Manuel de sécurité routière
Un manuel pour les praticiens et les décideurs
pour la mise en œuvre d’une infrastructure sûre

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11.2 Approches au niveau du projet et au niveau du réseau

Faire des évaluations à l’échelle du réseau pour guider l’élaboration du programme est un élément essentiel d’un programme d’ensemble de sécurité routière pour une administration routière. Ceci devrait être fondé sur une bonne compréhension des risques et des problèmes à l’échelle du réseau. Il est également nécessaire d’identifier les risques au niveau du projet en cohérence avec l’approche de niveau supérieur à l’échelle du réseau. Ces deux aspects sont examinés au chapitre 10. De la même manière, des approches au niveau du réseau peuvent être adoptées pour traiter du risque identifié grâce à des interventions efficaces en matière d’infrastructure. Afin d’aborder les problèmes à l’échelle du réseau, une mise en œuvre à grande échelle des traitements est possible.

Le meilleur exemple documenté de cette approche est peut-être celui de la mise en œuvre du concept des routes 2+1 en Suède, comme décrit dans l’étude de cas de l’Encadré 11.1.

Encadré 11.1 : Etude de cas : Conception d’une route 2+1 en Suède

Le problème : il a été reconnu que le réseau routier rural, avec un profil transversal de 13 m, avait de très mauvais résultats en matière de sécurité par rapport aux autres types de routes.

La solution : en 1998, l’Administration suèdoise des routes (SRA) a lancé un programme novateur de sécurité routière visant à fournir des routes sûres de 13 m de section transversale de manière économique.

Les routes de 13 mètres se composaient d’une seule voie dans chaque direction et de larges accotements. Le traitement 2+1 consistait à réduire les accotements à 1 m et à prévoir deux voies dans un sens et une voie dans l’autre, avec une barrière médiane étroite et flexible (câble métallique). Bergin et Peterssent (2010) ont conclu que les barrières de sécurité modernes flexibles telles que celles installées sur les routes suédoise sans collision sont le facteur ayant le plus d’impact sur les résultats de la sécurité routière. Les barrières souples absorbent l’énergie de l’impact et dans la plupart des cas évitent les blessures graves associées aux chocs frontaux (Larsson, Candappa & Corben, 2003). Dans la nouvelle conception, la voie du milieu change de direction tous les quelques kilomètres.

Les résultats : à partir de Janvier 2008, presque 1.800 km de routes sans collisions avaient été ouvertes. L’évaluation du programme a révélé une réduction de 76% du nombre de tués, avec des performances de sécurité équivalentes à celles d’une autoroute. De plus, après l’analyse de la conception 2+1 de la route, il a été prédit une réduction du nombre de tués et de blessés graves de 65 à 70% pour les motocyclistes. Cette approche de conception est maintenant utilisée dans de nombreux pays d’Europe, et des essais ont aussi été entrepris dans d’autres parties du monde.

L’exemple ci-dessous montre une conception de route 2+1.

 

En plus de la mise en œuvre au niveau du réseau de traitements spécifiques (tels que le concept 2+1 illustré ci-dessus), il est également possible d’élaborer des cadres qui fournissent des orientations pour l’application de types de traitement. La Nouvelle-Zélande, par exemple, a développé un cadre pour guider les décisions d’investissement en matière de sécurité, en fonction du niveau de risque collectif ou individuel d’accidents.

Le Graphique 11.2 s’inspire de cette approche et illustre comment le risque collectif et individuel peut être utilisé pour influencer des résultats en matière de sécurité de manière économique. Le risque individuel fait référence au risque de sécurité routière tel qu’il s’applique à un usager de la route. Il est souvent exprimé comme la probabilité pour un usager de la route d’être impliqué dans un accident (souvent en nombre d’accidents par véhicule-kilomètres parcourus, ce qui tient compte du volume de trafic. D’autres mesures sont aussi disponibles). Le risque individuel est une mesure utile pour évaluer la qualité (en termes de sécurité) d’une infrastructure routière. Le risque collectif fait référence au nombre total attendu d’accidents pour tous les véhicules (par exemple les accidents par kilomètre), et est fortement influencé par le volume de trafic.

En utilisant l’information sur le risque collectif et personnel/individuel, les types de traitements peuvent être regroupés en quatre catégories :

  1. transformation en Système sûr,
  2. corridors plus sûrs,
  3. gestion de la sécurité et
  4. entretien de sécurité.

Graphique 11.2 : Diagramme de risques. Source : Adapté de Durdin & Janssen (2012).

Pour les routes à fort volume de trafic, le nombre attendu d’accidents graves est élevé, et pour celles qui ont des caractéristiques d’ingénierie inférieures aux normes pour leur fonction, ce nombre sera probablement plus élevé aussi bien dans les zones à risque collectif que dans les zones à risque individuel (la zone en rouge dans le graphique11.2). Un investissement substantiel dans les traitements de sécurité sur ces routes serait souvent justifié, par des travaux de transformation en Système sûr (par exemple une modernisation importante, la fourniture d’un itinéraire alternatif de meilleure qualité, des échangeurs de type autoroutier, etc.). Le chapitre 11.3.2 donne d’autres exemples de ces traitements plus coûteux mais très efficaces.

Les routes qui présentent des risques collectifs et individuels intermédiaires relèvent des catégories Corridors plus sûrs ou Gestion de la Sécurité (zones orange et jaune dans le graphique 2). Par exemple, les autoroutes dans les zones rurales à trafic modéré, certains accidents sévères localisés et dispersés et une conception déficiente peuvent tomber dans la catégorie Corridors plus sûrs. L’approche de traitement la plus efficace peut passer par des améliorations à l’échelle du corridor en utilisant une combinaison de solutions coûteuses et économiques (par exemple, installation de barrières de sécurité, marquages au sol, modernisation des carrefours, etc.).

Les idées de la Gestion de la sécurité peuvent s’appliquer aux routes où le volume de circulation est plus faible, où les accidents graves sont plus dispersés (par exemple rues et routes locales) et où les normes routières sont toujours inadéquates. Le meilleur rendement économique pour la sécurité serait obtenu par des traitements peu coûteux, à l’échelle du réseau et/ou de corridors, comme la révision des limites de vitesse, le marquage au sol ou une gestion ciblée du patrimoine routier (par exemple re-surfaçage de la chaussée et les traitements associés, comme l’étanchéisation de l’accotement). Cette catégorie inclut aussi les routes à haut risque collectif d’accidents graves en raison d’un volume de trafic élevé, mais avec un bon niveau général de sécurité routière (par exemple, les autoroutes urbaines). Les mesures les plus rentables peuvent être fondées sur des changements systémiques ciblés, par exemple des techniques de gestion d’autoroutes des mesures d’application pour l’infrastructure.

Les routes à faible risque collectif et individuel (zone verte dans le graphique 2) sont les plus susceptibles de faire l’objet d’activités d’entretien de sécurité. Ceci implique souvent des changements progressifs et systémiques tels que la gestion des routes (par exemple, gestion de l’adhérence), des améliorations de la signalisation et du marquage au sol, et d’autres bonnes pratiques d’entretien.

Le graphique 11.2 montre qu’à mesure que le risque collectif et individuel augmente, il faudra probablement des traitements plus extensifs. Au fur et à mesure que le risque progresse vers des catégories plus élevées, les avantages de l’application d’options de traitements des catégories inférieures devraient aussi être considérés.

Bien qu’elle ait été développée et mise en œuvre dans les PREs, cette approche est tout aussi utile dans les PRFIs, en particulier pour l’amélioration de l’infrastructure routière existante. Elle peut constituer un moyen efficace d’aider à prioriser les activités de sécurité routière.

Références

No reference sources found.