Manuel de sécurité routière
Un manuel pour les praticiens et les décideurs
pour la mise en œuvre d’une infrastructure sûre

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1.4 La Sécurité routière en contexte

L’amélioration de la sécurité routière dans le monde est désormais associée à la vision plus générale du développement durable et des priorités données aux droits des enfants, à la santé publique, à la réduction de la pauvreté et à la l’inclusion sociale, de même qu’à à la santé et la sécurité au travail.

Des objectifs de mobilité abordable, propre et sûre

À la suite des cinq résolutions successives de l’ONU sur l’amélioration de la sécurité routière depuis 2004, la conférence de dirigeants mondiaux organisée par l’ONU  à Rio a mis en lumière, au cours des discussions entourant l’initiative, le Futur que Nous Voulons (ONU 2012), l’importance de l’efficacité des mouvements des personnes et des biens, et de l’accès à des transports abordables, sûrs et respectueux de l’environnement en tant qu’instrument pour améliorer l’équité sociale, la santé, la résilience des villes, les connections urbain-rural et la productivité des zones rurales. A cet égard, la sécurité comme fait partie des efforts pour atteindre un développement durable (ONU, 2012). Il y a aussi des demandes pour que la sécurité routière soit reconnue et incluse dans le cadre des Objectifs de Développement Durables post-2015 (Commission pour la Sécurité routière, ONU, 2013 ; Groupe ouvert de Travail sur les Objectifs de Développement Durable, ONU, 2014). De plus en plus, en politique nationale de transport, des objectifs de mobilité abordable, propre et sûre sont établis pour concrétiser les bénéfices associés des initiatives intégrées (Encadré 1.5).

Encadré 1.5 : Exemples de déclarations d’objectifs de politique de transport nationale, dans des pays sélectionnés de l’OCDE

Australie: « L’Australie a besoin d’un système de transport national sûr, efficace, fiable et intégré qui soutienne et augmente le développement économique de la nation ainsi que le bien-être social et environnemental ». (National Transport Policy, Australian Transport Council, 2009).

Canada: la vision de Transport Canada est “Un système de transport au Canada qui soit mondialement reconnu comme sûr, efficace, et responsable à l’égard de l’environnement. (Transport Canada, 2011).

Pays-Bas: « les Pays-Bas devraient offrir à tous un système de transport et de trafic durable, sûr et efficace, selon lequel   la qualité pour les usagers individuels se trouve dans un équilibre véritable avec la qualité pour le pays tout entier ». (National Traffic and Transport Plan, 2001–2020, Ministry of Transports, Netherlands).

Nouvelle-Zélande : la vision du gouvernement pour les transports d’ici à 2040 est que : « les personnes et le fret en Nouvelle Zélande aient accès à un système de transport abordable, intégré, sûr, réactif et durable » (New Zealand Transport Strategy, 2008, Ministry of Transport).

Norvège : « le gouvernement vise à fournir un système de transport efficace, universellement accessible, sûr et respectueux de l’environnement, qui couvre les besoins de transport de la société norvégienne et contribue au développement régional ». (National Transport Plan, 2010–2019, Norwegian Ministry of Transport and Communications).

Suède : « l’objectif de la politique de transport est d’assurer la fourniture durable et économiquement efficace de services de transport pour les personnes et les entreprises dans tout le pays. L’accessibilité est l’objectif fonctionnel et la santé, la sécurité et l’environnement sont les objectifs d’impact. La conception, la fonction et l’utilisation du système de transport seront adaptées pour éliminer les accidents graves et mortels. Elles contribueront aussi à l’atteinte des objectifs de qualité environnementale et à de meilleures conditions de santé ».  (Ministry of Enterprise, Energy and Communications, Stockholm, Mai 2009).

États-Unis : la législation établissant les besoins de transport pour le 21ème siècle déclare que : « parmi les besoins les plus pressants que le système de transport en surface doit satisfaire pour soutenir une économie nationale vigoureuse se trouve le transport fiable, efficace et sûr ». (Safe, accountable, flexible, efficient transportation equity act: a legacy for users, Public law 109–59, 2005).

Source: Bliss et Breen, (2011).

 

Malgré la croissance rapide du trafic motorisé, les principaux modes de déplacement dans les PRFI resteront probablement la marche, la bicyclette, la motocyclette et les transports publics (Kopits et Cropper, 2003). Ceci souligne l’importance de planifier et de prévoir les besoins de ces catégories d’usagers de la route en sécurité (en particulier pour les piétons, qui sont les usagers les plus vulnérables), qui sont celles qui subissent une proportion élevée de blessures lors d’accidents de la circulation, ainsi que d’intégrer la sécurité dans le développement de réseaux routiers pour voitures, camionnettes, bus et camions.

D’importants co-bénéfices peuvent être obtenus pour l’environnement et la santé publique. Par exemple, la planification de l’aménagement du territoire et des transports, la mise en place d’aménagements plus sûrs pour promouvoir la marche à pied et le cyclisme, ainsi que des mesures pour réduire les vitesses véhiculaires, permettront également de réduire les émissions de gaz à effet de serre et la pollution atmosphérique locale, d'améliorer la sécurité énergétique et le bien-être physique (FMSR), 2009).

Parmi les autres moyens on peut citer la réduction du volume de la circulation automobile par la mise en place de transports publics et l’application de politiques urbaines vivables, la mise en place de réseaux efficaces où les trajets les plus courts et les plus rapides coïncident avec les routes les plus sûres, et en encourageant les usagers de la route et le fret à passer de modes de transport présentant un plus haut risque à ceux présentant un moindre risque (Peden et al, 2004).

Dans certains cas, la politique de sécurité routière peut se trouver en conflit (où être perçue comme telle) avec d’autres nécessités et politiques sociétales. Cependant, les objectifs de mobilité abordable, propre et sûre pour la politique des transports fournissent le moyen de rechercher des solutions intégrées qui répondent à des objectifs sociétaux concurrents.

Priorité de santé publique

 la suite de la publication du Rapport mondial sur la Prévention des Traumatismes dus aux Accidents de la Circulation (Peden et al, 2004), l’Assemblée mondiale de la Santé a adopté la Résolution WHA5.710 sur la sécurité routière et la santé, qui appelle les États membres de l’OMS à faire de la sécurité routière une question de santé publique prioritaire et à prendre des dispositions pour mettre en œuvre des mesures connues pour leur efficacité dans la réduction des blessures dues à des accidents de la route.

Droits de l’enfant et du citoyen

La Convention sur les Droits de l’Enfants, Résolution 44/25 (1989) de l’Assemblée générale des Nations Unies, qui a été largement acceptée, exige des signataires gouvernementaux qu’ils fournissent un environnement sûr et une protection contre les blessures et la violence aux enfants. La Déclaration de Tylösand adoptée en 2007 par les agences de sécurité routière et des parties prenantes de la Suède, stipule que : « chacun a le droit d’utiliser les routes et les rues sans menace à sa vie ou à sa santé » (voir Encadré 1.6).

Encadré 1.6 : La Déclaration de Tylösand sur le droit des citoyens à la sécurité routière, Suède (2007)

Articles

  1. Chacun a le droit d’utiliser les routes et les rues sans que sa vie ou sa santé ne soit menacée.
  2. Chacun a le droit à une mobilité sûre et durable : la sécurité et la durabilité du transport routier devraient se compléter l’une l’autre.
  3. Chacun a le droit d’utiliser le système de transport routier sans imposer aucune menace (non intentionnelle) à la vie ou à la santé des autres.
  4. Chacun a le droit à l’information sur les problèmes de sécurité et le niveau de sécurité de tout composant, produit, action ou service du système de transport routier.
  5. Chacun est en droit d’attendre une amélioration systématique et continue de la sécurité, et toute partie prenante du système de transport routier a le devoir d’entreprendre les actions correctives nécessaires à la suite de la détection de tout danger de sécurité pouvant être limité ou supprimé.

Source: http://publikationswebbutik.vv.se/upload/3423/89044_Tylosandsdeklarationen.pdf

 

Objectifs de réduction de la pauvreté

Étant donné l’ampleur des pertes de PIB dues aux accidents de la route, les améliorations à la sécurité routière peuvent aider à atteindre les objectifs de réduction de pauvreté. Les victimes d’accidents impliquent typiquement les citoyens les plus impliqués économiquement, souvent avec des impacts négatifs sur leurs familles.

Priorité à l’équité sociale

Le Rapport mondial (Peden et al, 2004) a identifié la sécurité routière comme étant une question d’équité sociale, dont les usagers vulnérables de la route bénéficient le moins, du fait de politiques conçues pour le déplacement motorisé, tout en supportant une part disproportionnée des désavantages de la motorisation, en termes de dommages corporels, de pollution et de séparation des communautés.

Santé et sécurité au travail

La sécurité routière liée au travail peut contribuer à des réductions substantielles des coûts pour les employeurs, et avoir un impact sur les objectifs nationaux et organisationnels de santé et de sécurité au travail. De plus en plus, des stratégies nationales de sécurité sont développées conjointement par des agences leaders en sécurité routière et le secteur de la santé. La nouvelle norme ISO 39001 sur les systèmes de la gestion de sécurité routière dans les organisations a été élaborée pour fournir aux employeurs des conseils à ces fins (voir Chapitre 3).

Objectifs éducatifs

Les effets des traumatismes liés aux accidents de la route sur les objectifs d’éducation ont été peu examinés, et plusieurs milliers d’enfants voient leurs perspectives d’éducation réduites par les blessures et l’invalidité dues à ces accidents (Watkins et Sridhar, 2009).

Impacts du tourisme

Un rapport de l’OMS (2007) a conclu que les risques d’accidents de la route sont notablement plus élevés pour les touristes que les risques sanitaires tels que les épidémies (par exemple, le SIDA), les maladies (comme le paludisme et le choléra), les risques personnels associés au terrorisme international, à la violence et à la criminalité, les risques de blessures lors d’un voyage avec un autre mode de transport que la route (par exemple, en avion), et autres risques personnels de blessure ou de décès tels que la noyade. On prévoit que les décès par accidents de la route associés au tourisme international se multiplieront par trois, jusqu’à 75 000 par an d’ici 2030, avec des implications aussi bien pour les économies développées que pour les économies en développement (Commission pour la Sécurité routière dans le Monde, 2010).

Il est clair que les blessures dues aux accidents de la circulation ont de nombreux impacts sociétaux. L’ampleur des défis de sécurité routière et la diversité des effets des dommages par accidents de la route montrent l’importance d’explorer les synergies avec d’autres priorités et objectifs sociétaux. Lorsqu’elles sont dirigées et assistées par des organismes nationaux en charge de la sécurité routière, les dispositifs nationaux de coordination de la sécurité routière nationale fournissent une plateforme précieuse pour intégrer la sécurité routière aux autres politiques gouvernementales afin d’améliorer les niveaux de couverture et de ressources.

Références

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