Manuel de sécurité routière
Un manuel pour les praticiens et les décideurs
pour la mise en œuvre d’une infrastructure sûre

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6.3 Renforcer la capacité pour fixer des objectifs et les atteindre

Conditions pour des résultats efficaces en sécurité routière

Les facteurs critiques de succès (aussi bien pour les PRE que pour les PRFI) comprennent la capacité d’un pays à :

  • analyser la situation actuelle au regard des accidents de la route (en s’appuyant autant que possible sur des données),
  • identifier les problèmes de la sécurité routière,
  • établir des objectifs qui font sens pour la sécurité routière, et des plans d’action avec des calendriers et des responsabilités identifiées pour les atteindre,
  • obtenir le financement, activer les ressources humaines qualifiées et mettre en place des moyens efficaces de consultation et de prise de décision pour soutenir la réalisation des actions,
  • mettre en œuvre des interventions efficaces et
  • examiner régulièrement les résultats.

Les lignes directrices pour l’examen de la capacité (FMSR, 2009, 2013; Chapitre 3.2.2) reconnaissent la nécessité de progresser, avec le temps, d’une faible vers une forte capacité institutionnelle, et de mettre en œuvre progressivement cette capacité améliorée. Ceci a bien sûr des implications pour l’efficacité des actions à court terme identifiées. Développer et essayer de produire une stratégie à court terme si les connaissances et les capacités de mise en œuvre ne sont pas suffisantes ne produira probablement pas de résultats significatifs durant la phase de mise en place (OCDE, 2008).

Établir, dans les PRFIs, les structures d’organisation et les processus des pays qui ont conduit une gestion systématique de la sécurité routière durant un certain temps, ne se fera pas du jour au lendemain. Bliss et Breen (2012) indiquent que pour arriver à de bons résultats, il faut une volonté politique à long terme qui se traduira en investissements en sécurité routière vers une variété de secteurs, ainsi qu’en matière de gouvernance et d’institutions, d’infrastructure, des parcs de véhicules, de normes d’accès à la conduite, de comportements de sécurité et du système de santé. Ce ne sont pas là des tâches triviales. Un temps suffisant doit être prévu pour le développement des compétences des personnes et des organisations.

L’Encadré 6.1 décrit le développement d’un cadre pour assister les nations africaines dans l’établissement d’un plan d’action stratégique national pour la sécurité routière. L’Encadré 6.2 traite des pays d’Asie du Sud-Est.

Encadré 6. 1 : Étude de Cas : Gérer la sécurité routière en Afrique : Un cadre pour les agences nationales chefs de file

Le problème : l’Afrique a le taux per capita de décès par accident de la route le plus élevé du monde ; ce taux est supposé empirer d’ici à 2030. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime ce taux à 24,1 pour 100 000 habitants, contre 18,5 en Asie et 10,3 en Europe. Bien que l’Afrique ait l’une des plus faibles densités de réseau routier, seulement 2% des véhicules motorisés du monde, et ne représente que 12% de la population mondiale, elle compte pourtant pour 16% des décès par accident de la route dans le monde. Les accidents de la route causent deux fois plus de décès que la malaria. De nombreuses victimes d’accidents de la route sont pauvres, ou sont poussées dans la pauvreté par suite d’un accident de circulation. Les projets traitant de la sécurité routière sont généralement de petite taille et avec une coordination insuffisante pour obtenir des résultats mesurables de l’amélioration de la sécurité routière.

La solution : lors d’une conférence au Ghana en 2007, les Ministres africains chargés des transports et de la santé se sont engagés à améliorer les services de ces secteurs, afin de prévenir les accidents de la route. En 2011, le Plan d’Action africain pour la Sécurité routière 2011-2020 a été adopté, et approuvé par la Conférence des Ministres de l’Union africaine. Ce plan établit le cadre de développement d’un système de gestion de la sécurité routière visant à guider les pays d’Afrique dans leurs efforts pour établir une agence nationale chef de file et pour améliorer la sécurité routière et la santé publique. L’objectif de ce cadre est d’accroître la capacité nationale à aborder les problèmes de sécurité routière. Un engagement national est nécessaire pour diriger les efforts d’un pays en matière de sécurité routière et pour défendre des fonctions de gestion institutionnelle.

Les résultats : ce cadre constitue un outil pour la préparation d’un plan d’action national stratégique en sécurité routière, Le cadre décrit dans le Plan renforce les fonctions de gestion institutionnelle stratégiques de l’agence chef de file, afin de générer : une approche centrée sur les résultats pour aborder les problèmes de sécurité routière, des processus systématiques de gestion des données, la coordination entre les agences et les parties prenantes principales pour obtenir une compréhension et un soutien de la sécurité routière, une législation efficace pour les routes, les véhicules et les usagers, traitant du respect des règles de circulation et sanctions policières, l’affectation de financement et ressources suffisants aux initiatives de sécurité routière, la sensibilisation et l’éducation du public au sujet de la sécurité routière, le suivi des progrès et l’évaluation des succès.

Les agences chefs de file peuvent utiliser cet outil pour renforcer leur capacité à prendre de meilleures décisions d’investissement en sécurité routière.

Pour plus d’information, voir la page Internet du PTASS :

http://www.ssatp.org/en/publication/managing-road-safety-africa-framework-national-lead-agencies.

Source : Programme PTASS de Politique des Transports en Afrique, 2014.

Encadré 6.2 : Étude de cas : l’amélioration de la sécurité routière dans la région ASEAN (Association des Nations de l’Asie du Sud-Est)

Le problème : dans la région Asie et Pacifique, la rapide motorisation, et en particulier la croissance explosive des parcs de motocyclettes, crée des problèmes de sécurité routière graves et croissants. La crise est particulièrement aigue dans les pays asiatiques en développement, où les accidents de la route sont maintenant la deuxième cause principale de décès prématurés pour la tranche d’âge de 5 à 14 ans, et la cause principale pour la tranche de 15 à 44 ans qui représente le segment économiquement le plus productif de la population. Les accidents de la route ont des impacts majeurs sur la santé, la pauvreté et le développement social, et sur les économies des pays de l’Asie et du Pacifique. Dans les 10 pays que compte la région ASEAN, les accidents de la circulation sont la cause de plus de 106 000 décès et de plus de 5,7 millions de blessés chaque année (selon des données de 2008).

La solution : un projet fondé sur les travaux antérieurs couronnés de succès réalisés par la Banque asiatique de Développement pour les pays de l’ASEAN. Les tâches suivantes ont été entreprises :

  • identifier les besoins en ressources humaines et en formation dans toute la région,
  • identifier les lieux où des formations de formateurs, de la recherche et des initiatives de sécurité peuvent être développés,
  • développer une série de stages de formation des futurs instructeurs couvrant les problèmes principaux de la sécurité routière (par exemple, la sécurité en motocyclette, l’analyse des données sur la sécurité, l’application par la police des règles de circulation). Après leur formation initiale au cours d’un stage central, les instructeurs seront assistés dans l’organisation des premiers stages et de projets de démonstration en territoire national, en vue de les offrir dans chacun des 10 pays de la région.
  • Assister les pays dans le développement et la mise en œuvre de projets pilotes et de démonstration.
  • Développer de manière centralisée des matériels et manuels didactiques en réunissant des experts internationaux et des experts locaux de l’ASEAN de haut niveau, afin qu’ils modifient et adaptent les matériels pédagogiques provenant d’autres pays aux contextes des pays de l’ASEAN et
  • Coordonner étroitement avec le secteur privé, les organisations non gouvernementales et les autres agences impliquées dans la sécurité routière pour maximiser l’efficacité des projets.

Les résultats : les résultats attendus de ce projet comprennent :

  • le renforcement de la capacité de suivi et d’analyse des données sur les accidents de la circulation,
  • le renforcement de la capacité à mettre en œuvre des stratégies de sécurité routière,
  • le renforcement de la capacité à aborder les problèmes de sécurité en motocyclette,
  • l’amélioration de la capacité de contrôle de la police routière,
  • la constitution d’une source de projets de sécurité routière et
  • la diffusion publique des produits de connaissances.

La page Internet de la Banque asiatique de Développement offre plus de détail : http://adb.org/projects/details?page=details&proj_id=43080-012 .

Source : Banque asiatique de Développement

 

Renforcer la capacité par des projets de démonstration

Établir des stratégies et plans d’investissement et des objectifs pour la sécurité routière est une tâche complexe, qui requiert la connaissance des risques existants, la compréhension de ce qui est faisable, et la capacité de gérer efficacement les processus nécessaires de changement au sein des agences pour intégrer les activités de sécurité routière.

Comme recommandé au chapitre 3.2.2, pour les PRFI, la première étape de leur activité dans le domaine de la sécurité routière (la phase de mise en place de l’investissement) sera de préparer des projets de démonstration, au lieu de s’embarquer dans d’ambitieux plans nationaux d’amélioration de la sécurité routière et d’établir des objectifs « idéaux », qui sont plus appropriés à moyen terme pour la phase de croissance de l’investissement.

Les PRFIs devront activement acquérir des connaissances et une capacité de gestion leur permettant de concrétiser ces projets et de les étendre à plus large échelle dans tout le pays. Cette expérience développera progressivement la capacité nécessaire à l’établissement des objectifs ultérieurs et le soutien aux stratégies et plans.

L’utilisation de projets adéquats de démonstration par les PRFI est examinée en détail au chapitre 6.5.3.

Il est important de noter que les projets de démonstration doivent être soigneusement adaptés au contexte de chaque pays. Même si ces projets vont générer de l’expertise, il est essentiel de préparer un programme continu d’actions ultérieures en fonction de la capacité de chaque pays. De cette manière, une « capacité permanente » peut être générée en vue d’améliorer la sécurité routière.

Pour les PRE, la réalisation, impliquant toutes les agences de sécurité routière, de projets de démonstration testant des traitements novateurs peut être aussi une manière efficace de préparer un déploiement plus large. Elle peut aider à renforcer la capacité et la direction institutionnelles, au partage de connaissances et à l’établissement de partenariats pour agir. Les projets de cette nature offrent une opportunité ciblée, par exemple, de tester et d’intégrer les approches du Système Sûr dans de nouvelles stratégies et dans les pratiques des agences de sécurité routière.

Références

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