Manuel de sécurité routière
Un manuel pour les praticiens et les décideurs
pour la mise en œuvre d’une infrastructure sûre
Une fois le type de problème identifié (que ce soit au moyen d’une analyse d’accidents ou d’autres formes d’évaluation du risque), l’étape suivante du processus consiste à choisir une intervention appropriée. Les principaux objectifs de cette étape sont :
Il y a un certain nombre de questions à prendre en considération lors de la sélection des interventions. Habituellement, le coût et l’efficacité économique sont les considérations premières, mais il en existe d’autres. Il est important de s’assurer que l’intervention est rentable, qu’elle offre un rapport coût-avantage positif, et qu’elle peut être mise en œuvre dans les limites du budget disponible. En se fondant sur les questions soulevées par Ogden (1996) et BITRE (2012), d’autres considérations entrent en ligne de compte :
Une hiérarchie de contrôle est souvent utilisée dans l’évaluation du risque pour sélectionner et prioriser les interventions. Par exemple, Marsh et al (2013) suggèrent qu’une telle hiérarchie aide à identifier un ordre de priorité pour les différents types de traitement de sécurité routière, en fonction des résultats. Ils suggèrent une hiérarchie des mesures d’ingénierie routière fondée sur l’approche du Système sûr pour aider à résoudre les problèmes de distraction et de fatigue des conducteurs. Cette hiérarchie comporte quatre niveaux, et il est suggéré que le niveau 1 correspond à un niveau de risque auquel des résultats du Système sûr sont probables :
Un grand nombre d’interventions peuvent être utilisées pour améliorer la sécurité routière. Certaines d’entre elles n’ont que peu d’impact sur la sécurité, tandis que d’autres peuvent produire des réductions substantielles du nombre de tués et de blessures graves. Le concept d’infrastructure à forts résultats a été présenté au chapitre 4.7.1 et examiné dans le contexte de l’approche de Système sûr dans plusieurs documents. Par exemple, Turner et al (2009) font la distinction entre les traitements de sécurité routière «primaires » et les traitements « de soutien ». Les traitements primaires sont ceux qui constituent un grand pas en avant vers des résultats de Système sûr, c’est-à-dire zéro décès et blessures graves. Ceci peut être obtenu en réduisant l’impact des forces à des niveaux sûrs ou en séparant les différentes catégories d’usagers. Un traitement « de soutien » aide à améliorer la sécurité, mais seulement de manière marginale. Par exemple, un panneau d’alerte au danger peut réduire le nombre d’accidents (y compris les accidents graves), mais n’aura pas d’impact sur la gravité des accidents. Il est fortement recommandé que les traitements primaires soient utilisés autant que possible, dans un effort pour atteindre les objectifs du Système sûr. Des exemples de certains traitements clés sont présentés dans le graphique 11.3.
Les questions spécifiques aux PRFI concernant l’utilisation de tels traitements sont traitées plus en profondeur au chapitre 11.3.4.
NZTA (2011) se réfère aux traitements de transformation en Système sûr pour les routes interurbaines. Ces traitements sont définis comme pouvant traiter de forts pourcentages d’accidents mortels et graves pour les trois principaux types d’accidents sur ces routes (sortie de route, choc frontal et collisions aux carrefours). Il a été reconnu que ces traitements sont typiquement plus coûteux, et que leur mise en œuvre requiert plus de temps. Des exemples de tels traitements comprennent les voies express (4 voies et des traitements 2+1), les barrières médianes et latérales, des zones dégagées (zone libre de danger sur les accotements), des carrefours dénivelés (passerelles et échangeurs), les carrefours giratoires et la gestion efficace des vitesses.
L’une des considérations les plus importantes dans le choix des interventions est la connaissance du gain de sécurité apporté par le traitement. Ce gain est souvent décrit comme un facteur de réduction des accidents (le pourcentage attendu de réduction du nombre d’accidents) ou facteur de modification des accidents (FMA, le multiplicateur appliqué au nombre d’accidents avant traitement. Par exemple, un FMA de 0,8 indique que la réduction attendue du nombre des accidents sera de 20%). Plusieurs sources renseignent sur cette question (voir aussi l’Encadré 11.2).
Le Centre d‘Information sur les Facteurs de Modification des Accidents (FMA) (http://www.FMAclearinghouse.org/) est l’une des sources d’information les plus complètes et les plus avancées sur l’efficacité des mesures de sécurité routière sur l’infrastructure. Financé par l’administration fédérale des autoroutes (FHWA) des États-Unis, il fournit une base de données consultable sur l’efficacité. Il est constamment mis à jour, ce qui en fait l’une des sources d’information les plus actualisées sur le sujet. Le centre d’Information sur les FMAs applique un système de classement par étoiles (de 1 à 5) selon la robustesse de chaque FMA. Ce classement est fondé sur la conception des études, la taille de l’échantillon, l’erreur type, les biais potentiels et la source des données.
Étant donné que l’objectif de l’approche du Système sûr est d’éliminer les décès et les blessures graves, il est important de comprendre l’effet que les différentes interventions auront sur les accidents mortels et graves. Toutefois, une grande partie de la recherche fournit de l’information sur l’efficacité des interventions sur la réduction du nombre de victimes (c’est-à-dire la réduction du nombre de décès, de blessures graves et mineures combinées), ou sur le changement dans tous les accidents (y compris ceux sans blessures). Il s’agit là d’une distinction importante, et il est dommage que l’information sur les accidents mortels et graves soit si rare. Bien qu’il soit souhaitable de réduire au minimum tous les accidents, y compris ceux qui n’entrainent pas de blessure, la réduction globale des accidents graves et fatals est primordiale. Les professionnels de la sécurité ne devraient pas être dissuadés d’utiliser des interventions qui ont un effet neutre sur les accidents mineurs et sans blessures, et il peut même exister des situations où ces accidents augmenteront (généralement par une réduction de la gravité des accidents qui continuent de se produire sur un site traité).
En l’absence d’information sur l’effet des interventions sur les accidents mortels et graves, il convient d’utiliser celle sur la réduction du nombre de victimes, bien qu’un élément de jugement technique puisse aussi être nécessaire pour utiliser cette information. La réduction attendue des accidents graves et mortels est souvent plus élevée que la réduction de toutes les victimes. Par exemple, BITRE (2012) a constaté que l’impact de l’installation de carrefours giratoires sur les collisions était plus important dans le cas des accidents graves :
Les mêmes tendances ont été notées par Jensen (2013) dans une étude européenne. Il ressort donc clairement que l’utilisation de la réduction des accidents résultera souvent en une valeur conservative pour la réduction attendue des accidents graves et mortels.
La matrice suivante (Tableau 11.1) fournit un résumé des options de traitement de sécurité routière et de leur efficacité sur certains des principaux types d’accidents mortels ou causant des blessures graves. L’information sur chacun de ces traitements ainsi que leurs coûts indicatifs généraux est présentée au chapitre 11.3.3. Des coûts indicatifs généraux sont également fournis.
Traitements | Type d'accident | Coût | |||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
1. | 2. | 3. | 4. | 5. | 6. | ||
Réduction attendue du nombre des accidents de 60% ou plus | |||||||
Carrefours – Ronds-points Barrière médiane Passage piéton – carrefour dénivelé Allée piétonnière Contrôle aux passages à niveau Sécurité des accotements – barrières | ✓ | $$ | |||||
Carrefours – Ronds-points | ✓ | ✓ | $$ | ||||
Barrière médiane | ✓ | $$$ | |||||
Allée piétonnière | ✓ | $$ | |||||
Contrôle aux passages à niveau | ✓ | $$ | |||||
Sécurité des accotements – barrières | ✓ | $$ | |||||
Réduction attendue du nombre des accidents de 25 à 40% | |||||||
Voie supplémentaire
| ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Pistes pour motocyclettes | ✓ | $$$ | |||||
Duplication | ✓ | $$$ | |||||
Carrefour dénivelé | ✓ | ✓ | ✓ | $$$ | |||
Carrefour à feux | ✓ | $$ | |||||
Élargissement de la voie | ✓ | ✓ | ✓ | $$ | |||
Réseau à sens unique | ✓ | ✓ | ✓ | $$$ | |||
Passage piéton – sans feux | ✓ | $ | |||||
Passage piéton – avec feux | ✓ | $$ | |||||
Ilot de refuge pour piétons | ✓ | $ | |||||
Correction du tracé en plan | ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Restreindre/combiner les points d’accès directs | ✓ | ✓ | $$ | ||||
Sécurité des accotements – enlèvement des obstacles | ✓ | $$ | |||||
Route de service | ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Revêtement de l’accotement | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $$ | ||
Adhérence | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |
Gestion de la vitesse | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $ |
Modération de la circulation | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $$ | |
Réduction attendue du nombre des accidents de 10 à 25% | |||||||
Hachurage central | ✓ | ✓ | $ | ||||
Voie centrale de tourne à gauche (longueur entière) | ✓ | ✓ | $ | ||||
Délinéateurs | ✓ | ✓ | ✓ | ✓ | $ | ||
Carrefour – délimitation | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Carrefour – voies de virages (sans feux) | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Carrefour – voies de virages (avec feux) | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Amélioration du stationnement | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Correction du profil en long | ✓ | ✓ | $$$ | ||||
Régulation de l’activité commerciale sur les accotements | ✓ | ✓ | ✓ | $ | |||
Bandes rugueuses | ✓ | ✓ | $ | ||||
Amélioration des talus | ✓ | $$$ |
Note: $ = faible coût; $$ = coût moyen, $$$=coût élevé.
Comme le montre le tableau 11.1, la gestion de la vitesse est un moyen de traitement de presque tous les types d’accidents. Lorsque la vitesse a été identifiée comme un problème, les vitesses peuvent être réduites par des mesures efficaces de gestion. Il en résultera moins de décès et de blessures graves, à condition que le taux de respect des règles de circulation soit élevé, ou que des mesures supplémentaires de contrôle par la police soient prises.
Les interventions devraient être sélectionnées en fonction du site, de la route ou d’une zone particulière, et en fonction du type d’accidents qui s’y produit. Les types d’accidents peuvent être identifiés grâce à des méthodes réactives (fondées sur les accidents) ou proactives (chapitre 10).
Des interventions uniques peuvent être utilisées, ou plus communément des combinaisons d’interventions peuvent être choisies pour combattre un type d’accidents ou un problème particulier. La sélection finale de l’intervention requiert un jugement d’expert sur les facteurs qui ont contribué ou qui peuvent contribuer aux accidents.
Plusieurs guides fournissent des conseils sur les interventions appropriées pour aborder des problèmes spécifiques d’accidents. L’AIPCR (2009) fournit un ensemble détaillé d’options dans son Catalogue des problèmes de sécurité en conception et des mesures correctives, selon la fonction de la route, la section transversale, le tracé, les intersections, les services publics et privés, les usagers vulnérables, la signalisation et le marquage et les caractéristiques routières.
Un certain nombre d’interventions sont proposées pour aborder les problèmes de sécurité liés à chacun de ces sujets. Dans chaque cas, des informations sont fournies sur le problème de sécurité routière. Les types de traitement sont présentés accompagnés de photos du traitement, d’une brève description, de coûts indicatifs, des types d’accidents concernés et des catégories d’usagers affectées. L’exemple ci-dessous (graphique 11.4) montre des solutions potentielles pour les problèmes liés à des accotements qui ne pardonnent pas (catégorisés dans la rubrique Caractéristiques des accotements).
Il existe plusieurs outils en ligne qui fournissent des renseignements comparables et dans certains cas plus détaillés. Certains couvrent une ample variété de traitements, tandis que d’autres se concentrent sur des types particuliers d’accidents. Austroads (engtoolkit.com.au) et l’iRAP (toolkit.irap.org) ont développé des boites à outils en ligne donnant des conseils sur les options de traitements pour différents problèmes de sécurité routière. Elles sont toutes les deux régulièrement mises à jour et révisées afin de tenir compte des résultats les plus récents en matière de sécurité routière. Chacune comprend des informations détaillées sur les problèmes de problèmes et les traitements des accidents, y compris les coûts indicatifs, la sécurité et autres avantages, les questions de mise en œuvre et les références.
La boite à outils d’Austroads est conçue pour traiter les problèmes de sécurité identifiés par les enquêtes sur les accidents et les audits de sécurité routière (lacunes de sécurité). Des informations détaillées sont fournies sur les solutions, y compris des liens vers les documents de conception pertinents. La boite à outils sur la sécurité est destinée aux praticiens des PRFIs, et a été traduite en plusieurs langues, dont le français, l’arabe, l’espagnol et le mandarin. Le graphique 5 montre une image extraite de cette boite à outils.
Bien que ce Manuel soit axé sur les interventions relatives à l’infrastructure, il est important de veiller à ce que les approches multisectorielles (par exemple impliquant l’éducation et l’application de la loi) soient prises en compte, parce qu’elles auront souvent un impact sur la sécurité plus fort que les seules mesures relatives à l’infrastructure. Ceci est particulièrement vrai dans les PRFI, où le niveau de respect des règles de la circulation peut être moins élevé et où le grand public peut moins bien comprendre les intentions des interventions de sécurité routière. Les questions spécifiques aux PRFI et à l’efficacité des interventions sont examinées au chapitre 11.3.4. L’Encadré 11.3 donne un exemple de programme combiné d’intervention sur l’infrastructure et d’éducation pour aborder la sécurité des piétons en Afrique du Sud.
Le problème : le manque d’installations piétonnières, de sensibilisation à la sécurité routière et d’accès.
La solution : le Projet Autoroute R300 englobait la nécessité d’aborder de manière holistique les besoins de mobilité et d’accessibilité de tous les usagers de la route. Le projet impliquait l’utilisation de méthodes non conventionnelles pour encourager la population à s’approprier les responsabilités en matière de sécurité routière qui ont une incidence sur leurs besoins de déplacements quotidiens. Ceci a été fait dans le contexte d’un investissement majeur en infrastructure routière et en veillant à ce que les préoccupations existantes en matière de sécurité routière soient abordées et non pas accrues par inadvertance.
En 2007, l’agence nationale sud-africaine de la sécurité routière (SANRAL) a modernisé l’autoroute R300. Il s’agissait de passer de quatre à six voies avec des chaussées séparées afin d’augmenter sa capacité, d’installer des barrières médianes en béton pour séparer les chaussées, d’installer un éclairage public le long de la ligne médiane et des bas-côtés sur toutes les rampes d’échange existantes, d’élargir les ponts au long de la route, et de déployer un système de gestion de l’autoroute comprenant un système de surveillance par télévision en circuit fermé et des panneaux à message variable. Le projet a été achevé en juillet 2010.
Pour faciliter l’accès et la mobilité des piétons en toute sécurité, une passerelle piétonne a aussi été construite, travaux qui se sont terminés en 2008. En plus de la passerelle, SANRAL a aussi conçu un programme d’éducation destiné à améliorer la sensibilisation et la sécurité routière des piétons dans les zones entourant l’autoroute R300. Cela impliquait également l’utilisation des brochures de sécurité routière « Streetwise » de SANRAL. Ce programme d’éducation comportait différents volets avec des programmes spécifiques pour les élèves (« safer road to school ») et la population en général.
Les résultats : le projet a permis d’améliorer la mobilité des véhicules et des piétons, avec des passages piétons plus sûrs. L’utilisation de l’infrastructure piétonnière comme les passerelles s’est améliorée, ce qui a réduit l’exposition des piétons aux véhicules à grande vitesse. Bien qu’il soit encore trop tôt pour déterminer l’efficacité exacte du programme en termes de réduction du nombre de piétons tués, les statistiques disponibles indiquent une tendance à la baisse dans les accidents de piétons. Pour la période allant de mars 2010 à août 2012 (presque deux ans et demi), il y a eu 10 accidents mortels et 12 accidents graves de piétons, contre 87 accidents mortels et 81 blessures graves entre 2002 et 2007. La situation est suivie de près.
Les manuels SURE (et plus particulièrement le « Plan d’Action et de Réalisation des Actions ») est un autre exemple d’approche multisectorielle, et offre des conseils fondés sur les méthodes françaises de sélection des interventions de sécurité sur le réseau (encadré 8 du Chapitre 9).
La plupart des informations sur l’efficacité des interventions sont basées sur la recherche effectuée dans les PRE. Dans les PRFI, à l’exception de la recherche sur les interventions relatives aux comportements, il n’existe que très peu d’études sur l’efficacité, en particulier sur les traitements de l’infrastructure. Cette question est importante, car on ne peut pas s’attendre à ce que les interventions utilisées dans les PREs aient les mêmes résultats lorsqu’elles sont utilisées dans les PRFIs.
Cette question a été soulevée dans plusieurs études. L’OCDE/FIT (2012) suggère que de nombreux éléments liés au contexte et à l’environnement influencent la réduction réelle des accidents, et que cet effet est encore plus critique dans les PRFIs. Par exemple, la fourniture d’un accotement revêtu peut améliorer la sécurité dans un PREs, mais dans un pays moins développé, elle peut encourager des utilisations inappropriées, telles que l’installation de stands de vente d’articles aux voyageurs, ce qui peut diminuer la sécurité de la route. La compréhension des ces questions de contexte est évidemment essentielle à la réussite de la mise en œuvre réussie des traitements de sécurité.
Il semble également que plusieurs barrières existent à la mise en œuvre réussie de traitements de sécurité routière. Turner et Smith (2013) ont animé un atelier de travail pour identifier les problèmes autour de la mise en œuvre des traitements d’infrastructure dans les PRFI. Plusieurs traitements efficaces d’infrastructure ont été discutés, et les barrières à chacun de ces traitements explorées. Bien que de nombreux problèmes aient été identifiés pour chaque type de traitement, beaucoup relèvent de catégories similaires. Il s’agit notamment du coût, du non-respect des règles de circulation, de questions de conception et de mise en œuvre, de l’acceptation par le public et de l’entretien.
Le coût est une question soulevée pour de nombreux traitements, mais, curieusement, pas pour tous. Pour certains des traitements très efficaces, le coût ne semble pas être un problème majeur. Il est plus intéressant de noter que les questions relatives au respect des règles de circulation et à la conception et la mise en œuvre ont été soulevées pour un plus grand nombre de traitements que le coût. Le respect des mesures de traitement par les usagers est un problème significatif dans les PRFI, et il est très probable que de ce fait, l’efficacité du traitement sera moindre. Les traitements souffrant le plus de ce problème de respect sont :
Cette question du non-respect montre le besoin d’une réponse multisectorielle aux problèmes de sécurité routière. L’utilisation d’une infrastructure plus sûre doit être soutenue par une éducation et des sanctions policières appropriées, ce qui a déjà été examiné dans ce Manuel.
Les questions de conception et de mise en œuvre sont aussi été considérées comme ayant un impact sur l’efficacité des traitements. Si un traitement n’est pas bien conçu et que sa réalisation n’est pas de bonne qualité, le potentiel de réduction des accidents ne sera pas atteint. Cela a été considéré comme un problème pour tous les traitements examinés. Cette situation ne peut être améliorée qu’en améliorant les compétences et les capacités des praticiens travaillant dans les PRFI, y compris le partage des connaissances sur les bonnes pratiques.
Enfin, l’entretien est aussi une question qui aura un impact sur l’efficacité des traitements en termes de réduction des accidents. Il est courant que les traitements se détériorent jusqu’à des niveaux où ils deviennent moins sûrs (ou même jusqu’à un point où ils posent un risque plus élevé que si le traitement n’était pas présent). Un financement approprié est nécessaire pour assurer que l’entretien des traitements. Une formation peut aussi être nécessaire en ce qui concerne l’entretien.
Bien que toutes ces questions soient susceptibles d’être préoccupantes dans les PRE, elles le sont sans doute encore plus dans les PFRI, et auront certainement un impact sur l’efficacité des traitements. L’ampleur de cet effet n’est pas connue, mais il est permis de supposer qu’en raison de ces problèmes, l’efficacité des traitements soit probablement différente (et typiquement moindre) que lorsque ces mêmes traitements sont utilisés dans les PRE.
Étant donné l’absence de données fiables sur l’efficacité des traitements dans les PRFI, il est recommandé d’utiliser les valeurs de réduction des accidents dans les PRE comme un point de départ pour la sélection des traitements. Toutefois, les questions considérées ci-dessus doivent être soigneusement examinées, et les avantages escomptés doivent être révisés en conséquence. Il est à espérer qu’à plus long terme, la base de connaissance sur l’efficacité des traitements dans les PRFI s’améliorera, mais ceci n’adviendra que si un suivi et une évaluation appropriés ont lieu dans ces pays (chapitre 12).
De nouveaux traitements de sécurité novateurs seront nécessaires afin d’aider à éliminer les décès et les blessures graves sur les routes. Actuellement, de nombreux traitements de sécurité n’ont pour effet que des résultats résiduels en termes du nombre d’accidents graves, et des améliorations aux traitements actuels seront donc nécessaires. À mesure que des traitements seront appliqués à de nouvelles situations (y compris dans les PRFI), il sera nécessaire de les adapter pour obtenir de meilleurs résultats. Il existe aussi un certain nombre de traitements hautement efficaces qui sont utilisés dans certains pays, et pas du tout dans d’autres. Les agences routières et les organisations de soutien doivent innover et adopter de nouvelles approches, à condition que ces dernières soient fondées sur le retour d’expérience. Il est recommandé que les agences routières enquêtent sur de nouvelles interventions, et tirent des enseignements des expériences à l’étranger.
Les raisons pour lesquelles certains traitements très efficaces ne sont pas utilisés dans certains pays sont les suivantes :
Les agences routières doivent être prudentes dans leur sélection de nouveaux traitements, en s’assurant que ceux-ci ont été rigoureusement mis à l’épreuve et qu’ils ont démontré leurs avantages en termes de sécurité. Les projets de démonstration peuvent être un moyen efficace d’évaluer les traitements prometteurs, et de se préparer à un plus large déploiement (chapitre 9).
Il est suggéré de suivre une approche méthodologique de l’innovation, dont les étapes sont les suivantes :
Plusieurs documents de référence présentés plus haut dans ce chapitre donnent des exemples de traitements novateurs de la sécurité routière. Certains organismes font la promotion active de certains traitements (y compris des traitements novateurs) qu’ils aimeraient voir utilisés plus souvent (par exemple FHWA, 20155, qui documente et fait la promotion de contre-mesures prouvées de sécurité, et fournit des renseignements sur la conception innovante des intersections, y compris des vidéos, à l’adresse suivante :
http://www.fhwa.dot.gov/everydaycounts/edctwo/2012/geometrics.cfm). De nombreuses études nationales et locales ont été effectuées pour évaluer les traitements novateurs prometteurs. Ces études sont habituellement entreprises par des universités et des instituts de recherche, et l’information sur les essais est diffusée dans des publications et des conférences internationales, mais il faut s’assurer que cette information est fiable.
L'étude de cas ci-dessous fournit un exemple d'utilisation novatrice des systèmes de transport intelligents (STI) en Thaïlande (Encadré 11.4).
Le problème : Un tronçon de 12,5 km de la route nationale 304 qui traverse le parc national de Tublan en Thaïlande est connu pour ses accidents graves et a été identifié comme l'un des principaux corridors d'accidents par le ministère des Routes (DOH) sur la base de dossiers d'accidents sur 5 ans. Il s'agit de la seule section à deux voies restante du corridor, puisque la majeure partie de la route nationale 304 a été élargie à quatre voies. La section comprend un terrain montagneux avec une pente moyenne de 8 %. Environ 10 000 véhicules par jour empruntent le corridor, dont 25 % sont des camions. Les conducteurs désobéissent aux dispositifs de contrôle de la circulation et changent illégalement de voie dans des zones interdites de dépassement en présence de véhicules lents en montée. Les collisions frontales et les collisions au départ de la route, surtout dans les courbes, sont fréquentes sur ce tronçon de la route nationale 304.
La solution : Bien que des plans d'élargissement de ce tronçon de la route nationale 304 soient en cours d'élaboration, le processus prend beaucoup de temps. Le ministère thaïlandais des routes a mis en œuvre des stratégies STI et un système d'alerte d'incident à titre de mesure provisoire pour remédier au problème. À l'aide de la détection vidéo et hyperfréquence, de caméras et de panneaux à messages variables (PMV), les données, y compris le volume et la vitesse des véhicules, sont recueillies et transmises au siège du ministère pour analyse. Le nouveau système utilise des PMV pour avertir les conducteurs qu'ils approchent de virages serrés ou de pentes abruptes, d'incidents à venir comme un ralentissement de la circulation, de collisions ou de véhicules immobilisés, et pour les avertir également s'ils sont détectés en excès de vitesse. Les policiers et les agents du ministère de la Santé peuvent voir les conditions de circulation en temps réel pour confirmer les incidents, communiquer plus rapidement avec les équipes d'intervention d'urgence et modifier facilement les messages sur PMV lorsque les conditions changent.
Les résultats : Le projet des STI a été mis en œuvre en mai 2013. Au cours des cinq premiers mois de mise en œuvre, le nombre d'accidents graves est passé de 39 à 15, comparativement à la même période de cinq mois l'année précédente. Cette réduction des accidents graves de plus de 50 % a dépassé toutes les attentes du ministère de la Santé. En outre, le projet a également permis de réduire le nombre d'accidents secondaires et les retards de circulation dans le corridor. Un autre avantage du projet a été le renforcement de la coordination entre les organismes locaux, les équipes d'intervention d'urgence, la police, les conducteurs de dépanneuse et le personnel du ministère des Routes.
Source : Chayanan, S. (2015) "Intelligent Transportation Systems toward Safety Highways", Department of Highways, Ministry of Transport, Bangkok, Thailand.