeur actuelle d’un dollar (ceci est aussi connu comme la « valeur temporelle de l’argent »). Le taux d’actualisation est utilisé pour comparer les avantages obtenus et les coûts à différents moments au cours de la durée de vie d’un projet, en convertissant les coûts et avantages futurs en valeurs actuelles.
Le choix du taux d’actualisation peut avoir un effet significatif sur l’opportunité et la sélection des projets, en particulier si les avantages et les coûts s’accumulent plus tard dans la vie du traitement. Un taux d’actualisation plus élevé réduit la valeur des coûts et des avantages survenant plus tard dans la vie du traitement, ce qui favorise les projets dont les avantages surviennent au début du projet. La Banque mondiale recommande que les calculs de la valeur actualisée avec un taux d’actualisation de 12% (valeurs de 2014) soient inclus dans les propositions de projets routier (voir l’AIPCR, 2012; AASHTO, 2010). Il est cependant important de noter que cette valeur n’est pas nécessairement pertinente pour tous les pays, et que le taux d’actualisation utilisé peut être très différent. Par exemple, le taux d’actualisation est proche de 5% dans plusieurs pays de l’Europe occidentale.
Comme indiqué plus haut, l’approche standard pour le classement des traitements consiste à effectuer une analyse coûts-avantages, c’est-à-dire à comparer les avantages estimés de chaque schéma (en termes de la valeur des accidents qui seront évités) par rapport à ses coûts (mise en œuvre, entretien, etc.). Les traitements sont ensuite classés par ordre de priorité en fonction des meilleurs rendements économiques.
Comme mentionné précédemment, il est souvent difficile d’estimer les réductions probables d’accidents résultant des travaux correctifs car elles ne peuvent être fondées que sur l’expérience acquise dans le cadre de programmes similaires (Turner & Hall, 1994; Kulmala, 1994; Mackie, 1997).
Le choix des options de contre-mesures est fondé sur le taux de rentabilité de la première année (TRImm.), le taux de rentabilité interne (TRI), le rapport avantages-coûts (RAC), le rapport incrémental avantages-coût (RIAC), et la valeur nette actuelle (VNA). Cependant, les deux principaux indicateurs pour évaluer un projet ou un traitement sont le RAC et la VNA, qui montrent si les avantages du traitement proposé contrebalancent ses coûts, et si le traitement préféré présente le plus grand avantage social net.
Ceci représente simplement la valeur monétaire nette des avantages anticipés durant la première année du schéma, exprimée en pourcentage du coût total du capital.
Il convient de noter que les deux derniers éléments peuvent être considérés comme étant de faible importance, en particulier pour les schémas de faible coût, et qu’ils sont donc souvent ignorés.
Il ne s’agit pas là d’un critère d’évaluation rigoureux pour l’établissement des priorités, puisqu’il ignore les avantages ou les changements dans les coûts d’entretien après la première année. Cependant, il est très simple à calculer, et comme les programmes d’ingénierie de la sécurité routière produisent souvent, des taux de rendement de la première année supérieurs à 100%, des critères de décision plus sophistiqués peuvent ne pas être nécessaires. Cette méthode donne généralement des valeurs élevées avec des schémas peu coûteux, mais avec des économies d’accidents relativement faibles, et pour cette raison, elle est moins cohérente avec l’approche du Système sûr.
Le TRImm. peut aussi être utilisé pour évaluer le calendrier d’un projet particulier en le comparant avec le taux d’actualisation. Si le TRImm. est supérieur au taux d’actualisation, le projet peut, en théorie, aller de l’avant. Cependant, cela ne dit rien de la façon dont le projet considéré se compare à d’autres projets. Si le TRImm. est inférieur au taux d’actualisation, le projet devrait au minimum être reporté.
Des évaluations plus détaillées seront nécessaires pour les schémas dans lesquels les accidents et les niveaux de trafic sont supposés changer substantiellement d’une année à l’autre. Par exemple, un schéma avec un TRImm de 80% peut ne pas valoir la peine si des fermetures ultérieures de routes dues à la construction d’une nouvelle route limitent l’avantage à une seule année.
Un autre critère important utilisé pour évaluer les coûts et les avantages des projets routiers est le taux de rentabilité interne (TRI), qui est le taux d’actualisation qui rend la VAN égale à zéro ou le RAC égal à 1. Le graphique 11.6 donne un exemple théorique de l’incidence du taux d’actualisation sur la VAN d’un projet.
À un taux d’actualisation de 8 ou 10%, la VAN du projet est positive, alors qu’elle est négative à 12 ou 14%. À un taux d’escompte de 11%, la VAN est nulle, ce qui est connu sous le nom de taux de rentabilité interne (TRI). Le taux de rentabilité interne est préféré par les organismes d’aide multilatérale, comme la Banque mondiale, parce qu’il évite l’utilisation de taux d’actualisation locaux qui, selon leur valeur, peuvent avoir une incidence importante sur VAN ou le rapport VAN/VCA. Le TRI n’est pas particulièrement utile pour classer les projets, mais il est inclus ici aux fins d’exhaustivité.
Graphique 11.6 : Exemple de l’influence du taux d’actualisation sur la VAN
Le rapport avantages-coûts (RAC) est défini comme la valeur actualisée des avantages (VAA) divisée par la valeur actualisée des coûts (VAC) :
Lorsque la VAN d’un projet donné est positive, le RAC est supérieur à 1. Plus le RAC est élevé, plus les avantages sont importants. Le RAC est utilisé pour classer les projets lorsqu’il y a une contrainte budgétaire et il sert d’indicateur de l’efficacité économique du projet.
Le RDCA consiste à comparer par paires toutes les variantes ayant un RAC supérieur à 1 afin de déterminer l’avantage marginal obtenu pour une augmentation marginale du coût. Ensuite, après l’élimination de toutes les options dont le RAC est inférieur à 1, les options sont classées par ordre croissant de coût et le RAC marginal est déterminé par une comparaison par paires des variantess, en commençant par la plus économique puis la deuxième plus économique, comme suit :
Si le RDAC est plus grand que 1, l’alternative X + 1 est préférée, parce que le bénéfice marginal est supérieur au coût marginal. Inversement, si le RDAC est inférieur à 1, l’alternative X est préférée. L’option préférée alors retenue et la comparaison par paires se poursuit jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’une seule variante, qui devrait être la plus économiquement désirable de toutes les options envisagées.
Cependant, Ogden (1996) conclut que l’approche de RAC est plus lourde à utiliser que l’approche de VAN, et peut produire des résultats plus ambigus et trompeurs selon la façon dont les avantages et les coûts sont définis. Il convient de noter en particulier que les mesures de faible coût sont généralement favorisées lorsque le RAC sert de base à la sélection. Par exemple, l’installation de panneaux d’avertissement avancés de danger n’aura probablement qu’un effet limité (mais positif) sur les accidents graves, mais du fait du faible coût d’installation, cette mesure est susceptible d’avoir un RAC élevé. En revanche, les barrières latérales auront probablement (dans la situation adéquate) un effet plus significatif sur la réduction des accidents graves et mortels, mais étant donné le coût plus important de leur installation et de leur entretien, le RAC sera probablement plus faible. L’objectif de la sécurité routière est de parvenir à une réduction nette des blessures graves et mortelles. Le recours exclusif à l’approche de RAC peut produire des résultats qui sont incompatibles avec cet objectif. Par conséquent, l’approche de VAN/VAC utilisée en association avec celle de RCA est de loin préférable.
Ce type d’évaluation exprime la différence entre les coûts et les avantages actualisés d’un projet, qui peut s’étendre sur plusieurs années. Comme signalé précédemment, les avantages futurs doivent être ajustés ou actualisés avant d’être additionnés pour obtenir une valeur actuelle. Des changements peuvent aussi se produire au cours de la durée de vie du projet, ce qui aura une incidence sur les avantages dans les années suivantes.
Supposons (pour faciliter le calcul) que le taux actuel utilisé par le gouvernement pour les projets routiers est de 10%, ce qui, dans les conditions économiques actuelles, pourrait être considéré comme un peu élevé dans la plupart des pays. Cela signifie que 100 USD d’avantages accumulés cette année vaudront 10% de moins s’ils s’accumulent l’année prochaine. Un retard supplémentaire d’un an réduira de nouveau la valeur de l’avantage, et ainsi de suite. Ces chiffres peuvent être additionnés sur la durée de vie du projet afin d’obtenir la valeur actuelle des avantages (VAA).
La valeur actuelle nette est définie comme la différence entre la valeur monétaire actualisée de tous les avantages et les coûts d’un projet ou d’une mesure particulière. La VAN est exprimée comme la VAA moins la VAC. Une VAN positive indique une amélioration de l’efficacité économique par rapport au scénario de référence.
En ce qui concerne les priorités de mise en œuvre, les critères économiques pour l’évaluation des projets utilisant l’approche VAN sont les suivants :
Il convient d’être prudent lorsque l’on utilise la VAN comme seul critère d’investissement, car elle tend à indiquer des projets dont les coûts sont plus élevés.
Le choix des critères d’évaluation dépend en premier lieu des données disponibles, ainsi que de la portée du traitement. Les différents critères d’évaluation fournissent des informations sur le projet. La VAN renseigne sur les avantages sociaux totaux sur la durée de vie d’un projet. Le RAC met en lumière la relation entre la valeur actuelle des avantages (VAA) et les coûts de mise en œuvre d’un projet. Le TRI montre les taux auxquels les avantages sont réalisés après investissement dans une contre-mesure (AIPCR, 2012).
La VAN est le critère privilégié parce qu’elle fournit une estimation de l’importance absolue des avantages sociaux nets des traitements. D’autre part, le RAC fournit l’importance relative des coûts et des avantages d’un traitement et dépend de la classification des impacts du projet. Le tableau 11.6 indique quand utiliser les différents critères.
Critères | ||||
---|---|---|---|---|
Budget | Contexte de la décision | Valeur actuelle nette (VAN) | Rapport avantage-coût (RAC) | Taux de rentabilité interne (TRI) |
Budget illimité | Accepter/Rejeter la décision | Accepter si la VAN n’est pas négative ✔ | Accepter si le RAC dépasse ou égale 1 ✔ | Accepter si le TRI dépasse ou égale le taux de rendement minimum ✔ |
Sélection de l’option | Sélectionner le projet avec la plus haute VAN non négative ✔ | Pas de règle existante ✘ | Pas de règle existante ✘ | |
Budget limité | Accepter/Rejeter la décision | Sélectionner le projet de telle sorte que la VAN établie pour le projet soit maximisée, dans les limites du budget ✔ | Classer par RAC jusqu’à ce que le budget soit dépensé ou la tranche de RAC ait été atteinte ✔ | Pas de règle existante ✘ |
Sélection de l’option | VAN la plus élevée, dans les limites du budget ✔ | Pas de règle existante ✘ | Pas de règle existante ✘ |
Source : Austroads (2005).
Pour une approche complète et pas-à-pas sur les évaluations économiques, ainsi que pour un examen résumé des critères d’évaluation, voir l’AIPCR (2012), l’UE (2006) et HEATCO (2006). L’Encadré 11.7 donne un exemple d’évaluation économique au Belize.
Le projet de corridor de démonstration au Belize a été présenté dans les chapitres précédents. Ce projet a été développé grâce à la production et l’évaluation de plusieurs options d’investissement « prêtes pour les banques ». Trois options ont été élaborées dans le cadre d’un programme d’évaluation des routes. Pour ce faire on a eu recours à diverses hypothèses. L’avantage économique des décès et blessures évités est calculé en utilisant la méthodologie développée par McMahon et Dahdah (2008). Cette approche estime la valeur économique de la vie statistique à 70 fois le produit intérieur brut per capita aux prix courants, et la valeur économique d’une blessure grave à 25% de la valeur du décès. Le rapport entre le nombre de blessures graves et le nombre de tués est estimé à 10 :1. Des hypothèses sont aussi formulées sur les réductions attendues à partir de différentes combinaisons de traitements. Le tableau ci-dessous présente un résumé des trois options d’investissements.
Le développement de plusieurs options comme dans cet exemple est assez typique pour les projets de sécurité routière. Ceci aide à déterminer quelle combinaison de traitements est la plus avantageuse dans les limites du financement disponible. Dans le cas du Belize, et après discussion avec les parties prenantes du projet, les options ont été ajustées en choisissant une option à moindre coût, et les avantages et les coûts ont été recalculés. La VAN estimée du projet, utilisant des valeurs très prudentes du coût des accidents, est de 6,1 million de USD et le taux de rentabilité économique est de 28,8%, ce qui est très supérieur au seuil de rentabilité de la Banque caribéenne de Développement fixé à 12.0%.
Divers outils existent pour faciliter l’évaluation économique dans le domaine de la sécurité routière. Quelques exemples sont présentés ci-après.
L’Analyste de Sécurité (aussi décrit au chapitre 9.4) comprend un outil d’évaluation économique développé par l’American Association of State Highways and Transport Officials (ASSHTO, voir Harwood et al, 2010). Il évalue l’efficacité économique des contre-mesures pour un site routier spécifique. Cet outil permet à l’utilisateur de spécifier les coûts, les volumes de trafic, et toute autre donnée. Il fournit également des valeurs par défaut pour le traitement spécifié qui peuvent être utilisées dans l’estimation. L’utilisateur peut spécifier l’évaluation économique à effectuer, avec des options pour l’analyse coût-efficacité, le rapport avantages-coûts ou la valeur actuelle nette. Les mesures de l’efficacité sont obtenues à partir de modèles d’accidents observés, attendus et prédits pour le site concerné. Les contre-mesures et les sites sont classés au moyen de la fonction de classement de la priorité de l’Analyste de Sécurité, qui utilise les mêmes mesures que celles obtenues par l’outil d’évaluation économique et suggère aussi l’option optimale en fonction des contraintes budgétaires. Le choix des critères de priorisation appartient à l’utilisateur.
COBALT est un outil d’évaluation économique développé en 2012 par le ministère britannique des Transports. Il est dérivé de l’outil plus général d’évaluation des transports COBA (outil d’analyse coût-avantage). COBALT se concentre exclusivement sur les évaluations de la sécurité routière en utilisant la même approche d’analyse coût-avantage que COBA telle que décrite par le ministère des Transports (2011).
La Nouvelle-Zélande de possède pas d’outil spécifique d’évaluation économique de la sécurité routière, mais son Manuel sur l’évaluation économique (MEE) (NZTA, 2013) offre des recommandations claires et des modèles pouvant être utilisés dans le processus d’évaluation. Le MEE est un guide décrivant les procédures d’évaluation économique des propositions d’investissement dans les transports. Il décrit les concepts de base des évaluations économiques et les procédures simples et détaillées pour l’effectuer. Les procédures simples visent des activités à faible coût, tandis que les procédures détaillées sont destinées aux évaluations à grande échelle. Des méthodologies pas-à-pas pour évaluer les coûts et les avantages sont aussi disponibles par le biais de feuilles de calcul téléchargeables.
Il y a différentes feuilles de calcul pour différentes évaluations. La feuille de calcul pour la promotion de la sécurité routière contient six feuilles de procédures et quatre autres feuilles pour les notes de travail, les estimations de coût et les analyses de sensibilité. La feuille de travail 1 est un résumé de l’information générale du projet et des données utilisées pour l’évaluation. La feuille de travail 2 est utilisée pour calculer la valeur actuelle des coûts du projet. La feuille de travail 3 sert à calculer le coût social des accidents par personne, et la feuille de travail 4 sert à calculer la valeur actuelle des avantages du projet. La feuille de travail 5 est utilisée pour calculer le rapport avantage-coût par tête. La feuille de travail de couverture fait le résumé de toute l’information et de tous les calculs de la feuille de calcul. Pour chacune des étapes, des conseils sont fournis sur les informations nécessaires et les données d’entrée.
Les recommandations européennes sur les évaluations économiques et la priorisation des contre-mesures de sécurité routière sont également à la disposition des praticiens. Citons par exemple l’Observatoire européen de la Sécurité routière (ERSO- http://www.erso.eu/),
Développer des approches européennes harmonisées pour établir les coûts des transports et évaluer les projets (HEATCO- http://heatco.ier.uni-stuttgart.de/), et l’Analyse avantage-coût pour la prise de décisions (ROSEBUD, http://partnet.vtt.fi/rosebud/).
Le processus appliqué par l’iRAP (chapitre 10.4.4) permet non seulement d’identifier les problèmes et les interventions efficaces, mais aussi de produire des plans d’affaires détaillés comprenant le rapport efficacité-coût des interventions identifiées. Le tableau 11.7 présente un exemple d’un tel plan d’investissement en Ukraine.
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La première étape du processus d’évaluation du risque (Graphiqe 12.1) est le suivi et l’évaluation des interventions.
Graphique 12.1 : le suivi et l’évaluation dans le processus d’évaluation du risque
Comme décrit au chapitre 3, le suivi et l’évaluation sont la mesure systématique et continue des produits et des résultats (intermédiaires et finaux) de la sécurité routière, et l’évaluation des interventions pour atteindre l’objectif souhaité de résultats (FMSR, 2009). Ces tâches sont souvent négligées, mais elles sont essentielles pour une gestion efficace de la sécurité routière.
Les chapitres précédents ont fourni des informations sur le rôle du suivi et de l’évaluation dans la gestion de la sécurité routière, y compris son importance dans le cadre des objectifs et des programmes de sécurité routière (chapitre 3 et, dans une moindre mesure, chapitres 6 et 8), et le rôle qu’ils jouent dans les besoins de données (chapitre 5.2).
Le présent chapitre se concentre sur le processus de suivi et d’évaluation au niveau du réseau et du projet, et traite de l’importance de ce processus ainsi que de la manière d’entreprendre le suivi et l’évaluation.
Le suivi se réfère à la collecte systématique de données sur les résultats d’un programme ou d’une intervention en sécurité routière, pendant ou après sa mise en œuvre. L’évaluation implique l’analyse de ces données pour déterminer l’effet du traitement ou du programme.
Le processus de suivi et d’évaluation a pour but :
Un processus d’évaluation réussi requiert une planification minutieuse, comprenant la collecte de données de base, l’identification des objectifs avant la mise en œuvre, et l’examen des différentes méthodes d’évaluation qui pourraient être utilisées. Il est de plus essentiel que les résultats et la rétroaction de l’étude d’évaluation soient bien diffusés auprès des parties prenantes et les autres organismes intéressés.
Il existe trois principaux types d’évaluation. L’un ou plusieurs peuvent être appropriés pour une étude donnée, ceci dépend des objectifs de ce qui doit être évalué. Ces trois types sont
Les méthodes quantitatives aussi bien que les méthodes qualitatives peuvent être utilisées pour une étude d’évaluation. Les questions qualitatives sont plus utiles dans les évaluations de processus et de résultats sous forme de groupes de discussion ou de questionnaires à réponses ouvertes, et peuvent expliquer pourquoi une intervention n’a peut-être pas été fructueuse. Les études quantitatives produisent des résultats plus rigoureux par le biais d’essais contrôlés ou d’études avant-après.
Ainsi qu’indiqué au chapitre 11.4, l’information sur l’efficacité des interventions est également importante pour évaluer les avantages probables des améliorations en matière de sécurité. Le processus d’évaluation est important pour améliorer les connaissances sur l’efficacité de différentes interventions de sécurité routière dans différents types d’environnement. L’utilisation de ces informations dans la sélection et la priorisation des interventions est examinée au chapitre 11, tandis que le présent chapitre se concentre sur les méthodes de suivi et d’évaluation. Cependant, les agences doivent être prudentes avant de généraliser les résultats d’une évaluation.
Des processus doivent être établis pour la collecte des données pertinentes. Pour ceux qui ne font que commencer, cette collecte peut être entreprise dans le cadre d’un projet de démonstration dans un corridor ou une zone.
Des ressources humaines et financières pour le suivi et l’évaluation doivent être fournies, et le personnel clé de l’agence routière et les parties prenantes doivent être formés aux méthodes d’évaluation de base.
Avec des budgets limités, il est très important de démontrer que les interventions de sécurité routière sont efficaces et utiles. Ceci est particulièrement important dans les PRFI où des plans d’action complets n’ont été développés qu’assez récemment, avec des fonds limités du gouvernement central et des agences d’aide. De bonnes informations sur l’efficacité des interventions sont nécessaires pour assurer que les fonds limités disponibles sont dépensés de la manière la plus efficace possible. Il y a actuellement une grande lacune dans notre compréhension de la façon dont les différentes interventions améliorent la sécurité dans les PRFI. Le chapitre 11.3.4 souligne certaines des difficultés que pose l’utilisation de l’information des PRE sur l’efficacité des traitements dans les PRFI. Une approche fondée sur le retour sur l’expérience est nécessaire pour améliorer les connaissances sur l’efficacité des interventions dans les PRFI ; ceci ne peut se faire que par le suivi et l’évaluation des interventions dans ces pays.
Pire encore que l’utilisation inefficace d’un financement limité sont les interventions qui conduisent à une augmentation du risque d’accident. Malheureusement, cette situation se produit dans la prise de décisions de politique publique, y compris en matière de sécurité routière, souvent comme résultat d’une information insuffisante, d’une adaptation comportementale des usagers, ou d’un mauvais processus de mise en œuvre. Elle peut aussi être due à des compromis dans la prise de décision, où les considérations de sécurité ne sont pas aussi prioritaires que d’autres thèmes (tels que la mobilité).
Un exemple, qui illustre comment une intervention en matière de sécurité peut entraîner une augmentation du risque, est celui des programmes d’éducation des conducteurs. Bien qu’il puisse paraître peu probable qu’une augmentation de la formation et de l’éducation des conducteurs n’ait aucun effet ou même augmente légèrement le risque d’accident, c’est pourtant ce qui a été constaté. Il existe des preuves suffisantes pour démontrer que certaines formations avancées de conduite (comme les cours de contrôle du dérapage) augmentent de fait le risque d’accident (Helman et al, 2010, cité dans McKenna, 2010, et Williams, 2006, cité dans McKenna, 2010). Une étude systématique de Roberts et Kwan (2001, cité dans McKenna, 2010) sur les programmes d’éducation à la sécurité routière conclut qu’il n’existe pas de preuve d’une réduction du nombre d’accidents par suite de la formation des conducteurs et qu’il pourrait en fait y avoir une légère augmentation des accidents de la route chez les adolescents.
Diverses explications ont été avancées pour comprendre pourquoi l’éducation du conducteur n’amène pas d’effets positifs clairs. Cependant, cet exemple montre clairement que des informations précises sur l’efficacité en matière de sécurité routière sont nécessaires pour fonder des décisions politiques qui (avant tout) n’augmentent pas les risques et conduisent à une utilisation efficace de ressources limitées.
Bien que le suivi et l’évaluation soient une composante importante de la gestion de la sécurité des infrastructures, ils n’ont pas besoin d’être entrepris dans la même mesure pour chaque projet. Par exemple, si une intervention de sécurité, mise en œuvre dans une localité particulière, a déjà fait l’objet d’une évaluation approfondie, le besoin d’évaluations supplémentaires peut devenir plus limité. Les traitements de sécurité n’ayant eu que peu ou pas d’utilité dans la localité devraient être soumis à un processus d’évaluation approfondi.
Le chapitre 6 décrit le processus requis pour fixer des objectifs quantifiables de sécurité routière dans le cadre de l’élaboration de politiques et de plans. Comme mentionné dans ce chapitre, il est nécessaire de surveiller constamment les progrès réalisés par rapport à ces objectifs. En plus de surveiller les objectifs à long terme, il faut aussi s’assurer que les organismes et les ministères concernés mettent en œuvre les améliorations décrites dans le plan tout en surveillant les objectifs intermédiaires. Un tel suivi peut aussi aider à établir si ces activités ont l’effet souhaité sur les résultats en matière de sécurité routière. Dans de nombreux cas, le suivi permettra d’identifier les ajustements qui peuvent être apportés pour aider à améliorer les résultats en matière de sécurité routière. Les exigences concernant les données pour ces activités sont décrites au chapitre 5.
Les paragraphes suivants fournissent des recommandations pour évaluer les interventions en matière d’infrastructure de sécurité. Certaines de ces approches peuvent être utilisées pour évaluer les résultats par rapport à des objectifs. Cependant, l’évaluation du succès des interventions pour atteindre les objectifs peut s’avérer être une tâche plus complexe, parce que de nombreux changements se produisent souvent en même temps. Les solutions à ce problème comprennent l’évaluation des ensembles de traitement (c’est-à-dire déterminer l’effet des activités combinées qui sont connexes), ou l’application de modèles statistiques pour tenter de déterminer l’impact des mesures individuelles. Quelle que soit l’approche adoptée, la création d’un processus robuste de collecte et d’analyse de données est indispensable pour assurer que des données adéquates soient recueillies. Il faudra notamment disposer de données sur les résultats finaux (données sur les accidents) et de mesures intermédiaires (indicateurs de performance en matière de sécurité, par exemple diverses mesures comportementales, information extraite d’enquêtes d’attitude, et mesures des infrastructures). Pour plus d’information sur les exigences sur les données, voir le chapitre 5. En ce qui concerne l’évaluation des interventions dans des domaines autres que l’infrastructure, il existe plusieurs documents de référence importants, tels que le site web et la boîte à outils du Royaume-Uni sur l’évaluation des programmes d’éducation, de formation et de publicité : (http://www.roadsafetyevaluation.com), ainsi que des documents sur les bonnes pratiques pour le port du casque (FMSR, 2006) et la conduite en état d’ivresse (FMSR, 2007), la vitesse (2008), la ceinture de sécurité et les sièges pour enfants (FMSR, 2009).
On ne peut prendre de décisions efficaces en matière de mesures de sécurité routière sur l’infrastructure qu’avec une connaissance adéquate de leur efficacité. La mesure clé utilisée pour cette évaluation est la réduction attendue du nombre des accidents, exprimée sous forme de facteur de modification des accidents (FMA) pour l’intervention considérée. Ceci indique dans quelle mesure l’intervention devrait réduire le nombre d’accidents. Les FMA sont décrits en détail dans le chapitre 11.3.2. Ils aident les décideurs politiques à prendre des décisions, et les résultats d’études antérieures sont généralement utilisés pour fournir une estimation réaliste de l’effet attendu. Cependant, il existe de nombreuses lacunes dans les connaissances sur l’efficacité des interventions.
Une collaboration internationale sur l’évaluation efficace des interventions en matière d’infrastructures de sécurité routière a récemment été établie. Le document de l’OCDE/FIT (2012) « Partager la Sécurité routière » (Sharing Road Safety) contient les messages clés suivants
Voici quelques-unes des principales recommandations découlant de ces travaux :
La mesure ultime du succès d’une politique ou d’une intervention en matière de sécurité routière est l’effet qu’elle a eu sur la réduction des accidents, et en particulier sur les accidents mortels et les blessures graves. Malheureusement, il est difficile d’envisager les accidents de manière isolée, car il peut être nécessaire d’attendre plusieurs années après l’introduction de la contre-mesure ou de l’ensemble des mesures pour pouvoir valider les changements dans les statistiques sur les accidents. Étant donné qu’une indication de l’efficacité est souvent nécessaire dans un délai plus court, en particulier pour déterminer que tout a bien fonctionné, une rétroaction plus immédiate peut être nécessaire. Des mesures indirectes de la sécurité peuvent être utiles pour suivre l’efficacité des programmes (voir aussi le chapitre 5.2 pour le lien entre les mesures des résultats intermédiaires et finaux). Ces mesures substitutives sont habituellement des mesures de type observationnel. Il est souvent recommandé de conduire une évaluation en deux étapes, une phase à court terme (par exemple 6 mois) et une phase à plus long terme (par exemple 3 à 5 ans).
Dans la mesure du possible, la route ou la zone traitée devrait être observée immédiatement après l’achèvement des travaux de construction ; des visites régulières devraient être effectuées dans les jours, semaines et mois suivant l’achèvement des travaux, jusqu’à ce que l’équipe soit convaincue que le système fonctionne comme prévu.
Il est recommandé de répéter plus tard toute mesure comportementale réalisée antérieurement à l’étape de l’enquête (par exemple, comptage de conflits de circulation, mesures de la vitesse), car cela aidera à déterminer ou à soutenir le besoin de tout changement futur, ou pourrait en fait prouver le succès de l’intervention. Cette étude comportementale est aussi nécessaire parce que certaines caractéristiques d’une intervention peuvent, par exemple, produire une réaction imprévue chez les usagers de la route, et créer par suite une situation potentiellement dangereuse. Le suivi devrait mettre ce problème en évidence à un stade précoce afin que des mesures appropriées puissent être prises rapidement pour éliminer ce danger.
Dans le meilleur des cas, il peut être possible d’atténuer facilement ce risque, par exemple en réalignant les bordures pour prévenir les manouvres dangereuses. Dans le pire des cas, il pourrait être nécessaire de supprimer complètement la mesure et d’examiner des mesures alternatives.
Parmi les questions qu’il peut être pertinent d’évaluer mentionnons :
Il ne serait pas pratique d’effectuer des études comportementales détaillées pour tous les changements mineurs, mais de telles études sont cependant importantes pour les interventions coûteuses telles que les traitements à l’échelle d’une région ou des traitements par actions de masse.
Il peut être préférable de laisser le programme fonctionner pendant environ deux mois avant de mener une étude de comportement ex post. Ceci devrait constituer une période « d’accoutumance » durant laquelle les usagers réguliers s’habituent à la nouvelle caractéristique de la route et où les effets d’apprentissage ont largement disparu. L’évaluation doit vérifier les impacts en termes de sécurité pour tous les usagers. Les effets globaux d’un projet doivent être compris comme leur ensemble. Par exemple, l’implantation d’une piste cyclable peut être dangereuse si celle-ci est utilisée par les motocyclistes.
L'étude de cas (Encadré 12.1) montre un exemple d'évaluation basée sur l'observation des comportements (vitesse et position de la voie) en Malaisie.
Le problème : Sur la base des résultats d'une évaluation de la sécurité routière le long de la route fédérale 1 en Malaisie, deux tronçons à chaussée unique dans l'État de Perak ont été identifiés comme présentant un risque élevé de collision frontale. Les observations sur le site ont révélé une forte prévalence de dépassements illégaux et une mauvaise discipline sur les voies de circulation. On a observé que les véhicules qui se trouvaient sur la voie de contournement s'éloignaient du terre-plein central, ce qui créait des conflits avec les véhicules qui se trouvaient sur la voie de gauche. Une étude de la vitesse sur les sites avait indiqué que la vitesse d'exploitation était légèrement supérieure à la limite de vitesse affichée.
La solution : L'installation d'une trappe centrale a été identifiée comme une option viable pour assurer une plus grande séparation entre les véhicules circulant en sens inverse et pour réduire la vitesse du trafic. L'éclosion centrale (aussi connue sous le nom de médiane peinte ou flush) est l'une des contre-mesures perceptuelles de la vitesse. Il s'agit de marquages routiers relativement peu coûteux et non intrusifs, qui n'impliquent généralement que de la peinture. En plus de réduire les conflits, d'encourager un meilleur positionnement latéral des véhicules et des vitesses plus basses, il est également utilisé dans le cadre de la gestion des accès et pour fournir aux piétons un endroit pour s'arrêter pendant la traversée. La figure montre la bande centrale de 1,0 m installée à l'un des sites de l'étude.
Figure : Installation d'une bande centrale sur une courbe horizontale
Le résultat : Les résultats ont montré que la mise en œuvre du hachurage central s'est avérée efficace pour réduire la vitesse des véhicules et améliorer la discipline sur les voies. On a constaté que la vitesse moyenne de déplacement des véhicules avait considérablement diminué de 3 km/h et que la position latérale des véhicules par rapport à la ligne de démarcation médiane (ligne médiane ou hachure centrale) avait diminué de façon significative. Il indique que les conducteurs peuvent se sentir plus en sécurité en restant dans leur voie pour éviter d'entrer en conflit avec les véhicules adverses.
Source : 1Godley, S., Fildes, B., Triggs, T. et Brown, L. 1999. Contre-mesures perceptuelles : recherche expérimentale. Rapport n° CR 182, Monash University Accident Research Centre, Victoria ; 2Alvin Poi W.H. et Jamilah M.M. 2010. The Safety Effects of Central Hatching on Four-Lane Rural Roads in Malaysia. Dans Proc : Conférence MIROS sur la sécurité routière, 8-9 décembre 2010. Kuala Lumpur.
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La forme la plus importante d’évaluation de toute mesure de sécurité consiste à déterminer son effet sur les accidents et si l’intervention a permis d’en réduire le nombre (en particulier les accidents graves et mortels) comme attendu. L’évaluation comprend l’analyse des données d’accidents en comparant les résultats en matière de sécurité avant et après un changement. Il s’agit souvent d’analyses statistiques. Pour être raisonnablement sûr que la nature aléatoire des accidents a été prise en compte, il faudra normalement attendre plusieurs années avant d’obtenir un résultat valable. Encore une fois, un retour d’expérience plus immédiat est souvent nécessaire et parfois une méthode de suivi à plus court terme peut être appliquée.
Outre la question de l’échelle de temps, d’autres facteurs compliquent le processus (apparemment simple) d’évaluation de l’efficacité des changements du nombre d’accidents sur les sites, routes ou zones traités. Les principaux sont :
Chacun de ces points est examiné ci-dessous.
Cet effet complique les évaluations pour les sites où le nombre d’accidents est élevé. Les lieux d’accidents à traiter sont généralement choisis parce qu’ils ont été la scène de nombreux accidents. Dans certains cas, le nombre élevé d’accidents peut être le résultat d’une seule année particulièrement mauvaise, et cela peut être le fruit du hasard. Le nombre d’accidents à cet endroit aura tendance à baisser fortement l’année suivante même si aucune intervention n’est appliquée. Même si une période de trois ans est utilisée, les accidents peuvent être dus à des fluctuations aléatoires, et au cours des années suivantes, ces sites connaîtront des chiffres inférieurs. C’est ce qu’on appelle régression à la moyenne. On croit qu’il peut exagérer l’efficacité d’un traitement de 5 à 30%.
Mountain, Maher et Fawaz (1998) donnent un exemple clair de régression à la moyenne qui peut entrainer une surestimation de l’efficacité de l’intervention. Dans une vaste étude couvrant plus de 900 sites et 13.912 accidents, ils ont comparé les accidents se produisant durant les périodes « avant », la période de latence (le temps entre la sélection d’un site à traiter et l’exécution réelle du traitement), et la période « après ». Le nombre d’accidents a été ajusté pour tenir compte des différentes durées de période prise en compte. Les données sont résumées dans le Tableau 12.1. La différence entre le nombre d’accidents survenant durant la période de latence et le nombre d’accidents se produisant durant la période « avant » est considérée comme la mesure de l’effet de régression à la moyenne.
Traitements | Estimations partiales de la réduction grâce au traitement (%) | Estimations impartiales de l’effet du traitement (%) | Réduction estimée due à la régression à la moyenne |
---|---|---|---|
Traitements de surface | 46 | 23 | 23 |
Traitements de surface – accidents dus à la route mouillée seulement | 67 | 27 | 40 |
Mini-giratoires | 68 | 65 | 3 |
Autres améliorations de carrefours | 42 | 27 | 15 |
Réalignement de routes de liaison | 63 | 37 | 26 |
Améliorations d’autres liaisons | 34 | 10 | 24 |
Schémas d’éclairage public | 27 | 5 | 22 |
Schémas de gestion du trafic | 41 | 22 | 19 |
Tous les types de traitement | 43 | 23 | 20 |
Source : Adapté de Mountain, Maher et Fawaz (1998).
Durant de nombreuses années, les statisticiens ont débattu de ce problème et la manière de le traiter (par exemple Abbess et al, 1981; Hauer & Byer, 1983; W & Boyle, 1987; Maher & Mountain, 1988; Kulmala, 1994; Radin Umar et al, 1995).
La meilleure manière de tenir compte de la régression à la moyenne et des changements dans l’environnement peut être l’utilisation de sites témoins qui ont été choisis exactement de la même façon que les sites traités et qui ont été identifiés comme ayant des problèmes similaires, mais qui n’ont pas été traités. La décision de traiter ou non un site est fondée sur une affectation aléatoire. Ce type d’expérience contrôlée (ou essai contrôlé aléatoire) est rare dans les projets d’infrastructure de sécurité routière, car il est difficile de justifier la décision de ne pas traiter un site identifié comme étant à haut risque.
Ces dernières années, l’approche empirique de Bayes s’est révélée être un moyen efficace de minimiser l’impact de la régression à la moyenne. Bien que l’approche empirique de Bayes soit reconnue comme une bonne pratique en matière d’évaluation de la sécurité routière, tous les pays (et spécialement les PRFIs) n’auront pas forcément l’expérience de cette technique. Si cette approche recommandée, n’est pas utilisée, il faudrait à tout le moins procéder à une l’analyse avant-et-après à l’aide de sites de comparaison, en recueillant au moins trois (mais de préférence cinq) ans de collecte de données pour la période « avant ». Ceci s’explique par le fait que la régression à la moyenne tend à diminuer s’il est examiné sur des périodes plus longues. Par exemple, dans une étude menée dans deux comtés du Royaume-Uni, Abbess et al (1981) ont calculé que la régression à la moyenne avait les effets suivants :
Là où l’approche empirique de Bayes n’a pas été utilisée, les ajustements ci-dessus pourraient être pris en compte dans le calcul dans celui de la réduction du nombre des accidents résultant des contre-mesures.
Changements dans les tendances générales d’accidents, y compris le flux de trafic
Lors de l’évaluation des changements dans les accidents (ou pour la plupart des mesures de suivi décrites au chapitre 12.4.1), d’autres facteurs non affectés par le traitement peuvent encore influencer cette mesure, et doivent donc être pris en compte. Il peut s’agir d’une modification de la limitation de vitesse sur les routes incluant le site d’accidents traité, de campagnes locales ou nationales de sécurité routière, ou de plans de gestion du trafic susceptibles d’affecter le volume de trafic (par exemple, la fermeture d’une intersection près du site produisant un changement marqué dans les habitudes de circulation). Les changements liés à des facteurs externes peuvent être compensés en comparant le site étudié pour la même période « avant-et-après »avec des sites de comparaison (parfois appelés sites de contrôle) n’ayant pas été traités. Afin de valider ces données, il est important que ces autres sites subissent exactement les mêmes changements que le site évalué.
Les données de comparaison peuvent être recueillies soit par paires soit par zones de contrôle. Un site témoin de contrôle par paire consiste à trouver un site géographiquement proche du site traité (mais pas trop proche pour être affecté par une déviation du trafic) et présentant des caractéristiques générales similaires. De cette façon, le site de contrôle sera soumis aux mêmes variations locales pouvant affecter la sécurité (par exemple les conditions météorologiques, les flux de trafic, les campagnes de sécurité, etc.).
Dans la pratique, il peut être difficile de trouver d’autres sites présentant des problèmes de sécurité similaires qui seront délibérément laissés sans traitement à seule fin d’analyse statistique. C’est pourquoi on a souvent recours à des comparaisons de zones comprenant un grand nombre de sites. Les sites du groupe témoin devraient être aussi similaires que possible aux sites traités, et ne devraient pas être affectés par le traitement’.
Il y a encore une controverse quant à l’existence de l’effet de « migration des accidents », mais certains chercheurs soutiennent qu’il est réel (Boyle & W, 1984; Persaud, 1987). Il a été constaté que les accidents tendent à augmenter sur les sites adjacents à un site traité avec succès, produisant un apparent transfert ou « migration » d’accidents. La raison de cet effet n’est pas claire, mais une hypothèse est que les conducteurs « compensent » l’amélioration de la sécurité sur les sites traités en étant moins prudent ailleurs.
Évidemment, pour détecter cet effet, il faut comparer la fréquence des accidents dans les environs des sites traités avant et après traitement avec un groupe témoin approprié. En d’autres termes, le domaine de l’étude d’évaluation doit être élargi pour inclure les routes pouvant être impactées par le projet et les sites de comparaison n’ayant pas été affectés doivent être identifiés.
Cependant, il n’existe pas encore de technique établie pour estimer cet effet pour un site particulier. La première occurrence signalée de cet effet (Boyle et W, 1984) a révélé une augmentation globale des accidents dans les zones avoisinantes de presque 9%. Une étude ultérieure (Persaud, 1987) portant sur un plus grand nombre de sites a estimé l’augmentation à 0,2 accidents par site et par an.
Une étude d’Austroads (2010) a identifié les effets de certaines interventions sur la redistribution du trafic, et suggère que celle-ci pourrait être la cause de la migration. Si la circulation est réduite à l’endroit traité, il est probable qu’elle sera augmentée à un endroit voisin (ceci est probable dans toutes les situations, à l’exception de la rare circonstance dans laquelle le nombre de déplacements est faible). Il est suggéré que cette redistribution est plus probable dans le cas de certains types de traitement. Pour ces interventions, l’évaluation des effets devrait inclure une zone géographique plus vaste pour identifier les endroits où l’exposition (et donc le risque) peut se trouver augmentée. Les interventions identifiées comme pouvant causer de tels effets comprennent :
Plusieurs documents offrent des exemples détaillés de méthodes d’évaluation des infrastructures de sécurité routière. Il s’agit notamment de :
L’étalon d’or en méthodologie d’évaluation est l’« essai contrôlé » ou essai contrôlé aléatoire (RCT). Comme indiqué précédemment, cette approche se rencontre très rarement dans l’évaluation des interventions en matière d’infrastructure de sécurité routière. Ceci s’explique principalement par la crainte de ne pas traiter des sites à haut risque, mais aussi par des questions telles que le manque de connaissances en la matière. En affectant au hasard les sites dans un groupe expérimental ou groupe témoin, il convient d’éliminer tout biais découlant du traitement des sites ayant les pires antécédents d’accidents. Les facteurs externes qui entrent en jeu au fur et à mesure de l’évaluation (tels que les programmes de sanction policière imprévus dans la zone des essais) sont aussi pris en compte, car on peut supposer que les facteurs externes affectent également les sites de traitement et de contrôle. La différence entre les sites traités et les sites témoins durant la période « après » est un reflet fidèle de l’influence du traitement.
L’approche actuellement recommandée pour l’évaluation des interventions d’infrastructure est la méthode empirique de Bayes (ou EB). Hauer (1997) explique la procédure dans sa forme la plus simple qu’il est recommandé de lire pour qui souhaite comprendre la logique soutenant cette approche en matière de sécurité routière. Ce qui suit est un aperçu très simplifiée de cette approche.
L’approche EB utilise le concept d’un nombre « attendu » d’accidents ou de moyenne à long terme calculée sur une période aussi longue qu’il est jugé utile. Le second concept est la « population de référence » ou un ensemble de sites ou routes similaires pour lesquels des données sont disponibles (par exemple, tous les carrefours d’un certain type dans un réseau). La population de référence agit comme un groupe témoin. Dans la version classique de l’approche EB, le nombre d’accidents qui serait attendu sur un site de traitement si aucune intervention n’avait eu lieu, est estimé et comparé avec le nombre d’accidents réellement survenus. La comparaison du nombre réel d’accidents avec le nombre attendu indique l’influence du FMA.
Une méthode fréquemment appliquée pour l’évaluation de la sécurité des infrastructures est l’étude « avant-et-après » en utilisant un groupe de comparaison. Même si cette approche n’aborde pas complètement le problème de la régression à la moyenne (bien que, comme déjà signalé, l’utilisation d’une période « avant » plus longue puisse réduire cet effet), elle limite néanmoins l’impact des facteurs extérieurs. L’approche compare les résultats des sites de traitement avec ceux d’un ensemble de sites de comparaison (parfois appelés « sites témoins ») aux caractéristiques semblables à celles du site traité dans tous leurs aspects importants, à l’exception du fait qu’aucun traitement ne leur est appliqué. L’approche suppose que les facteurs externes agissent à la fois sur les sites traités et sur les sites témoins de manière identique, et peuvent donc être mesurés et pris en compte. Comme les sites traités et les sites témoins sont soumis aux mêmes ensembles de variables externes, toute différence dans les résultats de sécurité doit être l’effet du traitement.
La forme d’évaluation la plus élémentaire (et souvent appliquée) est de simplement comparer les taux d’accidents durant la période « avant » l’exécution d’une intervention avec les taux d’accidents « après » l’intervention (ceci est connu comme une simple ou naïve « étude avant-après », c’est-à-dire sans groupe témoin). Cette approche n’est pas recommandée, parce qu’elle ne prend pas adéquatement en compte la régression à la moyenne ou les variables externes.
Les études transversales ont aussi été utilisées pour essayer d’identifier les effets des interventions de sécurité. Elles comparent les résultats de sécurité de sites possédant une ou plusieurs caractéristiques particulières avec des sites ne les possédant pas. Il est supposé que les différences dans les résultats en matière de sécurité sont dues à ces caractéristiques. Il existe de nombreuses difficultés dans l’utilisation de cette approche (en particulier les différences entre les sites autres que les caractéristiques d’intérêt, et les taux différentiels d’accidents qui peuvent avoir conduit à cette caractéristique), par conséquent, elle ne devrait pas être utilisée pour ce type d’évaluation (cependant, si elle est utilisée, les limitations devraient être bien comprises et documentées).
Lors de l’évaluation d’un traitement particulier, il est habituellement nécessaire de chercher la réponse à ces deux questions :
La nature rare et aléatoire des accidents de la route peut entrainer des fluctuations assez importantes de la fréquence des accidents survenant au même endroit d’une année à l’autre, même si le niveau de sécurité sous-jacent n’a pas été modifié. Cette variabilité supplémentaire rend les effets d’un traitement plus difficile à détecter, mais un test de signification statistique peut être utilisé pour déterminer si le changement observé dans le nombre d’accidents est susceptible de s’être produit par hasard ou non.
Le principal problème avec l’utilisation des données d’accidents pour l’évaluation (y compris en supposant une grande exactitude d’enregistrement) est de distinguer les changements dus au traitement et ceux dus à d’autres sources. Comme cela a été expliqué précédemment, même si les sites choisis sont de bons groupes de comparaison prenant en compte les influences environnementales, il existe d’autres facteurs de confusion dont il faut tenir compte.
Pour choisir les périodes de temps utilisées pour comparer les accidents avant et après les traitements, plusieurs points sont à prendre en compte, notamment :
Développé par l’American Association of State Highways and Transportation Officials (AASHTO), l’outil d’évaluation des contre-mesures fait partie de l’ensemble d’outils appelé l’Analyste de Sécurité. Il fournit des conseils pas-à-pas pour l’évaluation des avantages des interventions de sécurité utilisant l’approche empirique de Bayes. Par conséquent, il est capable de comptabiliser l’effet de régression à la moyenne. En plus de détecter le changement global du nombre d’accidents (les FMA), l’outil peut aussi identifier l’effet sur des types d’accidents cibles spécifiques. Pour plus de détails, voir Harwood et al (2010) ou http://www.safetyanalyst.org/evaltool.htm .
Source : Harwood et al (2010).
© ARRB Group
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